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Laurent Grandguillaume
Question N° 30493 au Ministère de la culture


Question soumise le 25 juin 2013

M. Laurent Grandguillaume attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la question de la privatisation de certaines archives publiques. Des accords ont été signés entre la Bibliothèque nationale de France (BNF) et des firmes privées, pour la numérisation de corpus de documents appartenant entièrement (livres anciens) ou en partie (78 et 33 tours) au domaine public. Les fonds concernés sont importants, car il s'agit de 70 000 livres anciens français datant de 1470 à 1700, ainsi que plus de 200 000 enregistrements sonores patrimoniaux. Ces partenariats prévoient une exclusivité de dix ans accordée à ces firmes privées, pour commercialiser ces corpus sous forme de base de données, puis les mettre en ligne dans Gallica, la bibliothèque numérique de la BNF. Par conséquent, ces documents ne seront pas diffusés en ligne, mais uniquement sur place à la BNF, sauf pour une infime proportion. L'accès à ces éléments de patrimoine du domaine public sera ainsi restreint, étant donné que les personnes devront se rendre à Paris, au sein de la BNF pour pouvoir les consulter. Cette contrainte annule le principal avantage de la révolution numérique, à savoir la transmission à distance et engendre une inégalité d'accès à la culture. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser les dispositions qu'elle souhaite mettre en oeuvre, afin de remédier à ce problème.

Réponse émise le 12 novembre 2013

La Bibliothèque nationale de France (BnF) a créé en 2012 la filiale BnF-Partenariats afin de développer des partenariats dans le cadre du programme des Investissements d'Avenir. BnF Partenariats a pour mission la constitution d'offres numériques à partir des documents conservés par la BnF. A ce jour, BnF-Partenariats a signé deux accords : l'un, avec la société Proquest, concerne la numérisation d'environ 70 000 ouvrages publiés entre 1470 et 1700 ; l'autre, avec les sociétés Believe Digital et Memnon Archiving Services, concerne la numérisation d'environ 180 000 disques édités de 1900 à 1962. Ces contrats confèrent aux partenaires privés une période d'exclusivité pour l'exploitation des fichiers numériques créés, garantie de l'équilibre économique des partenariats. En ce qui concerne le contrat Believe-Memnon, les documents sont encore dans leur majorité soumis au droit d'auteur ; leur version numérique sera consultable en ligne en intégralité sur la bibliothèque numérique Gallica Intra-muros (consultation gratuite dans les salles de lecture de la BnF) et par extraits sur des plateformes d'écoute et des services de téléchargement. En ce qui concerne le contrat Proquest, pendant la période d'exclusivité, les documents numérisés seront accessibles en totalité sur Gallica Intra-muros (consultation gratuite dans les emprises de la BnF, comme ci-dessus), ainsi que par abonnement à la base Early European Books de Proquest. Le tarif d'abonnement à cette base a été réduit à hauteur de la proposition des données issues de la numérisation des fonds de la Bn. f. En outre, 5 % du corpus concerné, soit 3 500 titres, sera librement accessible en ligne sur la bibliothèque numérique Gallica. Les historiens et chercheurs spécialisés intéressés par ces ouvrages anciens pourront, exactement comme par le passé, les consulter dans les bibliothèques en région ou à Paris. Ils pourront par ailleurs y avoir éventuellement accès en format numérique via l'abonnement à la base susmentionnée. Si le partenariat avec des sociétés privées ne permet pas l'accès intégral, immédiat et gratuit aux données numérisées, il accélère le rythme de numérisation des fonds que la Bnf poursuit par ailleurs sur fonds propres. Le partenariat conclu garantit en revanche qu'à l'issue de la période d'exclusivité tous ces documents seront consultables librement et en intégralité dans Gallica. Il est à noter par ailleurs que, lorsqu'il s'agit de textes de référence, ces oeuvres sont déjà très souvent en ligne gratuitement dans Gallica dans des éditions du XIXe siècle. Enfin, il n'existe aucunement de privatisation d'archives publiques. Les documents concernés ne sont pas des archives au sens du Code du Patrimoine (art. L. 211-1) : il s'agit de livres imprimés anciens, dont il existe a priori plusieurs exemplaires. Ensuite, il n'y a pas de privatisation puisque les accords ne concèdent d'exclusivité que sur les fichiers numériques issus de la numérisation et qui, par définition, ne relèvent pas du domaine public puisqu'ils sont aussi le produit de l'activité du partenaire privé. Les documents physiques qui sont la source de la numérisation ne sont grevés d'aucune exclusivité : ils peuvent toujours être numérisés ou communiqués à qui en fera la demande, dans le cadre ordinaire des missions de la BnF. Ainsi, ces accords permettent d'enrichir l'offre documentaire de la BnF par la création de substituts numériques, d'accroître à terme la diffusion du patrimoine national auprès du plus grand nombre et de maintenir l'effort budgétaire public dans des limites acceptables.

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