Condamné en première instance à quatre mois de prison dont deux mois ferme, assortis d'un mandat de dépôt immédiat à l'issue de l'audience du fait de sa participation à un attroupement sans armes après sommation de se disperser, de fourniture d'identité imaginaire et de rébellion, un justiciable a vu sa peine muée en simple amende lors de son procès en appel devant la cour d'appel de Paris. Il est à noter que, dans ses réquisitions en appel, l'avocat général avait demandé cinq mois de prison avec sursis et 1 000 euros d'amende. L'intéressé a donc passé trois semaines dans les geôles de la République, détenu dans des conditions indignes d'un État de droit. Ainsi donc en France en 2013, la justice punit et emprisonne ce qui s'apparente à un délit d'opinion alors même que Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, a régulièrement indiqué que l'emprisonnement n'était ni l'alpha ni l'oméga d'une bonne politique judiciaire. M. Olivier Audibert Troin l'interroge sur la confirmation du nombre de 1 000 gardés à vue dans le cadre des manifestations contre le projet de loi mariage pour tous et lui demande également si la manifestation pacifique d'opinions divergentes peut désormais donner lieu à des décisions d'emprisonnement.
Il n'appartient pas à la garde des sceaux, en application du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, de formuler des appréciations sur les décisions de justice prises en toute indépendance, au regard des circonstances de l'espèce et de la personnalité des mis en cause. La circulaire de politique pénale de la garde des sceaux du 19 septembre 2012 précise que les sanctions requises doivent être justes et adaptées et que toute décision doit être individualisée. Dès lors, les décisions sont prises en considération des éléments de fait, du contexte et de la personnalité des mis en cause. Dans le cas d'espèce évoqué, les juges du fond ont rendu leur décision en faisant une appréciation souveraine de ces éléments, en condamnant le prévenu des chefs d'entrave à la circulation, non dispersion, fourniture d'une fausse identité, refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques et rébellion. Le mis en cause n'a donc pas été inquiété par la justice en raison de sa participation à une manisfestation, ce qui constitue dans notre démocratie un droit constitutionnellement garanti, mais pour avoir été déclaré coupable d'infractions aux lois. L'intéressé était en outre un réitérant, puisqu'il avait fait l'objet d'une première interpellation dans le cadre de la manifestation du 25 mai 2013 à Paris et avait, à l'issue d'une audience de comparution immédiate du 28 mai 2013, été relaxé pour non dispersion et condamné à 200 € pour entrave à la circulation et fourniture d'une fausse identité. Il convient enfin de préciser que les voies de recours offertes par la loi ont été exercées et ont conduit en appel à une condamnation à une peine d'amende dont une partie avec sursis. Les données sollicitées quant au nombre de mesures de garde à vue prises dans le cadre des manifestations contre la loi instaurant le droit au mariage pour tous ne sont pas disponibles. En effet, les statistiques à la disposition du ministère de la justice sont élaborées à partir des condamnations inscrites au casier judiciaire national et ne permettent pas d'isoler des données chiffrées spécifiques aux seules procédures judiciaires établies lors des manifestations contre le mariage pour tous. De la même manière, les applications informatiques utilisées dans les juridictions n'offrent pas la possibilité de regrouper de telles procédures judiciaires, totalement indépendantes les unes des autres. De manière générale, le droit à manifester n'a jamais été mis en cause, alors même que certaines manifestations se sont poursuivies après la publication de la loi votée par le Parlement après un débat démocratique approfondi et qui désormais s'impose à tous.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.