M. Razzy Hammadi attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, sur la situation des parents adoptifs et des enfants adoptés à travers le processus de kafala. La HALDE, la Défenseure des enfants, le comité des droits de l'enfant des Nations-unies ont souligné les formes d'inégalités que subissaient ces enfants et leurs familles adoptives vis-à-vis des administrations et des organismes sociaux. L'article 370-3, alinéa 2, de la loi du 6 février 2001 interdit aux ressortissants français d'adopter ces enfants que ce soit sous le régime d'une adoption simple ou d'une adoption plénière, alors que de nombreux pays européens ont reconnu la kafala judiciaire dans leur droit interne. Dans un souci de stabilité de ces enfants, il lui demande de lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre pour assurer un changement du statut des enfants accueillis en France sous cette méthode.
La kafala est une institution de droit coranique qui permet de confier un enfant, durant sa minorité, à une famille musulmane (kafil) afin qu'elle assure bénévolement sa protection, son éducation et son entretien. C'est donc une institution qui a pour objet d'offrir à un enfant une protection sans créer de lien de filiation entre lui et le kafil. Elle est expressément reconnue par plusieurs conventions, que la France a ratifiées, comme une mesure de protection au même titre que l'adoption (article 20 de la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et article 3 de la convention de la Haye concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et des mesures de protection des enfants du 19 octobre 1996). L'article 370-3 du code civil, issu de la loi n° 2001-111 du 6 février 2001 relative à l'adoption internationale, prévoit que l'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si le mineur est né et réside habituellement en France. Cette disposition a été adoptée à l'unanimité par le Parlement français, afin de respecter la souveraineté des Etats prohibant l'adoption, et de se conformer aux exigences de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur l'adoption internationale, qui impose de s'assurer de l'adoptabilité d'un enfant au regard de sa loi personnelle. A plusieurs reprises, la Cour de cassation s'est prononcée sur la conformité de l'alinéa 2 de l'article 370-3 du code civil, qui empêche l'adoption d'un enfant dont la loi prohibe l'institution, aux différentes conventions internationales. Elle a ainsi estimé que le refus d'assimiler la kafala à une adoption n'établissait pas de différence de traitement au regard de la vie familiale de l'enfant dès lors que la kafala, reconnue par la convention internationale des droits de l'enfant, préservait, au même titre que l'adoption, l'intérêt supérieur de l'enfant. La Cour Européenne des Droits de l'Homme, dans son arrêt Harroudj contre France en date du 4 octobre 2012, a confirmé cette analyse. Elle a ainsi estimé que le refus de prononcer l'adoption d'un enfant dont la loi personnelle prohibe l'institution ne constitue pas une ingérence dans la vie familiale de la femme qui a recueilli l'enfant et ne porte pas atteinte au respect de sa vie privée et familiale. La kafala judiciaire, comme toute décision relative à l'état des personnes, a vocation à être reconnue de plein droit sur le territoire français, sans formalité particulière, dès lors que sa régularité internationale n'est pas contestée. Dans le cas d'enfants abandonnés, sans filiation connue ou orphelins, celle-ci produit en France des effets comparables à ceux d'une tutelle sans conseil de famille, le kafil étant investi de l'ensemble des prérogatives d'autorité parentale sur l'enfant. Dans le cas d'enfants ayant encore des parents en état d'exercer leurs prérogatives, la kafala est assimilable en France à une délégation d'autorité parentale totale ou partielle. L'enfant recueilli n'est donc ni un mineur isolé ni un enfant sans statut protecteur. En outre, l'enfant recueilli par kafala peut être adopté dès qu'il acquiert la nationalité française, ce qui est possible après qu'il a résidé cinq années sur le territoire français au sein de sa famille d'accueil. Une circulaire est en préparation au ministère de la justice visant à rappeler les effets juridiques de la kafala et à simplifier les démarches des familles qui accueillent ces enfants sur le territoire national. Par ailleurs, le gouvernement entend examiner les propositions de réforme portées à son attention par le défenseur des droits qui seraient susceptibles d'améliorer les conditions d'accueil et de vie en France des enfants concernés.
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