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Thierry Braillard
Question N° 29058 au Ministère de la justice


Question soumise le 11 juin 2013

M. Thierry Braillard appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'évolution de la procédure prud'homale en cas de saisine du conseil pour contester un licenciement pour faute grave. Depuis un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 5 mars 1981 (n° 513 - société Sommer c/ Dzuiba), et depuis de manière unanime, la jurisprudence considère que la charge de la preuve de la faute grave qu'il invoque pèse uniquement sur l'employeur. L'article R. 1454-18 du code du travail dispose seulement que le bureau de conciliation peut fixer le délai de communication des pièces ou des notes que les parties comptent produire à l'appui de leurs prétentions. Conformément aux règles de procédure civile, la transmission des pièces et conclusions pèse d'abord sur le demandeur puis sur le défendeur. Rien ne s'oppose à ce que les juges, lors de l'audience de conciliation, au titre d'une mesure d'administration judiciaire et conformément à l'article 1315, alinéa 2, du code civil, décident d'inverser le calendrier en demandant d'abord à l'initiateur du licenciement pour faute grave ou pour faute lourde de produire les éléments de preuve sur lesquels il se fonde afin que ceux-ci soient discutés dans le cadre du débat contradictoire. Mais cette situation reste marginale. Il lui demande si elle entend dorénavant, par la voie réglementaire, imposer une inversion du calendrier de procédure prud'homale en cas de saisine pour contestation d'un licenciement pour faute grave ou pour faute lourde.

Réponse émise le 24 décembre 2013

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. Si la charge de la preuve incombe à l'une d'entre elles, cette circonstance n'emporte pas nécessairement, d'un point de vue procédural, l'obligation d'avoir à produire en premier les pièces de procédure au soutien de sa prétention. En effet, tant que cette partie n'apportera pas cette preuve, elle succombera dans ses prétentions quand bien même elle aurait produit les éléments au soutien de sa prétention dès le début de la procédure. A l'inverse, une partie ayant la charge de la preuve pourrait voir sa demande aboutir avec succès si le juge estimait cette preuve rapportée, bien que les pièces de procédure aient été produites au cours des débats, après que des premiers échanges entre les parties ont pu avoir lieu. Ainsi, il appartient au juge, en fonction des éléments produits aux débats, d'apprécier dans le cadre de son délibéré si la partie à qui incombe la charge de la preuve satisfait à cette obligation, sans nécessairement s'attacher aux modalités procédurales de communication des pièces. A cet égard, devant le conseil de prud'hommes, en l'état du droit positif, si l'article R. 1454-18 du code du travail dispose que le bureau de conciliation peut fixer le délai de communication des pièces ou des notes que les parties comptent produire à l'appui de leurs prétentions, le code du travail n'impose aucunement la mise en place d'un calendrier de procédure. En tout état de cause, cet article ne concerne que les conditions de présentation des prétentions des parties et la communication des pièces au cours de l'instance et non l'administration de la preuve proprement dite, laquelle, en matière de licenciement disciplinaire pour faute grave découle en réalité des dispositions de l'article 1315 du code civil, en application duquel la jurisprudence a considéré que la charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur. Ainsi, la seule modification, par voie réglementaire, des dispositions relatives à la communication des pièces dans le cadre de la mise en oeuvre d'un calendrier de procédure ne pourrait avoir pour effet d'affecter les règles relatives à la charge de la preuve. Pour autant, le Gouvernement poursuit sa réflexion sur la procédure prud'homale afin de garantir la pleine efficacité des procédures engagées devant cette juridiction.

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