M. Hervé Gaymard appelle l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le marché du bien culturel d'occasion. Alors que le développement du marché du livre numérique mobilise l'ensemble des acteurs, soucieux à juste titre d'une répartition équitable des profits, se développe depuis plusieurs années un nouveau marché de l'occasion qui enrichit tous les acteurs à l'exception notable des auteurs et des éditeurs, pourtant les premiers concernés. Hier marginal et cantonné aux vide-greniers et aux bouquinistes, le marché de l'occasion représente aujourd'hui plus de 42 % des ventes de livres, et ses acteurs, Amazon, Priceminister, la FNAC ou Ebay touchent des commissions sur chaque vente et sont soumis pour partie à la TVA. Au contraire, ceux qui ont créé et édité les livres vendus ne perçoivent aucun bénéfice de cette exploitation et voient même leur chiffre d'affaires amputé de recettes non négligeables. À l'heure actuelle, pour les achats de livre sur les sites de la FNAC ou d'Amazon par exemple, l'occasion est systématiquement proposée à côté du produit neuf. Dans le secteur des jeux vidéo, plus de la moitié des jeux sont achetés d'occasion. Or selon qu'un ouvrage est vendu ou revendu, les acteurs de la transaction diffèrent fortement. Ainsi, dans le cas de la vente d'occasion, seuls le libraire, le site, le vendeur et l'État, dans une moindre mesure, touchent un pourcentage. Face au développement de cette vente d'occasion, les créateurs, les auteurs et les éditeurs sont donc fortement pénalisés. Les premiers sont en effet privés d'une part non négligeable de leurs droits d'auteur et les seconds voient baisser significativement leurs ventes moyennes, rendant leurs coûts de création de plus en plus difficiles à amortir. Si cette pratique n'est pas réglementée en faveur des propriétaires des œuvres, c'est tout le secteur de l'édition qui, à l'instar de l'industrie du disque face au téléchargement illégal, est menacée. Face à cette situation, l'instauration d'une contribution sur les ventes et les achats d'occasion, à l'image de ce qui se fait déjà pour les prêts en bibliothèque ou pour les œuvres photocopiées, pourrait constituer une solution simple et équitable permettant de sauver la création. Cette contribution, imputable également aux ventes d'occasion de jeu vidéo, permettrait de donner aux éditeurs les moyens de pérenniser l'emploi en France et, ainsi renforcés, de participer à la compétition internationale et au rayonnement de la culture française à l'étranger. Il souhaiterait donc que lui soient précisées les mesures envisagées sur ce sujet par le Gouvernement.
L'essor des technologies numériques a permis le développement de nouvelles pratiques d'accès aux oeuvres culturelles, que ce soit de manière dématérialisée ou sous la forme d'exemplaires physiques. S'agissant du marché du livre, l'achat et la revente d'occasion sont ainsi devenues des activités beaucoup plus aisées qu'auparavant. Le ministère de la culture et de la communication a récemment entrepris une double démarche pour apprécier la réalité de cette évolution. En ce qui concerne le développement de l'occasion de livres imprimés, les premiers contacts pris avec les acteurs du livre - au premier chef desquels les auteurs et les éditeurs - font certes apparaître leur préoccupation mais également la nécessité d'une mesure de l'ampleur de ce phénomène et de ses évolutions récentes qui n'a aujourd'hui pas été menée. Il convient également sans doute de préciser les notions de livre neuf et livre d'occasion dans la mesure où certaines propositions commerciales tendent aujourd'hui à les confondre. De ce point de vue, la création d'un médiateur du livre, votée à l'occasion des débats autour du projet de loi relatif à la consommation, pourra permettre d'éclairer cette question. Le ministère de la culture et de la communication s'attache parallèlement à évaluer l'impact d'un éventuel marché d'occasion des livres numériques. Au regard de la propriété littéraire et artistique, la question qui se pose est de savoir dans quelles conditions l'acquéreur d'une oeuvre littéraire, musicale ou audiovisuelle sous une forme numérique, peut ou non être autorisé à revendre le fichier en question sur une plateforme de téléchargement, comme cela est possible dans l'univers physique, pour un ouvrage papier, un CD ou un DVD. Ce débat juridique sur la licéité du marché secondaire des biens culturels numériques est indissociable d'un débat sur les moyens de garantir, dans une économie entièrement dématérialisée, une juste rémunération des créateurs et un niveau adéquat de financement de la création, indispensable à son renouvellement. La valeur d'un bien culturel numérique ne se détériorant par définition pas à l'usage, le développement d'un marché secondaire pourrait avoir un impact très sérieux sur le marché primaire en termes de prix comme de volume. Le président du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a donc lancé, le 15 juin 2013, une mission sur la licéité du marché secondaire des biens culturels numériques. Ces travaux, dont le résultat devrait être rendu public à l'été 2014, permettront également d'éclairer la question du développement du marché de l'occasion du livre papier.
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