M. Serge Letchimy attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'iniquité que constituent les horaires auxquels les candidats antillais et guyanais au concours d'entrée à l'École nationale de la magistrature sont soumis. Le ministre du gouvernement précédent avait relevé que « cette situation est la conséquence du décalage horaire et de la nécessité impérieuse, constamment rappelée par le Conseil d'État dans sa jurisprudence, de procéder à l'ouverture des sujets au même moment dans l'ensemble des centres d'examen prévus dans l'arrêté d'ouverture du recrutement considéré ». Il ajoutait à juste titre que « la régularité du concours dépend du respect de cette exigence ». Il considère cependant que, dans une République qui prône l'égalité des chances, l'on ne saurait se contenter de ces rappels, sans chercher à rendre les conditions de participation des candidats résidant outre-mer compatibles avec un autre principe fondamental qui est celui de l'égalité des candidats. Ce principe qui doit s'appliquer sur l'ensemble du territoire de la République commande, selon lui, que l'État procède à une réflexion approfondie qui doit intégrer l'ensemble des solutions envisageables sans exclusive aucune. Cette réflexion ne saurait, par principe, se limiter au respect de l'horaire de référence, en l'occurrence celui des centres hexagonaux ; elle doit concilier égalité et équité. Au regard de ces exigences, il suggère que sa réflexion intègre les hypothèses suivantes : on pourrait imaginer de faire procéder à un changement d'horaires des épreuves dans les centres métropolitains, afin que les candidats résidant outre-mer ne soient pas tenus de concourir de nuit ; pour éviter les conséquences des décalages horaires inhérents à la dispersion géographique des territoires français, une autre solution consisterait à organiser la prise en charge financière des déplacements des candidats de l'outre-mer concernés afin qu'ils puissent passer les concours dans un centre de l'hexagone. Cette solution permettrait qu'ils participent aux épreuves dans de bonnes conditions, en tout cas dans des conditions plus satisfaisantes que celles qu'ils subissent aujourd'hui. Sur ce point l'équité commande donc que l'on ne se contente pas d'affirmer que ces candidats ont la possibilité de se rendre dans les centres de l'hexagone sans considérer et prendre en compte les contraintes financières, dans certains cas insurmontables, qu'ils connaissent. Le choix contraire conduit alors à cautionner une rupture d'égalité ; il observe enfin, sous réserve de la proposition précédente, que, dans tous les autres cas, les effets de la dispersion géographique des territoires français induisent comme conséquence que, quels que soient les aménagements horaires des épreuves, l'un ou l'autre des centres d'examen devra soumettre ses candidats à des horaires de nuit. Aussi, il suggère que, par équité et respect de l'égale dignité des candidats, quelle que soit leur appartenance géographique, les horaires soient fixés chaque année selon un roulement impliquant que chaque territoire - territoire hexagonal compris - soit contraint, à tour de rôle, de se soumettre à des horaires de nuit. Ce serait là aussi une forme d'équité par répartition alternée du travail de nuit. Il lui saurait gré de lui faire connaître la suite qu'il envisage de donner à ces propositions.
La chancellerie veille tout particulièrement à garantir l'égalité des chances entre les candidats, qu'ils soient domiciliés en territoire hexagonal ou en outre-mer, pour tous les concours qu'elle organise et notamment les concours d'accès à l'École nationale de la magistrature. La question présentement posée amène à deux séries d'observations, portant d'une part sur le principe et d'autre part sur les modalités de fonctionnement des centres d'épreuves outre-mer pour les concours d'accès à l'École nationale de la magistrature. Sur le principe tout d'abord de l'ouverture de centres d'épreuves outre-mer, conformément aux précédentes dispositions applicables, jusqu'à la session 2011 incluse, il existait un centre d'épreuves par cour d'appel ainsi que dans certains tribunaux de grande instance (en pratique Nantes, Nanterre et Cayenne), outre la possibilité de créer des centres supplémentaires. En lien avec l'École nationale de la magistrature et en particulier en accord avec son conseil d'administration, une étude a été entreprise visant à un regroupement des 40 centres d'épreuves alors existant, en une quinzaine de pôles au plan national, afin d'améliorer la gestion des opérations de concours, dans le respect de l'intérêt des candidats et des différents interlocuteurs concernés. Il a donc été retenu un assouplissement du dispositif prévu dans l'arrêté organisationnel pour les centres d'épreuves d'admissibilité comme cela a été fait pour les concours complémentaires : - suppression de la disposition qui prévoit un centre par cour, - maintien du principe selon lequel les épreuves d'admissibilité se déroulent en principe au siège des juridictions énumérées (soit par exemple Paris intra-muros), mais qu'en cas de nécessité, elles peuvent toutefois avoir lieu dans une autre ville du ressort considéré - renvoi à l'arrêté d'ouverture de l'énumération à faire pour chaque session, - libre choix par chaque candidat, de son centre d'épreuves lors de l'inscription, - maintien de la possibilité de création de centres supplémentaires après ouverture de la session. Sur la teneur de la liste des centres d'épreuves de la session 2012, une particulière attention a été portée aux centres d'épreuves outre-mer. Contrairement à la solution adoptée pour d'autres recrutements et en dépit du très faible nombre de candidats généralement observé outre-mer (23 sur 1 880 pour la session 2009, 14 sur 1 680 pour la session 2010, 15 sur 1 677 pour la session 2011 ou encore 32 sur 2 314 pour la session 2012), l'École nationale de la magistrature et la direction des services judiciaires du ministère de la justice ont souhaité maintenir les centres d'épreuves outre-mer, notamment pour les candidats dont la situation financière, professionnelle ou familiale, rendrait difficile un déplacement et un séjour de plusieurs jours dans l'hexagone pour passer les épreuves du concours (après avoir de surcroît assumé le décalage horaire avec l'outre-mer). C'est ainsi qu'à la différence d'autres concours de la fonction publique mettant en oeuvre un nombre bien moindre de centres d'épreuves en particulier outre-mer, pour les présents concours, sur les 18 centres d'épreuves d'admissibilité ouverts pour cette session au plan national, 8 soit près de la moitié, sont situés outre-mer (Basse-Terre, Cayenne, Fort-de-France, Mamoudzou, Saint Denis de la Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon, Nouméa et Papeete), l'insularité ayant également été prise en compte s'agissant du maintien d'un centre d'épreuves à Bastia. Par ailleurs, le dispositif repris pour la session 2012 d'une part, prévoit que chaque candidat fait librement le choix de son centre d'épreuves lors de son inscription (pouvant ainsi opter par exemple, pour un centre d'épreuves situé dans l'hexagone) et d'autre part, maintient la possibilité de création de centres supplémentaires après ouverture de la session. S'agissant en second lieu des modalités de fonctionnement des centres d'épreuves outre-mer, il convient de présenter les principales étapes d'évolution du dispositif. Antérieurement à la réforme des concours, les quatre épreuves - de cinq heures chacune - se déroulaient sur quatre jours, les candidats ultramarins étant amenés à composer, le cas échéant de façon nocturne, compte-tenu du décalage horaire et de la nécessité impérieuse pour le ministère de la justice s'agissant de ces concours, de procéder à l'ouverture des sujets au même moment dans l'ensemble des centres d'examen prévus dans l'arrêté d'ouverture du recrutement considéré. Depuis la réforme des concours, les candidats subissent trois épreuves de cinq heures chacune et trois épreuves de deux heures chacune, soit au total six épreuves. Ces nouvelles modalités ont été mises en oeuvre pour la première fois lors de la session 2009 avec maintien du dispositif de composition, le cas échéant de façon nocturne s'agissant de l'outre-mer et maintien du calendrier des épreuves sur quatre jours. Lors de cette session, le député-maire de Fort-de-France a appelé l'attention de la chancellerie sur la situation dans laquelle se trouvaient les candidats des concours d'accès à l'ENM, contraints de composer à des horaires inhabituels au centre de Fort-de-France et, dans le prolongement de la réponse apportée à ce parlementaire le 28 septembre 2009, des courriers ont été adressés les 12 et 16 février 2010 à chacun des quarante-quatre députés, sénateurs et préfets d'outre-mer. Dans cette correspondance accompagnant l'ouverture de la session 2010, le ministère de la justice a souligné notamment les éléments suivants : - qu'en dépit du très faible nombre de candidats concernés (23 sur 1 880 pour la session 2009), les centres ultramarins avaient été conservés, justement à raison de ce qu'ils constituaient, pour les services du ministère, tout comme les classes préparatoires, un facteur incontestable d'égalité des chances, - que les candidats disposaient par ailleurs, comme pour les précédentes sessions, de la possibilité offerte par les textes, de demander à concourir dans un centre d'épreuves situé dans l'hexagone, les frais de transport demeurant cependant à leur charge, conformément à la réglementation relative aux fonds publics ; - étant observé que sur les vingt-trois candidats d'outre-mer concernés, tous rendus destinataires d'une lettre leur renouvelant cette offre, une seule candidate avait émis le souhait d'utiliser cette possibilité. Toutes les mesures utiles avaient immédiatement été prises en ce sens. Les vingt-deux autres candidats avaient composé outre-mer, après avoir maintenu leur choix initial ; - par ailleurs, lors de l'ouverture de la session 2010, il a été fait état du déroulement à venir des épreuves sur cinq jours et non plus quatre. Cette solution a été mise en oeuvre pour les épreuves de 2010, 2011 et de juin 2012 et le déroulement sur cinq jours-et non plus quatre-, des six épreuves d'admissibilité (trois épreuves de cinq heures chacune et trois épreuves de deux heures chacune) avec, pour chacune d'entre-elles simultanéité dans chacun des centres d'épreuves, est, semble-t-il, de nature à régler la difficulté liée aux horaires des épreuves dans la majeure partie des centres d'outre-mer. En effet, après étude spécifique respectant les écarts incompressibles entre les épreuves, notamment liés à la nécessité de tenir compte des tiers temps supplémentaires pouvant être accordés par le président du jury aux candidats souffrant d'un handicap, une grille horaire a été adoptée pour répartir le mieux possible les épreuves à l'intérieur de ce volume de 5 jours. Les épreuves se sont déroulées, dans le respect de la simultanéité, chaque jour à partir de 7 heures (pour les Antilles) et se sont terminées chaque jour au plus tard à 20 heures 30 (pour Saint-Denis de la Réunion), soit dans le respect des recommandations de la circulaire du 23 juillet 2010 du ministère chargé de la fonction publique préconisant que le dispositif n'aboutisse pas à amener les candidats à composer avant 7 heures du matin ou à poursuivre une épreuve au-delà de 21 heures. Une exception a subsisté toutefois pour les candidats d'une part de Papeete (un candidat concerné en 2011 et trois en 2012) et d'autre part de Nouméa (aucun candidat concerné en 2011 et un en 2012) amenés à composer de façon nocturne, ces centres d'épreuves connaissant le plus fort décalage horaire avec l'hexagone. Pour améliorer cette situation, parmi les axes de réflexion envisagés lors d'une récente étude préalable à l'ouverture de la session 2012, la modalité qui aurait consisté à faire composer les candidats sur un sujet différent a également été écartée. En effet, cette solution, qui n'aurait concrètement trouvé sa justification qu'à l'égard des candidats de Nouméa et de Papeete, soulevait la délicate question de l'anonymat des copies devant être garanti aux candidats, surtout si on considère le très faible nombre de candidats qui aurait été concerné par une telle mesure, et, par là même très aisément identifiables. De même, dans la mesure où, conformément aux recommandations du ministère chargé de la fonction publique, la quasi-totalité des candidats (qu'ils soient de l'hexagone ou d'outre-mer) ne compose pas avant 7 heures du matin ni ne poursuit une épreuve au-delà de 21 heures, il ne semble pas y avoir lieu de mettre en oeuvre un dispositif de roulement quant aux horaires. Par ailleurs, l'étude technique effectuée par les services de la chancellerie a mis en lumière le fait qu'au regard de la nature et de la durée des épreuves, la solution dite de « confinement » ou « mise en loge » pratiquée dans d'autres concours de la fonction publique et envisagée à l'égard des candidats de Nouméa et Papeete, dans le souci louable de placer les candidats de Nouméa et Papeete dans des conditions plus équitables que celles liées à la composition de nuit, n'était pas transposable aux concours d'accès à l'École nationale de la magistrature car elle n'était pas de nature à présenter une sécurité suffisante dans le déroulement des opérations. Dans l'immédiat, pour ces candidats des centres de Papeete et Nouméa, la gêne occasionnée par la composition de nuit pourrait être atténuée par des modalités d'accueil adaptées notamment aux conditions de transports publics existant sur ces territoires, outre la possibilité maintenue pour ces candidats de demander à concourir dans un autre centre d'épreuves. Enfin, il peut être souligné que la réflexion a également été menée s'agissant des épreuves orales d'admission et par exemple, la solution de la visio-conférence n'est pas non plus apparue praticable eu égard notamment à la nature des épreuves (en particulier, l'épreuve collective de mise en situation qui nécessite une présence effective sur place). Dans le prolongement de l'étude effectuée et des mesures concrètes d'ores et déjà mises en oeuvre, les services de la chancellerie demeureront attentifs à rechercher, en lien avec l'École nationale de la magistrature, les évolutions qui pourraient être envisagées pour améliorer encore davantage le dispositif concernant les candidats ultramarins, dans le respect de l'égalité de traitement entre candidats qui doit présider à l'organisation de tout concours.
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