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Jean-Pierre Blazy
Question N° 4348 au Ministère du travail


Question soumise le 11 septembre 2012

M. Jean-Pierre Blazy attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les difficultés croissantes rencontrées par les professionnels de la médecine du travail. En effet, la dégradation des conditions de travail au sein de ce secteur fait peser une menace sur les rapports sociaux dans les entreprises. En cause, la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail qui semble opérer un virage régressif dans l'amélioration des liens entre travail et santé en favorisant une approche managériale néfaste pour le secteur. De plus, les difficultés initiales de celui-ci n'ont pas été prises en compte dans cette réglementation malgré la position peu enviable de la France en Europe concernant la santé au travail. Ainsi, elle n'a pas permis de faire évoluer la question de l'indépendance du médecin du travail par rapport au patronat, de même que la problématique du paritarisme aujourd'hui inopérante dans les services de santé au travail. Aussi il souhaiterait connaître ses propositions concernant la réforme de cette loi afin de mettre pleinement en adéquation objectifs et moyens et de rééquilibrer un système largement tourné vers l'intérêt des employeurs au détriment de la santé des salariés.

Réponse émise le 24 mars 2015

L'importance des questions de santé au travail a nécessité de réformer les services de santé au travail (SST) : tel est l'objet de la loi du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail et de ses deux décrets d'application du 30 janvier 2012. Les SST ont en effet un rôle essentiel en matière de prévention qu'une réforme se doit de préserver. Le médecin du travail demeure l'acteur de prévention le plus présent dans les entreprises et en particulier dans les plus petites d'entre elles. Son expertise auprès des entreprises ainsi que la proximité des SST sont des atouts majeurs qu'il convient de conforter. Les grands principes sur lesquels repose l'organisation française du système de santé au travail doivent rester au centre de toute réflexion : - l'universalité, la médecine du travail devant s'adresser à l'ensemble des travailleurs ; - la spécialisation et l'indépendance professionnelle des médecins du travail ; - la vocation exclusivement préventive du système de santé au travail. Pour la première fois, les missions des SST sont clairement définies par la loi et concernent non seulement les salariés pris individuellement mais aussi les travailleurs dans leur ensemble, dans une démarche complémentaire rendue indispensable dans un contexte de forte évolution des risques professionnels (troubles musculo-squelettiques, risques chimiques, etc.. . ). Cette approche collective explique aussi la mise en place d'une véritable équipe pluridisciplinaire de santé au travail comprenant des médecins du travail, des intervenants en prévention des risques professionnels, des infirmiers, qui peut être complétée par des assistants de services de santé au travail et d'autres professionnels recrutés après avis des médecins du travail. Cette équipe est animée et coordonnée par les médecins du travail. La mise en convergence de compétences et de métiers différents a permis, dans le respect des spécialités respectives, un enrichissement mutuel, un partage des expériences, une meilleure répartition et une plus grande efficacité des actions. En conjuguant une approche individuelle et une action collective renforcée, la réforme a, de plus, permis d'optimiser le temps médical disponible alors même que la démographie des médecins du travail subit une évolution préoccupante. Quant à l'indépendance du médecin du travail, il convient de souligner qu'elle est garantie par les dispositions du code du travail mais aussi par le code de la santé publique et le code de déontologie. Ce texte législatif l'a encore réaffirmée, en renforçant le statut de salarié protégé du médecin du travail. Le fait que le médecin du travail soit le salarié d'une entreprise (dans le cas d'un service autonome) ou d'un SST interentreprises n'entame en rien son indépendance, ni ses prérogatives dans l'exercice de son art. La réforme de la médecine du travail rénove, par ailleurs, fondamentalement la gouvernance et améliore le pilotage des SST en instaurant une gouvernance paritaire (alors qu'antérieurement la représentation des employeurs représentait les deux tiers des sièges). Il prévoit une organisation des missions à travers un projet de service pluriannuel et un contrat d'objectifs et de moyens passé entre le service, l'autorité administrative et les organismes de sécurité sociale compétents. S'agissant de la composition du conseil d'administration des services de santé au travail interentreprises (SSTI) et, plus particulièrement, du mode de désignation des deux collèges (employeurs et salariés), il doit être rappelé sur ce point que, tout au long des débats parlementaires qui ont été menés depuis 2010, le gouvernement s'est toujours attaché à préserver un équilibre d'ensemble. La loi prévoit désormais que cette gouvernance est paritaire et que le président et le trésorier sont élus, le premier parmi les représentants des employeurs et le second parmi les représentants des salariés. En outre, la réforme a pour objectif de traiter le cas de catégories de salariés aujourd'hui privées, en droit ou en fait, de l'accès aux services et prestations de santé au travail du fait de leur dispersion ou de la courte durée des contrats de travail : plus d'un million et demi d'employés de maison, les voyageurs-représentants-placiers (VRP), les stagiaires de la formation professionnelle, les intermittents du spectacle, etc. Dans un souci de pragmatisme, le suivi médical individuel de ces travailleurs pourra être adapté par voie conventionnelle ou réglementaire. Cependant, le premier bilan de la mise en oeuvre de la réforme, présenté aux partenaires sociaux dans le cadre du Conseil d'orientation sur les conditions de travail, a mis en évidence la nécessité d'un positionnement plus approfondi pour répondre aux enjeux et aux difficultés auxquels ce dispositif reste confronté. A ce titre, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ont lancé en novembre 2014 une mission d'étude sur la notion d'aptitude, les examens médicaux et les enjeux qui s'y attachent, afin de poursuivre la réflexion sur les modalités optimales de suivi médical des salariés. Cette mission réunit des parlementaires, des membres de l'inspection générale des affaires sociales, des professeurs de médecine du travail et des docteurs en droit ainsi qu'un directeur des ressources humaines. Elle est chargée de remettre aux ministres un rapport sur ses réflexions et ses propositions.

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