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Sandrine Hurel
Question N° 4609 au Ministère des PME


Question soumise le 18 septembre 2012

Mme Sandrine Hurel attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances au sujet des difficultés rencontrés par les PME en termes de trésorerie notamment. Les PME constituent une force incontestable dans l'activité de notre pays, surtout en ces périodes de conjoncture économique et sociale difficiles. Ces dernières rencontrent des problèmes en matière de recrutement d'un personnel qualifié, en matière de volume d'activité et en matière de trésorerie. La loi LME du 4 août 2008 a clarifié, pour partie, les délais de règlement entre fournisseurs et clients. Cela étant, les PME travaillant avec de grandes enseignes sont confrontées à des difficultés qui compromettent la pérennité de l'entreprise. Selon les dirigeants de PME, ces problèmes trouvent leur explication à deux niveaux. Premièrement, les délais de règlement indiqués par le fournisseur ne sont pas respectés puisque le client (maître d'ouvrage) les imposent au maître d'oeuvre et donc aux fournisseurs. De plus, les délais de règlement sont calculés à partir de la réception de la facture par le client final. Or les intermédiaires (maîtres d'oeuvre) mettant du temps à gérer cette partie administrative de leur mission, le prestataire est réglé tardivement. Les PME ne peuvent assumer ces délais. Aussi, elle lui demande s'il entend étudier la possibilité, sans pour autant modifier les dispositions de base de la loi de modernisation de l'économie, préciser explicitement que les délais de règlement s'entendent à compter de la date de facture émise par le fournisseur. Elle lui demande également de lui indiquer ses intentions concernant la possibilité de permettre à tous les marchés dont le montant est de plus de 30 000 euros hors taxes de faire l'objet d'un versement, par le client, d'un acompte qui soit compris entre 20 % et 30 % du montant des travaux.

Réponse émise le 23 avril 2013

Les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) peuvent se trouver confrontées à des problèmes de trésorerie en raison d'un déséquilibre entre des délais de paiement des fournisseurs, plus courts depuis la loi de modernisation de l'économie (LME) et des délais de paiement des clients inchangés. Ainsi qu'a pu le relever l'observatoire des délais de paiement, dans ses rapports 2010 et 2011, les entrepreneurs du bâtiment peuvent ainsi être victimes d'un « effet ciseau » en matière de délais de paiement. Il faut noter que jusqu'au 31 décembre 2011, un accord dérogatoire aux délais de paiement couvrait la filière des produits, bois, matériaux et services pour la construction et la décoration dans le secteur du bâtiment et des travaux publics prévoyant une réduction par palier vers les délais de droit commun. La LME a réformé le cadre général applicable aux relations commerciales en introduisant le principe d'un plafonnement des délais de paiement convenus entre les parties à 45 jours fin de mois ou 60 jours date d'émission de la facture. Ce dispositif a pris sa pleine mesure à compter du 1er janvier de cette année, date d'expiration des accords dérogatoires. Les bénéfices de la réduction des délais de paiement interentreprises sont unanimement reconnus, comme en témoignent les travaux de l'observatoire des délais de paiement. Il n'en demeure pas moins que certains maîtres d'ouvrage, soumis aux conditions de règlement prévues par le code de commerce, ne respectent pas ces dispositions. C'est pourquoi l'article 121 IV de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification et à l'allègement des démarches administratives, rappelle que les professionnels opérant dans le secteur des marchés de travaux privés sont soumis aux plafonds des délais de paiement prévus par le code de commerce et issus de la LME. Ces plafonds s'appliquent au règlement des acomptes mensuels et du solde des marchés de travaux privés, ils ont pour point de départ la date d'émission de la facture. L'acompte à la commande est payé selon les modalités prévues au marché. Seuls les marchés publics prévoient des dispositions légales donnant droit à une avance d'au moins 5 % dans les marchés supérieurs à 50 000 € HT et d'une durée d'exécution supérieure à 2 mois (cf. article 87 du code des marchés publics). En matière de marchés privés, aucune disposition ne prévoit le versement obligatoire d'avances ou d'acomptes à la commande. Des acomptes peuvent être décidés lors de la négociation, dont les montants sont fixés en fonction des usages de l'entreprise et des capacités financières du client. Rien n'empêche donc que les marchés dont le montant est supérieur à 30 000 € HT, ne fassent l'objet d'un versement, par le client, d'un acompte compris entre 20 % et 30 % du montant des travaux. En revanche, il n'a pas paru opportun de donner suite à la proposition d'insertion dans la loi d'une disposition prévoyant le paiement à 30 jours des acomptes et du solde (soit un délai réduit de moitié par rapport aux dispositions du code de commerce). En effet, il convient de veiller à laisser au maître d'ouvrage un délai suffisant pour s'assurer de l'état d'avancement du chantier et de la qualité des travaux. L'efficacité du plafonnement des délais de paiement est renforcée par l'institution légale d'une exception d'inexécution au bénéfice de l'entrepreneur du bâtiment. L'article L. 111-3-1 du code de la construction et de l'habitat, introduit par l'article 121 IV de la loi précitée, prévoit désormais que lorsque l'entrepreneur n'est pas payé dans les temps, il peut suspendre l'exécution des travaux quinze jours après avoir, sans succès, mis son débiteur en demeure de s'exécuter. Par ailleurs, l'article L. 441-6 du code de commerce prévoit expressément que les pénalités de retard sont exigibles de plein droit et sans qu'un rappel ne soit nécessaire. Ainsi, tout retard de paiement doit entraîner le versement par le débiteur, en sus du principal, de pénalités de retard calculées sur la base d'un taux dont les planchers sont fixés par le code de commerce. L'article 121 I de la loi précitée, indique que le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, le taux en vigueur est celui du 1er juillet de l'année en question. Ces pénalités ne sont d'ailleurs pas exclusives de toute autre somme pouvant être obtenue à titre d'indemnisation. En outre, l'article 121 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives prévoit, au c) du 1° du I, que « tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret ». Cette indemnité a pour objet de compenser les frais de recouvrement exposés en cas de retard de paiement et de décourager les paiements tardifs. Le décret n° 2012-1115 du 2 octobre 2012 fixe le montant de cette indemnité forfaitaire à 40 €. Le Gouvernement réfléchit à des pistes de réformes pour améliorer le dispositif de sanctions relatif aux délais de paiement. Ces réformes permettraient une réponse plus rapide en cas de non-respect des délais réglementés et permettraient d'appréhender aussi plus facilement les nombreuses pratiques de contournement des dispositions légales. En parallèle de ce dispositif, le secteur du BTP a développé une politique dynamique avec l'élaboration de chartes de bonnes pratiques, permettant d'améliorer les relations avec les maîtres d'ouvrage et d'anticiper les différends. En outre, les parties peuvent décider de soumettre leur marché aux normes édictées en la matière par l'association française de normalisation (AFNOR), qui constituent des documents de référence élaborés de manière consensuelle par les intéressés (par exemple la norme AFNOR NF P 03.001, dont l'article 20.3.1 prévoit le paiement des acomptes mensuels « à dater de la remise de l'état de situation au maître d'oeuvre »). Le point sensible concerne les délais de paiement du solde des travaux. En effet, pour ce paiement final, l'entreprise doit remettre un mémoire définitif soumis à l'approbation de plusieurs acteurs (bureau d'études, maître d'oeuvre et maître d'ouvrage). Le paiement peut aussi être conditionné par la production de certains documents (dossier des ouvrages exécutés). L'envoi de la facture peut lui-même parfois être conditionné à la réception globale du marché. Ces faits sont donc susceptibles d'allonger les délais de traitement des paiements. Sur ce point, un protocole d'accord interprofessionnel a été conclu en juin 2010, qui recommande aux entreprises d'envoyer leur mémoire définitif simultanément au maître d'oeuvre et au maître de l'ouvrage dans un délai maximum de 45 jours à compter de la réception des travaux. Il est aussi recommandé aux maîtres d'ouvrage de régler le solde de chaque entreprise sans attendre d'avoir reçu l'ensemble des mémoires définitifs. Enfin, le recours à des solutions de financement alternatives pourra constituer une solution complémentaire aux problèmes de trésorerie rencontrés par les entrepreneurs. La mise en place de crédits de campagne et le recours à Oséo, ainsi que le préconise l'observatoire des délais de paiement, répondent à ces problématiques. En outre, les difficultés que pourraient rencontrer les petites et moyennes entreprises à se financer ont conduit le Gouvernement à prévoir la mise en place d'une banque publique d'investissement. Les ressources de cette banque pourront être ciblées sur les défaillances de marché avérées.

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