M. Gérard Cherpion attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le récent rapport de l'OCDE ayant pour thème « Améliorer la situation économique des jeunes en France ». Dans ce rapport, l'OCDE préconise d'amplifier l'autonomie des universités. Selon elle, bien que la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) de 2007 ait posé les premiers jalons, il faut amplifier ce mouvement car la gestion du budget total des universités reste contrainte et centralisée. En effet, le système universitaire français reste, malgré la loi LRU, parmi les plus contraints en Europe. Le projet de loi « enseignement supérieur et recherche », discuté en ce moment, ne remet pas en cause explicitement l'autonomie des universités. Toutefois, certaines de ses dispositions permettra un futur blocage de l'administration et ainsi briser la dynamique engagée. Il lui demande ainsi si le Gouvernement s'engage à amplifier l'autonomie des universités comme le préconise l'OCDE.
La notion d'autonomie recouvre différentes significations, depuis les principes édictés dans la loi de 1968 jusqu'à la loi du 22 juillet 2013. Le ministère soutient l'autonomie croissante des universités dans la détermination de leurs politiques et dans la conduite de leur gestion. Par ailleurs, un équilibre doit être trouvé entre plusieurs valeurs chères à la communauté universitaire. Ainsi, le ministère doit définir, avec la communauté, une stratégie nationale de l'enseignement supérieur. Celle-ci doit conforter l'autonomie des établissements, soutenir l'excellence de la recherche et de la formation, mais également favoriser l'équité territoriale et disciplinaire sur l'ensemble du territoire. S'agissant du « budget global », le ministère a favorisé l'autonomie budgétaire des établissements. En effet, les crédits ne sont plus fléchés mais bien globalisés au sein de trois enveloppes (dont les distinctions sont définies par la loi organique relative aux lois de finances et la loi relative aux libertés et responsabilités des universités). Ces trois catégories d'enveloppes (c'est-à-dire masse salariale, fonctionnement et investissement) laissent une très large marge de manoeuvre aux établissements et ce d'autant plus que les crédits de masse salariale peuvent être utilisés pour le fonctionnement. Même les crédits dédiés à des actions spécifiques du type « plan réussite en licence » ont été globalisés et les universités sont libres de leur utilisation, le ministère s'attachant à une évaluation ex post des actions engagées, notamment au moment de la contractualisation. Seuls certains principes viennent limiter la libre utilisation des crédits, par exemple l'obligation d'établir des budgets propres intégrés pour certaines composantes du type des instituts universitaires de technologie. De même, le budget des universités doit être en équilibre réel. Ces règles obéissent à des principes généraux soutenus par le ministère, respectivement préserver les moyens de certains types de formation qui jouent un rôle majeur dans l'enseignement supérieur et s'assurer que les établissements conduisent des politiques globalement soutenables à long terme. Le ministère s'est attaché, non pas à brider les politiques universitaires, mais à accompagner leur développement et construire avec eux les conditions d'un développement soutenable. La loi du 22 juillet 2013 a préservé ces acquis et la gestion des crédits au niveau du ministère respecte et favorise l'autonomie budgétaire (allocation globale et sans rapport avec les taux d'exécution réels, ce qui permet aux universités de mener des politiques de long terme). Les modes mêmes d'allocation ont favorisé cette globalisation et cette autonomie. Ainsi, que ce soit via le bonus financier accordé au moment de la contractualisation ou via le modèle d'allocation des moyens, le ministère s'attache à évaluer une activité et des performances, à partir de critères, et d'un bilan puis alloue globalement (enseignement et recherche) une somme aux établissements, sans fléchage. Aussi, au final, les contraintes sur le budget des établissements ayant acquis les responsabilités et compétences élargies sont aujourd'hui très faibles. Alors que les universités sont financées à plus de 83 % par des fonds publics, l'utilisation de leur dotation est entièrement décidée par le conseil d'administration. S'agissant donc de la dimension budgétaire, les universités sont aujourd'hui très largement autonomes. Il reste que, par ailleurs - mais il s'agit d'un sujet différent sur le fond, l'enseignement supérieur souffre d'une insuffisance de financement en provenance du secteur privé. La loi du 22 juillet 2013 ne doit conduire à aucun blocage. Au contraire, elle rééquilibre certains aspects liés à la gouvernance et est attentive à la collégialité et à la cohérence des politiques des établissements et entre les établissements. En outre, au-delà des possibilités actuelles concernant la formation continue où les universités disposent de marges de manoeuvre notamment dans la fixation des droits, la loi du 22 juillet 2013 apporte une réforme majeure en matière d'autonomie pédagogique et achève un mouvement historique. En effet, la stratégie de formation déployée par chaque établissement va s'exprimer dans un contexte d'autonomie réaffirmée et même amplifiée à travers le processus d'accréditation. Alors que les universités avaient déjà une large autonomie en matière de recherche, l'autonomie pédagogique franchit une étape majeure avec le passage de l'habilitation à l'accréditation, Les échanges porteront sur la fonction formation vue sous ses aspects pédagogique, organisationnel et financier. Il ne s'agira plus d'habiliter chaque formation mais d'évaluer la capacité des établissements à assurer des formations de qualité, par grands domaines. Cette politique sera jugée à l'aune de la stratégie collective mise en oeuvre dans le cadre des regroupements d'établissements, le but étant d'offrir à chaque étudiant un choix de formations de qualité (assurée par le respect du cadre national des formations) adossées à une recherche de pointe et inscrites dans leur environnement socio-économique pour une insertion professionnelle performante. Enfin, véritable passeport professionnel de l'étudiant, chaque formation sera accompagnée d'une annexe descriptive au diplôme déclinant les connaissances, les compétences et les métiers visés pour chaque parcours de formation suivi. Cet outil permettra à l'étudiant de valoriser son parcours auprès des employeurs potentiels. Le ministère s'est donc attaché à respecter un ensemble de valeurs chères à la communauté universitaire et qui participent du service public de l'enseignement supérieur, tout en préservant, voire en développant, l'autonomie des établissements. Ce développement va de pair avec un Etat qui s'applique surtout à définir les stratégies nationales, aussi bien de l'enseignement supérieur que de la recherche, prévues par la loi du 22 juillet 2013.
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