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Pascal Cherki
Question N° 31659 au Ministère de l'enseignement supérieur


Question soumise le 9 juillet 2013

M. Pascal Cherki attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les dysfonctionnements régulièrement constatés dans certaines universités concernant le recrutement des enseignants-chercheurs. Des arrêts récents du Conseil d'État ont sanctionné les excès de pouvoir commis par des comités de sélection (Voir les arrêts n° 333712 et 341103 du 14 octobre 2011, n° 334084 du 26 octobre 2011 et n° 3338095 du 5 décembre 2011). Le recrutement « entre soi » produit des effets similaires à ces excès de pouvoir. Ainsi, la composition des comités de sélection pose problème lorsque des personnes fonctionnant en réseaux, locaux ou nationaux, forment des comités facilitant des recrutements entre proches au détriment du recrutement de meilleurs candidats répondant mieux au projet de l'établissement. Le problème n'est pas le recrutement de candidats locaux, mais le favoritisme et le clientélisme qui introduisent injustice et inégalité entre candidats et portent atteinte à la qualité des recrutements. Pour leur part, Olivier Godechot et Alexandra Louvet, chercheurs au CNRS, ont quantifié pour la première fois en 2008, le phénomène du localisme. Et les faits sont têtus : les candidats locaux ont dix-huit fois plus de chances que les candidats extérieurs de se voir confier un poste selon ces auteurs qui estiment que ce phénomène « produit à court terme une rupture de l'équité entre les candidats et pourrait en outre dégrader à plus long terme la qualité de l'enseignement et de la recherche universitaire ». Enfin, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, M. Laurent Wauquiez, avait annoncé dans un communiqué du 23 mars 2012 sa décision de mettre en place « une commission de déontologie afin de procéder à une analyse approfondie des procédures de recrutement et de promotion des enseignants-chercheurs et chercheurs ». Cette décision découlait d'un rapport de mission confiée en 2011 à Claudine Tiercelin, professeur au Collège de France, suite au suicide en 2008 d'une maître de conférences dont la titularisation avait été refusée pour « un motif profondément illégal » (aef.info n° 147687, n° 107148 et du 23 mars 2012). Considérant que cette commission n'a toujours pas été mise en place, il lui demande quelles dispositions elle compte prendre pour faire avancer cette question.

Réponse émise le 5 novembre 2013

Plusieurs dispositions législatives ont été prises pour lutter contre l'endorecrutement, telles que la suppression des commissions de spécialistes jusqu'à présent permanentes et leur remplacement par des comités de sélection - éphémères par nature - ou encore l'inscription dans les contrats pluriannuels d'établissement d'objectifs dont le niveau d'atteinte est suivi par des indicateurs partagés. Le statut des enseignants-chercheurs (décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié) présente lui aussi de nombreuses dispositions permettant de lutter contre ces dysfonctionnements. La procédure de recrutement en deux étapes avec une première étape de qualification par une instance nationale (le conseil national des universités) garantit déjà le niveau de recrutement par la constitution d'un vivier de candidats dont les compétences scientifiques sont reconnues. C'est dans ce vivier de candidats qualifiés que les établissements recrutent leurs enseignants-chercheurs. La deuxième étape de recrutement par les établissements, caractérisée par des règles strictes applicables aux comités de sélection, a contribué à réduire les risques de localisme D'ailleurs, le taux d'endorecrutement des maîtres de conférences est passé de 24,4 % en 2008 à 21,4 % en 2011 et celui des professeurs des universités, sur la même période, est passé de 45,7 % à 39,2%. Les règles de composition et de fonctionnement des comités ont pour objet de lutter contre le localisme : nombre de membres extérieurs à l'établissement au moins égal à la moitié, présence exigée durant toute la réunion de la moitié de ses membres, parmi lesquels une moitié au moins de membres extérieurs à l'établissement pour que le fonctionnement soit valable, interdiction à un membre d'appartenir à plus de trois comités de sélection. D'autres règles communes aux examens et concours apportent une garantie supplémentaire d'impartialité : interdiction aux parents, frères et soeurs, conjoints et alliés des candidats de prendre part aux travaux, désignation de deux rapporteurs pour chaque candidat. Des dispositions récentes figurant dans la loi n° 2013-66 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche prévoient la remise en 2015 au Parlement d'un rapport consacré aux bilans d'étape des mesures prises ou aux propositions en vue de renforcer la transparence des procédures de sélection des enseignants-chercheurs et la lutte contre le phénomène de localisme dans leur recrutement. Pour renforcer l'ouverture des comités de sélection, la loi ne limite plus la participation dans les comités de sélection aux chercheurs relevant du décret n° 83-1260 du 30 décembre 1983 fixant les dispositions statutaires communes aux corps des fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques. Des chercheurs venant d'autres horizons vont pouvoir ainsi enrichir le vivier mobilisé pour assurer la composition de ces comités. Ces mesures vont être développées dans leur mise en oeuvre par la modification du décret statutaire des enseignants-chercheurs. Enfin la loi pour l'enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 prévoit qu'une réflexion soit lancée sur le recrutement des enseignants-chercheurs, et que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche fasse des propositions dans un délai de deux ans.

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