M. Bertrand Pancher attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'illettrisme. Encore, aujourd'hui, près de 40 % des élèves sortent du primaire sans savoir ni lire, ni écrire correctement et la France recule dans tous les classements internationaux en lecture PISA, PIRLS. Ainsi, l'inquiétude des parents ne cesse de croître. Par ailleurs, selon le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), près de 1,8 millions de salariés, soit 8 % des salariés, seraient atteints d'illettrisme, pourcentage qui augmente avec l'âge. Près de 15 % des chômeurs se trouveraient également dans cette situation. Enfin, environ 5 % des jeunes ne sauraient ni lire, ni écrire, avec de grandes disparités entre les territoires, les plus défavorisés voyant le taux atteindre le seuil de 10 %. Certaines associations préconisent le recours aux méthodes syllabiques dès le CP et la mise en place d'une évaluation nationale centrée sur la lecture dans le but de faire reculer l'illettrisme à l'école comme par exemple en Angleterre. Ainsi, il lui demande quelle est la position du Gouvernement et quelles sont les intentions de M. le ministre à ce sujet.
Maîtriser les compétences en lecture et en écriture est un facteur prédictif de réussite scolaire pour les enfants. Pour les adultes, c'est un déterminant de la qualité de vie professionnelle, sociale et familiale. Les statistiques réalisées par la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), publiées le 22 octobre 2012 font état d'une proportion de 88,4 % des élèves qui maîtrisent les compétences de base en français en CM2. Ils ne sont plus que 72 % et 80 %, respectivement en RRS et Eclair (programme écoles, collèges, lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite) en secteur d'éducation prioritaire. Ainsi, le chiffre de 40 % d'élèves ne sachant ni lire, ni écrire, ni compter à la sortie du primaire ne reflète pas la réalité. Les évaluations CEDRE et PISA de 2009 convergent pour montrer un affaissement des compétences liées à la compréhension des écrits : la proportion des élèves peu performants passe de 15,2 % en 2000 à 19,7 % en 2009. Ces résultats sont affinés par les évaluations PIRLS qui précisent que les difficultés concernent la lecture de textes informatifs, l'interprétation des textes après leur lecture et la production d'écrits. Dans ce contexte, la question de la méthode globale, qui consiste à reconnaître un mot (voire une phrase) en entier, sans le décomposer, en tant qu'image visuelle indivisible, est régulièrement soulevée. Le recours à cette méthode constituerait un facteur déterminant des difficultés de lecture et du décrochage précoce. Il s'agit en réalité d'un débat idéologique, qui n'a aucune pertinence dans le système éducatif actuel, et cela pour deux raisons. D'une part, la méthode globale en tant que telle n'a quasiment jamais été utilisée en France. Ce sont plutôt des méthodes dites « mixtes » qui, à une certaine époque, dans les années 1960-1970, ont pu être en vigueur. D'autre part, aujourd'hui, la méthode globale n'est pas pratiquée dans les écoles françaises, qui appliquent les programmes, dans le respect de la liberté pédagogique des enseignants. Il existe un consensus au sein de la communauté des chercheurs sur l'enseignement de la langue écrite : il s'agit d'acquérir le déchiffrage, de développer complémentairement la connaissance de la structure de la langue et la compréhension, et de mettre en oeuvre de premières productions d'écrits. Au-delà, en matière de lutte contre l'illettrisme, si le taux de ce fléau a baissé en France de 9 % à 7 % entre 2004 et 2012, ce progrès ne saurait suffire et l'on ne peut s'en satisfaire. Pour aller plus loin dans l'action conduite, le Premier ministre a choisi de faire de la lutte contre l'illettrisme la grande cause nationale de l'année 2013. Le Gouvernement entend ainsi prendre la mesure d'un sujet qui suppose un engagement fort et une action concertée des ministères concernés. Dans ce cadre, le ministère de l'éducation nationale est particulièrement attentif à la maîtrise de la langue au sein des apprentissages ; cette dernière est une priorité absolue de l'Ecole et plusieurs mesures introduites par la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmantion pour la refondation de l'école de la République visent à favoriser son acquisition. Ainsi, le socle commun de connaissances, de compétences et de culture en cours de rénovation place la connaissance de la langue française, langue de scolarisation, comme compétence majeure de l'apprentissage. A l'école primaire, les dispositifs d'aide en classe et hors la classe dont bénéficient en priorité les élèves les plus fragiles, sont autant d'outils pertinents pour remédier aux difficultés et développer la maîtrise de la langue. De la même manière, des expérimentations sont en cours pour conforter l'efficacité des pratiques d'enseignement. Le dispositif « plus de maîtres que de classes » va également participer à la réussite des élèves en difficulté. Pour favoriser la réussite de chacun, l'école s'adresse désormais aussi aux parents, notamment par le biais de la « mallette des parents » pour les familles des élèves de CP, mais également avec le développement significatif des actions éducatives familiales en liaison avec l'ANLCI. Au collège, l'accompagnement personnalisé est renforcé en classe de 6e pour proposer des réponses adaptées aux besoins des élèves dans les apprentissages fondamentaux et lutter ainsi efficacement contre le décrochage, synonyme d'échec humain, de gâchis économique et de risque social. La formation des enseignants, qui est refondée et mise en place dans le cadre des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, doit tenir également compte d'une meilleure connaissance du diagnostic des difficultés et des aides les plus appropriées pour améliorer la réussite des élèves. En outre, de nouveaux outils numériques en cours de développement apporteront des solutions alternatives dans le cadre des espaces numériques de travail. Agir contre l'illettrisme impose enfin de rassembler les divers acteurs éducatifs, publics, professionnels et sociaux, pour présenter une réponse efficace et équilibrée aux adultes en situation de précarité linguistique, tant en millieu rural qu'en territoire urbain ou suburbain. Une convention nationale de partenariat est en cours d'élaboration.
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