Mme Sabine Buis attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur le projet de modification législative, qui permettrait aux agglomérations d'exercer de plein droit la compétence d'autorité concédante de la distribution d'électricité, en se désolidarisant des syndicats départementaux d'énergie. L'électricité est une énergie de première nécessité qui constitue la source prépondérante du développement économique des territoires et reste irremplaçable dans de nombreux domaines d'activité. De surcroît, la solidarité tissée de longue date entre les territoires ruraux et les territoires urbains a autorisé une péréquation tarifaire, étendue à l'ensemble du territoire national. Récemment, cette solidarité a été parachevée et renforcée par une incitation soutenue au regroupement des autorités concédantes sur des périmètres à maille départementale, alliant les territoires urbains et les territoires ruraux. Au lendemain de cette harmonisation, il semble préoccupant de remettre en cause le bien-fondé d'une telle structuration qui a fait toutes ses preuves d'efficience. Les conséquences d'une telle modification seraient de nature à créer une fracture énergétique territoriale entre les agglomérations rentables du point de vue de la distribution d'électricité et les autres territoires. En effet, les territoires pour lesquels cette activité est économiquement excédentaire ont intérêt à contester la solidarité territoriale. D'ailleurs, les quelques rares agglomérations qui ont pris position en faveur d'une telle rupture se sont également prononcées en faveur de la fin du monopole légal d'ERDF et de la possibilité pour ces agglomérations de créer des régies urbaines de distribution d'électricité ; cette modification législative conduirait à des surenchères lors du libre choix du mode de gestion, dont ne profiteraient que les agglomérations les plus rentables, et amputerait ERDF de tout ou partie de ces territoires rentables qui assurent son équilibre économique global, et mettrait en péril la survie de cet opérateur national, au moment où celui-ci a au contraire besoin de confirmer sa capacité à s'engager dans les financements de long terme. Aussi, très attachée à l'organisation du service public de l'électricité, garante d'une desserte de qualité à un tarif acceptable par nos concitoyens grâce à la solidarité territoriale, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures retenues pour préserver cette dernière.
La distribution publique d'électricité s'est construite et a évolué, au cours du siècle dernier, en se fondant sur deux principes : celui de la concession locale de distribution et celui de la péréquation tarifaire nationale. Le principe de la concession locale a été fixé par la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, qui a donné la compétence aux communes ou aux syndicats de communes en matière de distribution publique d'électricité. Pour des raisons de taille et d'efficacité, l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, introduit par la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie a encouragé le regroupement des autorités organisatrices de la distribution au niveau de syndicats départementaux. Le principe de péréquation tarifaire, déjà initiée dans les années 1930, a définitivement été établi par la loi du 8 avril 1946. En nationalisant la distribution d'électricité dans sa quasi-totalité, la loi a institué un « concessionnaire obligé », qui applique le même tarif (tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE), sur l'ensemble du territoire national. Le TURPE est également appliqué par les quelque 150 entreprises locales d'électricité, émanations des collectivités locales, et qui, de ce fait, n'ont pas été nationalisées en 1946. Si l'organisation de la distribution publique d'électricité ne constitue pas un système figé et qu'il devra vraisemblablement évoluer et s'adapter, comme il l'a fait par le passé, il n'entre pas dans les intentions du Gouvernement de remettre en cause ses fondamentaux. Ainsi, la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action territoriale et d'affirmation des métropoles, si elle confère aux métropoles ou aux communautés urbaines la compétence d'autorité concédante de la distribution d'électricité, n'impose pas le démantèlement des syndicats d'électricité, mais uniquement la substitution de la métropole ou de la communauté urbaine aux communes au sein de ces syndicats. Par ailleurs, lors de la négociation du projet directive européenne sur l'attribution des contrats de concession, la France a défendu le principe de l'exclusion des concessions de distribution d'énergie du dispositif' de mise en concurrence, exclusion qui a été actée lors de l'adoption de la directive 20 14/23 du 26 février 2014. Ce système mixte d'organisation de la distribution publique d'électricité présente de nombreux avantages une perception des besoins proche du terrain en raison du caractère local de l'autorité organisatrice de la distribution, alliée aux économies d'échelles et à la mise en oeuvre d'un système simple de péréquation tarifaire, réalisés au sein d'un opérateur de niveau national.
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