M. Francis Vercamer attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les perspectives de réforme de la justice commerciale. Les réflexions en cours, portant en particulier sur la composition des tribunaux de commerce, suscitent en effet interrogations et inquiétudes dans le monde consulaire. La justice consulaire a ainsi rendu en 2012 plus d'un million de décisions, pour un traitement sur 5,4 mois en moyenne, et un taux d'infirmation en appel très faible. Elle est donc perçue comme efficace et rapide. La perspective d'introduire des magistrats professionnels aux côtés des juges consulaires dans les formations du jugement, voire de confier à un magistrat professionnel la présidence des chambres de procédure collective, sont ressenties comme une remise en cause profonde des principes d'organisation de la justice commerciale. L'intervention d'un magistrat professionnel sur le fond même de la décision prise par le tribunal de commerce, va en effet à l'encontre de ce principe de proximité qui permet des jugements en lien avec l'expérience du monde de l'entreprise au sein du bassin d'emplois. Par ailleurs, l'encadrement légal de la mission du juge consulaire et la présence du Ministère public à ses côtés, garantissent son indépendance et l'impartialité de ses décisions. Dans ce contexte, l'instauration de l'échevinage au sein des tribunaux de commerce risquerait d'entraîner une démobilisation et une déresponsabilisation des juges commerciaux. Il n'en reste pas moins vrai que des améliorations peuvent être apportées au fonctionnement de la justice consulaire, notamment concernant les conditions d'accès au mandat des juges des tribunaux de commerce, ainsi que leur formation. Il lui demande donc de bien vouloir préciser les orientations que le Gouvernement entend prendre sur le sujet.
Les juges consulaires ont su utiliser leur connaissance du monde de l'entreprise au service des fonctions juridictionnelles qu'ils exercent et à l'évolution desquelles ils ont largement participé. Au coeur de la vie économique de notre pays, les juridictions consulaires doivent cependant faire face à la complexité croissante du droit et aux difficultés majeures provoquées par la crise économique. Pour relever ces nouveaux défis, les dispositifs de prévention et de traitement des difficultés des entreprises, l'organisation et le fonctionnement de la justice commerciale doivent être modernisés pour être davantage à la hauteur des enjeux pour nos entreprises et pour l'emploi. En décembre 2012, la garde des sceaux, ministre de la justice a mis en place des groupes de travail, cette large consultation a donné lieu à des travaux très riches. Parallèlement, une mission d'information de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République de l'Assemblée nationale a présenté, le 24 avril 2013, un rapport sur le rôle de la justice en matière commerciale. L'ensemble de ces propositions ont naturellement alimenté les travaux législatifs en cours de rédaction. Pour le gouvernement, le volet de la réforme des mesures de traitement des difficultés des entreprises est prioritaire, c'est pourquoi, il a décidé de l'intégrer au projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises. Cette loi d'habilitation est en cours d'examen au Parlement, dès son vote un projet d'ordonnance sera transmis au Conseil d'État pour une présentation en conseil des ministres dès le début 2014. Les mesures qu'il comportera ont notamment pour objectif d'inciter les entrepreneurs qui rencontrent des difficultés à davantage recourir aux mesures de prévention, de mieux articuler entre eux les dispositifs de prévention et les procédures collectives, de réduire les délais, d'accroître les pouvoirs des créanciers. L'esprit des mesures est d'aboutir à une plus grande réactivité, de donner aux créanciers et aux juges consulaires des outils adaptés, efficaces et fiables pour accompagner et aider l'entreprise en difficulté et par là préserver les emplois. Le second volet de la réforme de la justice commerciale concerne l'organisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce et les acteurs de la justice commerciale. Il traitera en particulier de la déontologie, du statut et de la formation des acteurs de la justice commerciale, de l'organisation des juridictions et de l'amélioration du rôle des administrateurs et mandataires judiciaires. Ce texte sera présenté au Parlement en mars. L'échevinage, c'est-à-dire la constitution de formation de jugements mixtes comportant à la fois des magistrats professionnels et des juges élus, est une piste, en particulier au niveau des cours d'appel. Pour faciliter le traitement des dossiers les plus techniques et présentant des enjeux sociaux et économiques majeurs, sont également envisagées la spécialisation du parquet commercial et celle de certaines juridictions consulaires. La réflexion sur ces points doit être ouverte. Le projet de réforme du gouvernement comportera un projet de loi et toutes les mesures nécessaires à sa mise en oeuvre. L'efficacité et la confiance dans la justice commerciale sont les enjeux de la réforme, deux qualités sur lesquelles s'appuient les dirigeants d'entreprises en difficulté et qu'attendent leurs salariés qui savent que leurs emplois peuvent en dépendre.
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