Mme Jacqueline Fraysse interroge M. le ministre de l'intérieur sur la sollicitation d'informations auprès des collectivités, dans le cadre du recouvrement de créances conduit par des huissiers de justice. Il lui est en particulier demandé si une commune doit s'exécuter face à la demande d'un huissier qui, muni d'un titre exécutoire, et sur le fondement des articles L. 152-1 et R. 152-1 du code des procédures civiles d'exécution, sollicite des renseignements dont la réponse impliquerait qu'il soit procédé à des croisements de fichiers, tels que les listes électorales, dossiers individuels des agents, relevés cadastraux, rôles des impôts locaux, bulletins d'inscriptions aux services municipaux, etc... En effet, les dispositions précitées ne visant pas spécifiquement la collectivité en sa qualité d'employeur, ce droit de communication pourrait également inclure les renseignements sur les administrés, les usagers, les contribuables et les électeurs, transformant alors la collectivité en véritable enquêteur, et au détriment du respect de leur vie privée. C'est pourquoi elle lui demande de clarifier la procédure et les limites de la communication de renseignements personnels par les communes à des tiers.
La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, fixe un cadre à la collecte et au traitement des données afin de protéger les droits et libertés des personnes, et notamment leur vie privée. Les responsables des traitements doivent en particulier veiller à la sécurité des données personnelles qu'ils contiennent et peuvent voir leur responsabilité, notamment pénale, engagée en cas de non-respect des dispositions de la loi. Ainsi, seules les personnes autorisées peuvent accéder aux données personnelles contenues dans un fichier. Il s'agit, dans le texte qui a autorisé la création du fichier, des destinataires explicitement désignés pour en obtenir régulièrement communication, et des « tiers autorisés » ayant qualité pour les recevoir de façon ponctuelle et motivée. La communication de données personnelles à des « tiers autorisés » doit être expressément prévue par la loi. En l'occurrence, l'article L. 152-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que, sous réserve des dispositions de l'article 6 de la loi 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière statistiques, les collectivités territoriales doivent communiquer à l'huissier de justice, porteur d'un titre exécutoire, plusieurs éléments. Il s'agit de l'adresse du débiteur, l'identité et l'adresse de son employeur ou de tout tiers débiteur ou dépositaire de sommes liquides ou exigibles, et la composition de son patrimoine immobilier à l'exclusion de tout autre renseignement. Le secret professionnel ne peut leur être opposé. Les huissiers de justice sont donc des « tiers autorisés » à obtenir ponctuellement communication de données personnelles contenues dans des fichiers gérés par les collectivités territoriales. Seules les données d'ordre personnel et financier contenues dans les questionnaires d'enquête statistique des services publics, et visées à l'article 6 de la loi du 7 juin 1951 précitée, ne peuvent être communiquées. Pour accéder aux données contenues dans ces traitements qu'il est autorisé à consulter, l'huissier doit présenter, à l'appui de sa demande écrite, le titre exécutoire dont il est porteur. La demande doit en outre viser le texte fondant le droit à communication, les personnes clairement identifiées ou identifiables, ainsi que les catégories de données sollicitées. Elle ne peut pas porter sur l'intégralité d'un fichier. Enfin, les collectivités ne peuvent communiquer que les données figurant dans leurs fichiers, manuels ou informatisés. Elles n'ont donc pas à rechercher des données dont elles ne disposeraient pas, ni à collecter de données personnelles sans lien avec leurs fichiers.
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