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Jacques Lamblin
Question N° 33707 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 23 juillet 2013

M. Jacques Lamblin alerte M. le ministre du redressement productif sur la dégradation de son environnement commercial qui affecte la filière bois française. En effet, depuis 2007, les exportations de bois vers la Chine ont été multipliées par 5 et dépassent aujourd'hui les 400 000 m3. S'ils sont profitables à notre balance commerciale, ces achats massifs de grumes s'effectuent à des prix supérieurs de 15 % à 20 % à ceux habituellement pratiqués sur le marché intérieur français, d'où un renchérissement des cours de la matière première hautement préjudiciable à nos industries du bois. Parallèlement, les exportations françaises de bois transformés sont quasiment impossibles vers la Chine, en raison de barrières tarifaires de l'ordre de 8 % à 100 % instaurées par Pékin. La Chine, au contraire, inonde l'Europe et la France de produits finis élaborés à partir des grumes françaises et revendus à des prix bien inférieurs à ceux pratiqués en occident, sans que ces importations ne soient taxées. Enfin, ces exportations massives de bois vers l'Asie entraînent une pénurie de produits connexes issus du sciage indispensables pour la fabrication des produits dérivés du bois (pâtes à papier, agglomérés, bois énergie), obligeant ainsi nos industriels à se fournir à l'étranger. Face aux risques que fait peser ce terrorisme commercial sur la filière du bois, il lui demande quelles mesures il envisage de prendre pour en limiter les effets pervers et préserver la pérennité de ce secteur industriel.

Réponse émise le 17 septembre 2013

Pour approvisionner son industrie, la Chine importe de plus en plus de bois. Alors que les premiers fournisseurs de la Chine, États-Unis et Russie, y exportent de plus en plus majoritairement des sciages, la France, troisième fournisseur de feuillus tempérés exporte très majoritairement des grumes. Sous l'effet du ralentissement général des échanges, les exportations françaises de bois ronds ont globalement diminué en 2012, de 23 % en valeur, s'établissant à 252 millions d'euros. Le volume exporté représente au total 15 % de la récolte commercialisée. Le poids de la destination chinoise dans la valeur des exportations a fortement augmenté, passant de 6 % à 16 % entre 2010 et 2012. Néanmoins, la valeur des exportations de bois ronds vers la Chine a légèrement baissé en 2012, mais la diminution s'explique surtout par la baisse des exportations de feuillus (-30 %) alors que les exportations de grumes de résineux s'accroissent. Pour certaines qualités et essences de bois difficilement valorisables par l'industrie française, la demande chinoise a des effets positifs sur la filière. En effet, elle contribue localement à une consolidation des prix et des mises en vente accrues de bois par les propriétaires et les gestionnaires forestiers. La récolte induite par ces exportations est alors valorisable pour l'entretien de la forêt et constitue une source supplémentaire de revenus utilisables pour reconstituer le patrimoine forestier. Lorsque cette demande s'exerce sur les grumes avec des caractéristiques demandées par les scieries françaises, elle peut localement compromettre la pérennité de la ressource et conduire à des difficultés d'approvisionnement de ces entreprises. En augmentant le coût de la matière première des scieries, la demande de bois ronds à l'exportation peut alors provoquer une baisse de compétitivité et un ralentissement de la production de sciages compensé par des importations nécessaires à la satisfaction de la demande finale. Un tel déplacement vers l'étranger d'une partie de la transformation des bois ronds a nécessairement des conséquences négatives en termes de valeur ajoutée, d'emplois et de quantité de produits connexes disponibles pour l'industrie de la trituration et de la production d'énergie. Le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt engage une réflexion de fond sur les termes du commerce international et sur les déséquilibres engendrés par les niveaux de taxation mais également par les exigences environnementales et sociales différentes. D'éventuelles mesures visant à rééquilibrer les régimes de taxes pour l'importation de produits transformés ou l'exportation de produits bruts relèvent des compétences exclusives de l'Union européenne et ne peuvent s'ouvrir que dans ce cadre. L'enjeu majeur pour la filière bois française réside avant tout dans sa capacité à promouvoir des solutions industrielles compétitives sur les marchés domestiques et à l'exportation, et à créer des emplois en France en dynamisant la gestion forestière et en développant, notamment dans la construction, l'utilisation du bois, matériau renouvelable aux qualités exceptionnelles. A cet égard, la préférence pour des produits finis entièrement fabriqués en France passera par une meilleure finition, qualité et adaptation aux besoins du marché. Elle peut aussi s'appuyer sur une meilleure communication auprès du consommateur sur l'origine des produits. Cet enjeu est bien identifié et fait l'objet de débats dans le cadre de l'élaboration du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt actuellement en préparation, laquelle s'appuie notamment sur les conclusions de la mission confiée par le Premier ministre à M. Jean-Yves Caullet, député de l'Yonne, sur la forêt française et la filière bois ainsi que sur les recommandations issues de la mission interministérielle commandée par les ministres chargés du redressement productif, de l'écologie et de l'agriculture. C'est sur la base de ces éléments, présentés aux acteurs de la filière lors du conseil supérieur de la forêt et du bois du 6 mai 2013, que le ministre chargé de l'agriculture compte s'appuyer pour élaborer le volet « forêt » du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, lequel sera présenté au Conseil des ministres à l'automne avant son examen au Parlement. Enfin, il est également beaucoup attendu des propositions formulées par les acteurs de la filière dans le cadre des rencontres régionales de l'agroalimentaire et du bois dont les restitutions sont en cours. Elles permettront de bâtir un plan national d'action pour la filière bois, qui devra prendre en compte l'ensemble des difficultés auxquelles elle est actuellement confrontée, y compris celles relatives aux exportations de grumes.

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