Mme Estelle Grelier attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les travaux menés actuellement par la Commission européenne en vue de l'élaboration, fin 2013, d'un rapport d'évaluation visant l'ouverture accrue du transport de marchandises à la concurrence, en vertu du règlement n° 1072-2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des « règles communautaires pour l'accès au marché du transport international de marchandises par route ». Paru en mars 2011, le livre blanc sur l'avenir des transports suggère de « réexaminer la situation du marché des transports routiers de marchandises, ainsi que le degré de convergence concernant, entre autres, les redevances pour l'utilisation des routes, la législation sociale et en matière de sécurité, la transposition et l'application de la législation dans les États membres, en vue d'ouvrir davantage les marchés des transports routiers » et propose « de poursuivre la suppression des restrictions encore en place en matière de cabotage ». La France, dans sa réponse à la consultation publique lancée en juillet 2011, avait rappelé la nécessité de mettre en oeuvre au préalable une harmonisation en matière sociale afin de préserver la compétitivité des transporteurs. Depuis, le Président de la République, François Hollande, a fait part de son rejet de toute nouvelle progression de la libéralisation du marché des transports routiers européens. Dès lors, elle souhaite connaître la position qu'il compte adopter au cours de ses échanges avec ses homologues européens pour assurer le maintien d'une réglementation protectrice et éviter une libéralisation à outrance du transport routier en Europe.
La Commission européenne a confié en septembre 2011 à un groupe d'experts de haut niveau, la mission de lui présenter des propositions tendant à accentuer l'ouverture du marché international du transport routier de marchandises après 2014. Le rapport de ce groupe, dit rapport « Bayliss » du nom de son président, a été remis en juin 2012 et devrait nourrir la réflexion de la Commission. La France a adressé, début novembre 2012, une note de position sur ce rapport. Le Gouvernement français a ainsi fait savoir à la Commission que toute nouvelle étape d'ouverture du marché est prématurée, tant que subsistent les disparités qui se constatent aujourd'hui dans la mise en oeuvre et le contrôle des différentes réglementations qui sont applicables à ce secteur. La réglementation européenne en vigueur (règlement CE n° 1072/2009) prévoit d'ailleurs que l'harmonisation du marché, sous tous ses aspects, est le préalable à toute évolution du régime du cabotage. La France considère que franchir une nouvelle étape dans la libéralisation du marché serait de nature à accentuer les déséquilibres existants dont les conséquences ne sont pas acceptables au regard des principes du droit européen. La position du Gouvernement, telle qu'elle s'exprime à l'égard de la Commission européenne, mais également à l'égard des autres États membres, consiste à recommander de faire porter les efforts sur la mise en oeuvre homogène de la réglementation existante dans tous les domaines où des phénomènes de concurrence déloyale peuvent s'exercer (accès à la profession de transporteur routier, réglementation sociale, poids et dimensions, politiques de contrôle et de sanctions à l'égard des contrevenants). Il convient enfin d'ajouter que cette position du Gouvernement ne vise pas seulement à préserver les transporteurs français d'une concurrence déloyale, mais aussi à garantir des conditions d'exercice de la profession de conducteur routier plus dignes au sein de l'Union qui, aux termes de l'article 3.3 du traité sur l'Union européenne, a pour objectif d'une part « d'oeuvrer notamment pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social » et d'autre part de « combattre l'exclusion sociale et les discriminations ». Ainsi que l'a jugé la chambre sociale de la Cour de cassation, est discriminatoire le fait de rémunérer différemment le même travail en France pour le seul motif tiré de la nationalité du travailleur. Pour atteindre cet objectif fixé par le traité, il faut que soient appliquées par les États membres les conditions de travail et d'emploi prévues par l'article 3 de la directive 96/71/CE sur le détachement dans le cadre d'une prestation de services et notamment le taux de salaire minimal, seul instrument de lutte contre le dumping social et d'expatriation massive de conducteurs qu'il n'est pas admissible de voir réduits à des conditions de vie de travailleurs précaires sur les routes européennes.
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