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Dominique Le Mèner
Question N° 20853 au Ministère de la fonction publique


Question soumise le 12 mars 2013

M. Dominique Le Mèner attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur les pensions accordées aux pères de famille retraités de la fonction publique. Deux arrêts de la Cour de justice des communautés européennes, l'arrêt Griesmar rendu le 29 novembre 2001 et l'arrêt du 13 décembre 2001, ont rappelé que le principe d'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes doit s'appliquer aux pensions versées par le régime français de retraites des fonctionnaires. Ainsi, les pères de famille de trois enfants justifiant de 15 années de service doivent bénéficier, au même titre que les femmes, du droit à la retraite anticipée ainsi que de la bonification par enfant élevé. Or l'article 48 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, modifie l'article L. 12b du code des pensions civiles et militaires de retraites et accorde la même bonification indistinctement aux hommes et aux femmes fonctionnaires à la condition qu'ils aient interrompu leurs activités pendant une durée de deux mois pour chacun de leurs enfants. L'article 136 de la loi de finances rectificative pour 2004 (loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004) et le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005 modifient les conditions permettant le départ anticipé à la retraite des parents de trois enfants en étendant cette possibilité aux hommes mais en posant la même condition de durée d'interruption d'activité pour chaque enfant. Or le droit accordé aux hommes de prendre un congé parental n'existe que depuis 2002, ce qui exclut, pour de nombreux pères de famille, la possibilité de faire valoir ces droits. C'est pourquoi il lui demande donc si la question des conditions de départs à la retraite anticipés ainsi que celle des bonifications sur les pensions accordées aux pères de famille de la fonction publique pourront figurer au programme de la négociation sur la prochaine réforme prévue au printemps 2013.

Réponse émise le 4 octobre 2016

En ce qui concerne les bonifications de pension de retraite accordées aux agents publics parents d'un enfant, c'est suite aux arrêts Griesmar de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE, affaire C-366/99, 29 novembre 2001) et du Conseil d'Etat (arrêt CE no 141112 en date du 29 juillet 2002) que la loi no 2003-775 du 21 aout 2003 portant réforme des retraites a adapté la nature des avantages familiaux servis aux pensionnés et les a mis en conformité avec le droit communautaire en modifiant l'article L. 12 b du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR) : pour les enfants nés ou adoptés antérieurement au 1er janvier 2004, la bonification d'un an par enfant est désormais accordée aux hommes et aux femmes à condition que l'agent ait interrompu ou réduit son activité pour s'occuper de l'enfant. L'arrêt du 13 décembre 2001 (CJCE, affaire C-206/00, Henri Mouflin contre recteur de l'académie de Reims) n'est pas relatif aux bonifications pour enfants mais au droit à pension de retraite à jouissance immédiate d'un agent public en vue de soigner son épouse atteinte d'une maladie incurable. Cet arrêt a permis des avancées dans le domaine de l'égalité de droits à pension de retraite à jouissance immédiate entre les fonctionnaires masculins et féminins. En matière de bonifications pour enfants pouvant être accordées aux agents publics, le décret no 2003-1305 du 26 décembre 2003 pris pour application de la loi précitée du 21 août 2003 précise, dans son article 6, que les hommes et les femmes fonctionnaires peuvent bénéficier d'une bonification fixée à 4 trimestres par enfant à condition qu'ils aient, pour chacun d'eux, interrompu ou réduit leur activité dans les conditions fixées par l'article R. 13 du CPCMR. L'interruption d'activité a été prévue en 2003 ; la réduction d'activité a été ajoutée en 2010 (article 5 de la loi no 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, décret no 2010-1741 du 30 décembre 2010 pris pour application des articles 44 et 52 de ladite loi). La prise d'un congé parental est ouverte aux hommes comme aux femmes dans la fonction publique depuis 1984 (cf. article 54 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat). Pour autant, ce n'est pas la seule modalité d'interruption ou de réduction d'activité offerte pour pouvoir bénéficier des bonifications pour enfant : s'y ajoutent le congé pour adoption, le congé de présence parentale, la disponibilité pour élever un enfant de moins de 8 ans, ainsi que le temps partiel. Tous ces dispositifs sont ouverts aux hommes comme aux femmes. A ce stade, il convient de rappeler que la bonification pour enfant résultant de l'application de l'article L. 12 b du CPCMR a pour objectif de compenser les désavantages professionnels résultant d'une interruption ou d'une réduction d'activité. Dès lors, les hommes n'ayant pas interrompu ou réduit leur activité ne sauraient se prévaloir d'une discrimination indirecte, puisqu'ils n'étaient pas dans la même situation que les hommes ou les femmes ayant décidé de cesser temporairement ou de réduire leur activité pour s'occuper de leurs enfants. En ce qui concerne le dispositif des retraites anticipées pour parents ayant effectué 15 ans de services effectifs, il est actuellement ouvert aux parents d'un enfant atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %. Il demeure également ouvert pour les parents de 3 enfants, d'une part pour les agents qui en remplissaient les conditions au 1er janvier 2012, d'autre part pour les agents qui ont eu au moins 50 ans pour les actifs ou 55 ans pour les sédentaires au plus tard le 1er janvier 2011, c'est-à-dire qui étaient à moins de 5 années de l'âge d'ouverture des droits à retraite. Ce dispositif peut être ouvert au père comme à la mère de l'enfant, à la condition que l'agent ait eu une interruption ou une réduction d'activité d'une durée continue au moins égale à 2 mois à l'occasion de la naissance ou de l'adoption de chaque enfant concerné. Cette condition peut être remplie ici encore par la prise d'un congé parental, d'un congé pour adoption, d'un congé de présence parentale, d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de 8 ans, ou d'un temps partiel. Ainsi, les pères fonctionnaires ne sont pas exclus de l'application des dispositifs précédemment décrits, mais peuvent en bénéficier, sous réserve de satisfaire aux mêmes conditions d'interruption ou de réduction d'activité que leurs homologues féminines. L'article 22 de la loi « retraites » de 2014 a prévu que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'évolution des droits familiaux afin de mieux compenser les effets de l'arrivée d'enfants au foyer sur la carrière et les pensions des femmes. Cet article a trouvé son application dans le rapport sur les droits familiaux de retraite de M. Bertrand Fragonard, président du Haut Conseil de la famille, remis au Gouvernement en février 2015, puis transmis au Parlement le 25 mars 2015. Ce rapport constate que, tous régimes confondus, les droits à pension des mères de famille sont moindres que ceux des hommes compte tenu d'une activité professionnelle plus réduite et des inégalités salariales entre les sexes. Il observe que les droits familiaux de retraite (majorations de durée d'assurance et de pension, départ anticipé en retraite) ont un effet correcteur en ce qu'ils permettent de réduire l'écart de pension entre les femmes et les hommes, mais que, pour autant, il n'en reste pas moins qu'après application de ces mécanismes de compensation, la pension moyenne des femmes s'élève à seulement 60 % de celles des hommes (pour la génération 1946). Le rapport indique que cet écart devrait se réduire à long terme mais lentement, puisqu'à l'horizon 2040, la pension moyenne des femmes nées dans les années 1970 devrait être encore inférieure de 20 % à celle des hommes. Enfin il propose plusieurs leviers d'action : développer la promotion de l'activité et des salaires des femmes et refondre les droits familiaux de retraite, notamment sous l'angle de l'équité inter-régimes. Ces propositions seront analysées en tenant compte des avancées salariales intervenues dans l'intervalle et des effets des diverses actions menées par le Gouvernement depuis plusieurs années en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, tant dans le secteur privé que dans le secteur public.

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