M. Philippe Kemel appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la généralisation des pratiques de prescriptions inappropriées, par détournement des finalités thérapeutiques, tel Médiator cas d'école, confirmé par Diane 35, puis sur la problématique récurrente de la surconsommation médicamenteuse, notamment celle relevant des prescriptions faites aux personnes de plus de 70 ans. Ces deux phénomènes générant des effets délétères graves, sanitaires autant que pécuniaires, font courir un vrai risque de santé publique. Mettre à disposition les outils informatiques nécessaires à l'analyse statistique permettrait de déceler les prescriptions et pratiques médicales non conformes aux stipulations des autorisations de mise sur le marché des spécialités pharmaceutiques. De tels outils, non intrusifs dans la liberté de prescription, ont été développés. Exploitant directement les flux de données "anonymisées" en provenance des officines pharmaceutiques, ils permettraient l'identification très en amont d'éventuels détournements de prescriptions, sans porter atteinte à la confidentialité des données. Leur déploiement et leur généralisation, au profit des autorités sanitaires et plus généralement des pouvoirs publics et des instituts de recherche, se heurtent toutefois à l'opposition de deux organismes placés sous son autorité, la CNAM-TS et le GIE Sesam-Vitale, organisme normalisateur des flux de données de délivrances. Le GIE, en particulier, refuse de mettre à disposition des concepteurs de ces outils statistiques, le dispositif frontal contenant, de manière sécurisée, les clefs de déchiffrement indispensables à l'analyse des flux de données chiffrées. Il bloque ainsi l'analyse de ces données pourtant publiques et communicables. Cette opposition est d'autant plus incompréhensible au regard des enjeux de santé publique que la CNIL, par une décision n° 2011-246, a autorisé ce type de traitement informatique et a reconnu la pertinence et l'efficacité des mesures de précaution prises pour assurer l'anonymisation des données de santé et la sécurisation des clés de déchiffrement. C'est pourquoi il lui demande quelles mesures elle entend prendre et dans quels délais afin que le GIE Sesam-Vitale et la CNAM-TS se conforment à l'autorisation délivrée par la CNIL, permettant aux titulaires de ces autorisations l'accès aux clefs de déchiffrement et aux données publiques de santé, afin d'assurer un suivi des prescriptions de médicaments en temps réel, car l'actualité sanitaire accentue l'urgence et le caractère incontournable de la mise en place de cet outil de pharmacovigilance et de suivi épidémiologique.
Les autorités compétentes, qu'il s'agisse notamment de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) comme de l'assurance maladie, disposent et utilisent d'ores et déjà des outils informatiques pouvant permettre de déceler dans les données de santé disponibles les prescriptions et pratiques médicales s'écartant des finalités prévues par les autorisations de mise sur le marché des spécialités pharmaceutiques considérées. Les collaborations entre ces organismes se sont développées à cette fin et ont vocation à se développer. Par ailleurs, les accès et l'utilisation des données du système national d'information inter-régimes de l'assurance maladie (SNIIRAM), système qui contient les données issues de la prise en charge des soins par l'assurance maladie se développent fortement pour permettre aux principaux opérateurs intervenant dans le pilotage du système de santé de disposer de davantage d'informations afin de faciliter l'exercice de leurs missions. C'est ainsi que, sous le contrôle de la CNIL qui veille au respect de la protection des données personnelles, plusieurs décisions sont en cours en vue de développer l'accès à plus d'exhaustivité des données stockées dans le SNIIRAM. Sont notamment concernés la haute autorité de santé (HAS), l'ANSM et l'institut national de veille sanitaire (INVS), la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) et les agences régionales de santé (ARS). Ces évolutions concourront notamment à mieux répondre aux enjeux concernant les produits de santé. La CNIL a autorisé un nouveau traitement informatique de données. Ce traitement porterait directement sur le flux des feuilles de soins émises par des pharmaciens d'officine. Cependant, pour être mis en oeuvre ce traitement suppose l'utilisation des clefs de déchiffrement des feuilles de soins électroniques utilisées par l'assurance maladie obligatoire pour traiter la prise en charge des produits prescrits et délivrés aux assurés, lesquelles feuilles de soins comportent des informations médicales personnelles. Ces clés, que ces seuls organismes assurant la prise en charge utilisent aujourd'hui dans leurs systèmes d'information, constituent une garantie indispensable à la protection des données médicales personnelles. Leur mise à disposition à des organismes ne concourant pas à la délivrance ou à la prise en charge des soins ne peut s'envisager sans disposer de l'assurance absolue que la sécurité des données destinées à l'assurance maladie obligatoire sera garantie, y compris en cas d'extension des traitements automatisés mis en place par des tiers à des fins différentes. Aussi, la CNIL a reconnu, s'agissant d'un projet conduisant à une utilisation des feuilles de soin électroniques par les organismes d'assurance maladie complémentaire, l'intérêt évident de la mise en place d'une clef de chiffrement spécifique pour ces derniers, permettant de garantir la confidentialité des données sensibles utilisées par le système d'information de l'assurance maladie obligatoire. Des travaux ont été lancés à cette fin. Il convient de préciser, en outre, que l'autorisation délivrée par la CNIL n'implique pas que le GIE Sesam-Vitale soit tenu de fournir l'accès au dispositif frontal contenant les clefs précitées à tout demandeur intéressé, le système mis en place ayant pour vocation de répondre, de façon sécurisée, aux finalités touchant à la prise en charge des soins. Enfin et surtout d'autres solutions techniques, déjà utilisées avec succès, peuvent être adoptées pour mettre en oeuvre de nouveaux outils de pharmacovigilance et de suivi épidémiologique en recueillant des données anonymisées directement auprès des pharmaciens et sans recourir aux clefs de déchiffrement de l'assurance maladie obligatoire. Il n'y a donc pas d'obstacle à la mise en oeuvre de tels outils. En tout état de cause, l'Etat examinera avec attention toute nouvelle proposition technique et privilégiera la solution offrant le plus de garanties. Il est par ailleurs rappelé que la ministre des affaires sociales et de la santé a confié une mission aux professeurs Costagliola et Bégaud visant à identifier les moyens d'un suivi en continu des comportements collectifs de prescription. Les conclusions de cette mission sont attendues pour l'été.
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