Mme Fanélie Carrey-Conte attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'usage des lanceurs de balles de défense, communément appelés « flash-ball », par les forces de l'ordre, notamment lors des manifestations. L'actualité récente a une nouvelle fois rappelé la dangerosité de ce type « d'arme sublétale ». La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), dans son avis n° 2009-133 du 15 février 2010, avait recommandé « de ne pas utiliser cette arme lors de manifestations sur la voie publique, hors les cas très exceptionnels qu'il conviendrait de définir très strictement » en raison de l'imprécision des tirs et de la gravité des dommages collatéraux que son usage entraîne. Aussi, elle lui demande si l'interdiction de l'usage de cette arme lors des manifestations est envisagée.
Les policiers et les gendarmes assurent chaque jour, avec professionnalisme et courage, le respect de la loi républicaine et la protection de nos concitoyens, dans des situations fréquemment difficiles et dangereuses, parfois au péril de leur vie. Chaque année, plus de douze mille policiers et gendarmes sont blessés et plusieurs trouvent la mort dans l'accomplissement de leur devoir. Six policiers et gendarmes sont décédés en mission en 2012. Ces actes de violence, de plus en plus extrêmes, sont inadmissibles, comme le sont toutes les atteintes aux forces de l'ordre. L'Etat a le devoir de protéger les agents de la force publique. Le respect dû à ceux qui incarnent le principe d'autorité et la République est essentiel pour la cohésion de la société et pour que la loi républicaine s'impose partout. Face à la multiplication des actes de violence à l'encontre des policiers et des gendarmes et à l'aggravation des risques encourus, la protection des membres de forces de l'ordre est un souci constant du ministre de l'intérieur. Elle passe notamment par la mise à disposition des policiers et gendarmes des matériels de protection nécessaires. C'est dans ce cadre qu'ils sont équipés d'armes de force intermédiaire, pour leur sécurité et pour celle des tiers. Les lanceurs de balles de défense (lanceur de calibre 44 mm, dit « Flash-Ball Super Pro » et lanceur de calibre 40 mm) en font partie. Leur emploi obéit à des règles strictes, fait l'objet de contrôles rigoureux et doit s'exercer dans le respect des droits fondamentaux des personnes. Ainsi, l'emploi des lanceurs de balles de défense relève du cadre juridique général de l'usage de la force (légitime défense, attroupement...). Dans tous les cas, son usage est soumis aux principes de nécessité et de proportionnalité. Il est en outre subordonné à une formation spécifique et les fonctionnaires et militaires autorisés à les employer doivent disposer d'une habilitation individuelle et sont assujettis au suivi d'une formation continue. Une traçabilité et un suivi effectif de l'utilisation des lanceurs de balles de défense sont assurés. Assortie de ces garanties, l'utilisation de ces armes vise à exercer une contrainte légitime de manière strictement nécessaire et proportionnée face à des comportements violents ou dangereux, pour neutraliser une personne dangereuse pour elle-même ou pour autrui en minimisant les risques. Le ministre de l'intérieur est cependant conscient des dangers liés à l'usage de ces armes et connaît les préoccupations qu'elles peuvent susciter et les blessures qu'elles ont pu provoquer. Leur utilisation, même par des agents qualifiés et dont le sang-froid et le professionnalisme sont reconnus, présente des risques, quoique moindres que le recours aux armes à feu. Tout doit donc être mis en oeuvre, d'un point de vue juridique, hiérarchique, humain et matériel, pour que l'emploi de ces armes s'exerce dans des conditions maximales de sécurité. Les instructions adressées aux services de police et de gendarmerie pour en préciser les règles d'utilisation font donc l'objet de la plus grande attention et sont régulièrement mises à jour pour tenir compte des retours d'expérience, des préconisations des autorités médicales, des évolutions du droit.... De nouvelles instructions particulièrement détaillées et strictes relatives aux lanceurs de balles de défense ont par exemple été adressées aux services de police (novembre 2012) et aux unités de gendarmerie (juillet 2012), pour repréciser notamment leurs conditions d'emploi (précautions d'emploi, interdictions d'utilisation, conduite à tenir après emploi...) et rappeler les exigences du cadre juridique. Les obligations en matière de formation continue ont été renforcées. Enfin, une réflexion permanente est menée afin d'améliorer les conditions d'utilisation des lanceurs de balles de défense et les équipements eux-mêmes. S'agissant de l'emploi des lanceurs de balles de défense dans le cadre de manifestations de voie publique, il est aujourd'hui strictement encadré juridiquement par deux décrets du 30 juin 2011 relatifs à l'emploi de la force pour le maintien de l'ordre public et aux armes à feu susceptibles d'être utilisées au maintien de l'ordre public. Ces deux décrets ont fait l'objet d'une circulaire du 9 août 2012 du ministre de l'intérieur. Ces textes fixent un cadre juridique extrêmement strict, puisqu'il ne permet l'usage des lanceurs de balles de défense de 44 mm que dans les situations d'attroupement prévues par l'article L. 211-9 du code de la sécurité intérieure (violences ou voies de faits exercées contre la force publique ou lorsque cette dernière est dans l'impossibilité de défendre autrement le terrain qu'elle occupe) et sous certaines conditions (décision de l'autorité publique habilitée...) ; sachant toutefois que cette arme peut être employée dans le cadre de la légitime défense, hors l'ordre du commandement du dispositif en place, dans l'hypothèse exceptionnelle où il est fait usage des armes lors d'une action isolée de celle de la force publique. Outre ces exigences juridiques extrêmement strictes, il paraît utile de souligner que les forces mobiles, principalement chargées du maintien de l'ordre public, ne disposent pas de lanceurs de balles de défense. En tout état de cause, l'armement des forces de l'ordre n'est pas une réponse suffisante aux problèmes de violences. D'autres voies doivent également être étudiées et plusieurs actions ont été entreprises pour améliorer la sécurité des forces de l'ordre. A l'initiative du ministre de l'intérieur, la protection juridique et fonctionnelle des militaires de la gendarmerie et des fonctionnaires de police a été renforcée à la suite d'un rapport remis en juillet 2012 par une mission de réflexion présidée par un conseiller d'Etat. Par ailleurs, les efforts se poursuivent pour doter les forces de l'ordre des moyens matériels adaptés, notamment technologiques (géolocalisation des véhicules ou caméras embarquées pour permettre l'envoi de renforts...). De nouvelles orientations fortes ont été fixées en matière de formation initiale et continue avec notamment pour objectif de sécuriser davantage les interventions sur la voie publique. Plus globalement, il s'agit, pour répondre aux attentes des forces de l'ordre comme à celles de nos concitoyens, d'être plus efficace dans la prévention de la délinquance et dans la lutte contre les violences, pour éviter chaque fois que possible les situations justifiant le recours aux armes de force intermédiaire. De ce point de vue, la décision de renforcer les effectifs de police et de gendarmerie et leur présence sur le terrain doit y contribuer, en garantissant une présence humaine, visible et renforcée, plus dissuasive et plus opérationnelle sur la voie publique. Les actions engagées pour améliorer le lien de confiance entre la police et la population doivent aussi concourir à mieux protéger gendarmes et policiers dans leur travail, en réduisant les incompréhensions et la méfiance lors des interventions sur la voie publique.
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