M. Michel Heinrich appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'incarcération qui se dégradent au fil du temps. La population carcérale ne cesse d'augmenter au détriment des conditions de vie des détenus certes mais, également, au détriment des conditions de travail du personnel pénitentiaire. Trop souvent, l'incarcération est choisie aux dépens des alternatives à l'incarcération et cette surpopulation pénale crée des situations explosives sans apporter de réponse à la prévention, à la délinquance et à la récidive. Certes, on prône l'encellulement individuel, on décide de construire de nouvelles prisons mais là n'est pas la vraie question. Il conviendrait de développer une politique ambitieuse d'insertion des personnes détenues et de développer des peines alternatives à l'incarcération et il souhaiterait connaître ses projets sur ce point.
Le développement des alternatives à l'incarcération et des aménagements de peine est une des priorités que s'est fixée le ministère, comme en a attesté la première circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012 aux termes de laquelle le recours à l'incarcération doit répondre aux situations qui l'exigent strictement. Une concertation accrue entre les services judiciaires et pénitentiaires a été demandée afin de permettre une connaissance par les magistrats chargés de l'exécution et de l'application des peines des éléments statistiques relatifs à la population pénale écrouée dans leur ressort. Pour permettre d'évaluer régulièrement la situation des établissements pénitentiaires au regard notamment de leur taux d'occupation et s'assurer de la mise en oeuvre des orientations de la circulaire de politique pénale, des indicateurs ont été définis et sont analysés tous les trimestres au niveau national et local. Parce que le recours systématique à l'incarcération génère également la surpopulation en maison d'arrêt, il convient de privilégier les peines qui permettent de prononcer une sanction compréhensible par tous, préservant l'intérêt des victimes, et les mieux à même de prévenir le risque de récidive et de favoriser la réinsertion de la personne condamnée. Tel est un des objectifs de la loi du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales, qui permet de réintroduire le principe d'individualisation des peines et instaure la peine de contrainte pénale, destinée à éviter l'incarcération des publics condamnés les plus désocialisés par un suivi intense du service pénitentiaire d'insertion et de probation en milieu ouvert. La loi du 15 août instaure également la libération sous contrainte, destinée à réduire les sorties « sèches » principales causes de récidive et à accompagner toute sortie de détention. Ces dispositions ont été adoptées à l'issue d'un processus de consultation et de compilation de l'ensemble des connaissances internationales et pratiques françaises, unique en son genre dans le monde judiciaire, que fut la conférence de consensus. Cette loi, dont la mise en oeuvre sera accompagnée par un comité de suivi réunissant tous les acteurs concernés, s'accompagne d'un effort majeur de recrutement de 1000 nouveaux emplois au sein des services pénitentiaires d'insertion et de probation, et d'une rénovation des méthodes de travail inspirée des règles européennes de probation et intégrant une démarche scientifique via une recherche action portant sur l'évaluation des publics justice.
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