M. Patrick Balkany interroge M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur l'accord de libre-échange entre les États-unis et l'Union européenne actuellement en préparation. La presse a principalement parlé de cet accord de libre-échange en mettant en avant les exclusions que la France et ses partenaires européens ont souhaité intégrer dans cet accord. Le cas des services culturels et de l'audiovisuel, que les Européens veulent exclure de cet accord, a notamment été largement évoqué. La proposition de résolution européenne sur le mandat de négociation concernant cet accord demande également que soit exclu le secteur de la défense et de la sécurité et que les dispositions du droit communautaire relatives à l'utilisation des hormones de croissance, au clonage, aux OGM ou encore la décontamination chimique des viandes, ne soient pas remises en cause. Il lui demande donc si, de leur côté, les États-unis entendent de la même manière exclure certains domaines ou secteurs de cet accord de libre-échange. Il lui demande également si les éventuels points de blocage qui pourraient freiner la bonne marche des négociations sont d'ores et déjà identifiés.
Le Conseil des Affaires étrangères en formation « commerce » a adopté par consensus le 14 juin 2013 un mandat de la Commission pour la négociation d'un partenariat transatlantique sur le commerce et l'investissement avec les Etats-Unis (accord de libre-échange UE-Etats-Unis). Les négociations, officiellement lancées à l'occasion du sommet du G8 de Lough Erne (Irlande du Nord), ont débuté dès le mois de juillet à Washington. La France a obtenu que ce mandat de négociation prévoie une exclusion explicite des services audiovisuels du champ de la négociation. Cette exclusion est assortie d'une clause qui permet de rouvrir le mandat ultérieurement, à l'unanimité : dans une telle éventualité, la France ne manquerait pas d'opposer son véto à tout projet de négociation sur l'audiovisuel. Le compromis trouvé le 14 juin sur le mandat de négociation est satisfaisant : celui-ci prévoit de réelles garanties quant à la protection des intérêts et des choix de société des citoyens européens (OGM, clonage, décontamination chimique des viandes et promoteurs de croissance), et ne contient aucune disposition relative aux questions de défense, conformément à la pratique habituelle en matière de mandats commerciaux. Les Etats-Unis n'ont d'ailleurs pas montré d'appétence particulière pour négocier dans le domaine de la défense. Ces garanties ne constituent pas des exclusions en tant que telles, mais définissent clairement les contours de la négociation. Les premières discussions intervenues au Congrès et entre négociateurs européens et américains permettent de délimiter les domaines dans lesquels les Etats-Unis auraient tout intérêt à demander des exclusions, même si celles-ci ne sont pas encore précisément connues. Seraient en particulier concernés les services de transports maritimes et aériens ainsi que les services financiers, domaines que les Américains ont fortement intérêt à protéger au regard de la forte compétitivité des acteurs de l'UE. En outre, une incertitude demeure sur la volonté des Etats-Unis d'exclure certains marchés publics, en particulier au niveau sub-fédéral, alors que la commande publique américaine est aujourd'hui largement fermée aux entreprises de l'UE. Sur les sujets les plus sensibles, le Congrès est la cible d'un intense lobbying de la part de puissants groupes d'intérêt, et tout laisse à penser que la partie américaine fera valoir des demandes d'exclusions, a priori ou au cours des négociations, indépendamment des exigences de l'UE. Ainsi, depuis l'origine, il apparaît très peu probable que le Congrès renonce à une mesure telle que le Jones Act de 1920, qui protège les activités de cabotage le long des côtes américaines, en exigeant que toutes les denrées transitant par les ports américains soient transportées par des navires battant pavillon américain, construits aux Etats-Unis, détenus par des armateurs américains et pilotés par un équipage de nationalité américaine. Pour l'ensemble de ces sujets, la France sera particulièrement vigilante à ce que la Commission européenne négocie, dans les limites de son mandat, un accord ambitieux, favorable aux intérêts de la France et de l'UE. Cette négociation, si elle menée de manière équilibrée, dans un esprit de réciprocité et de bénéfices mutuels, peut représenter une opportunité majeure pour relancer la croissance et l'emploi en Europe et conforter la place des échanges transatlantiques dans le commerce mondial.
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