Mme Sandrine Mazetier attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la question des « frais d'enquête et de surveillance » au sein de la police. Au cours de récentes déclarations, l'ancien ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a ainsi fait état de primes en liquide au sein du ministère de l'Intérieur bénéficiant à « des milliers de fonctionnaires ». Les syndicats SCPN, Unité-SGP et Unsa Police ont déclaré ne « pas [avoir] connaissance d'un tel système ». Ils expliquent ainsi que, depuis 2002, les policiers peuvent toucher un petit supplément (30 euros ou 50 euros) « versé directement sur leur compte bancaire », après une enquête difficile. Cependant, certains syndicats assurent en revanche que de l'argent liquide circule toujours dans les commissariats. Le secrétaire régional du syndicat Unité SGP Police en région Centre explique que « chaque directeur reçoit une enveloppe annuelle qui lui permet de gratifier certaines personnes ». Partageant ce constat, le porte-parole du Syndicat national des officiers de police (SNOP), affirme qu'il y a « quelques gratifications en liquide qui sont données aux services de police judiciaire et d'enquête en cas d'interpellation réussie ». Pourtant, Nicolas Sarkozy, alors en charge place Beauvau, avait mis en place en 2004 la « prime de résultat exceptionnel » (PRE) attribuée sous contrôle des syndicats, légalement et déclarées au fisc. Cette « prime » était présentée comme une manière de mettre fin à ces « gratifications en liquide ». Les récents évènements et les déclarations contradictoires des différents représentants syndicaux de la police semblent montrer que les « primes en liquides » n'ont pas disparu. Ainsi, le secrétaire régional du syndicat Unité SGP Police en région Centre explique que « la manne globale a été diminuée par la PRE, mais n'a pas disparu ». Par conséquent, elle lui demande si oui ou non de tels versements en liquide existent et, le cas échéant, la nature de toute prime, gratification ou défraiement versé en liquide, leurs critères d'attribution et les modalités de leur contrôle.
A la suite de révélations dans la presse ayant donné lieu à l'ouverture d'enquêtes judiciaires, le ministre de l'intérieur a saisi, le 2 mai 2013, l'inspection générale de l'administration (IGA), en lien avec l'inspection générale de la police nationale (IGPN), afin que soit examiné l'usage des frais d'enquête et de surveillance, et la conformité de leur emploi avec les finalités opérationnelles de lutte contre certains types de délinquance. Le rapport a été remis au ministre le 10 juin et fait de nombreuses recommandations. Le ministre de l'intérieur a décidé de les appliquer dans leur intégralité. Sur cette base, le directeur général de la police nationale a immédiatement adressé de nouvelles instructions aux directeurs actifs de la police nationale (instruction du 26 juin 2013). En particulier, sera désormais totalement proscrite toute pratique indemnitaire ou de gratification sur ces fonds, même à titre ponctuel lorsque des fonctionnaires se sont particulièrement investis et ont fait preuve de courage physique dans la réalisation d'une belle affaire. Les frais d'enquête et de surveillance (FES) ont été institués par l'article 4 du décret du 15 juin 1926. Ce texte est à combiner, pour une fraction de ces fonds, avec les textes encadrant spécifiquement la rétribution des informateurs (loi du 9 mars 2004 et ses textes d'application). Ils sont destinés aux services de police dans un objectif d'efficacité et de discrétion dans leurs missions. Ils permettent notamment de recueillir des renseignements, d'acquérir du matériel ou de mettre à disposition des moyens d'investigation. Plus largement, ils visent à couvrir des frais ne pouvant être assurés dans le cadre des procédures administratives et comptables habituelles, que ce soit du fait de l'urgence ou de la confidentialité nécessaire. Les modalités de règlement des crédits affectés à ces frais sont précisées par le décret du 5 novembre 1993, ainsi qu'un arrêté conjoint des ministres de l'intérieur, de la défense, de la justice et du budget du 20 janvier 2006. Si l'utilité de ces fonds reste avérée et s'ils sont incontestablement pourvus d'une base juridique, leur usage doit faire l'objet d'un strict encadrement et d'un contrôle efficace. Sans attendre les textes définitifs, un dispositif transitoire a été mis en place dans la suite de l'instruction précitée du 26 juin 2013. Ce régime : - proscrit l'usage des FES pour toute forme de gratification ou de prime individuelle ou collective ; - proscrit l'usage des FES pour les dépenses de rémunération et/ou les dépenses de fonctionnement courant ; - prescrit un régime strict de traçabilité ; - met en place un mécanisme de contrôle interne via l'IGPN et l'IGA. L'usage des frais d'enquête et de surveillance sera donc désormais strictement limité aux seuls besoins opérationnels. Les indemnisations ou gratifications versées aux fonctionnaires de police ne pourront être versées qu'à partir des crédits prévus à cet effet et une modification du régime de la prime de résultats exceptionnels (PRE) est à l'étude. D'ici à la fin de l'année, la base juridique qui encadre l'usage des frais sera refondue. Il prévoira un examen annuel mené sous le contrôle de l'IGPN et de l'IGA.
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