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Christian Franqueville
Question N° 46864 au Ministère des affaires sociales


Question soumise le 24 décembre 2013

M. Christian Franqueville attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la nécessité de clarification législative relative à la prestation de compensation du handicap (PCH) suite à deux décisions de la Cour de cassation et du Conseil d'État. En effet, dans leurs décisions respectives du 16 mai et du 23 septembre 2013, les deux plus hautes juridictions françaises ont semblé reconnaître un caractère indemnitaire à la prestation de compensation, ce qui inquiète légitimement plusieurs associations de personnes handicapées ou à mobilité réduite. Outre le fait que ces décisions sont en contradiction avec l'esprit de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, elles risquent de remettre en question le principe de libre-disposition par les victimes des sommes issues d'un droit à l'indemnisation. Par ailleurs, mettent en garde ces associations, cela pourrait avoir pour conséquence que les départements, financeurs de la prestation de compensation, deviennent en définitive les payeurs de sommes normalement supportées par les assureurs. En effet, la loi ne conférant pas à la prestation de compensation de caractère indemnitaire, les conseils généraux n'ont pas la qualité de tiers-payeur, ce qui les empêche de tout recours contre les assureurs. Aussi, dans un souci de défense des droits des victimes et de prise en compte des contraintes financières pesant sur nos départements, il lui demande de bien vouloir apporter des clarifications aux deux dispositions du code de l'action sociale et des familles suivantes : au niveau de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, « Toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France métropolitaine, dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 du code de la sécurité sociale ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, dont l'âge est inférieur à une limite fixée par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret prenant notamment en compte la nature et l'importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie, a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d'une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces. Cette prestation n'a pas de caractère indemnitaire » ; au niveau de l'article L. 245-7 du code de l'action sociale et des familles : « L'attribution de la prestation de compensation n'est pas subordonnée à la mise en œuvre de l'obligation alimentaire définie par les articles 205 à 211 du code civil. Il n'est exercé aucun recours en récupération de cette prestation ni à l'encontre de la succession du bénéficiaire décédé, no sur le légataire ou le donataire. Les sommes versées au titre de cette prestation ne font pas l'objet d'un recouvrement à l'encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune. La prestation de compensation n'est pas prise en compte pour le calcul d'une pension alimentaire, du montant d'une dette calculée en fonction des ressources ou du montant de l'indemnisation versée en réparation d'un dommage corporel ».

Réponse émise le 23 décembre 2014

La prestation de compensation (PCH), créée par la loi du 11 février 2005, vise à compenser les conséquences du handicap par une prise en charge individualisée des besoins exprimés par la personne handicapée. L'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, relatif à la PCH, prévoit une articulation avec les droits ouverts de même nature au titre d'un régime d'assurance maladie. En revanche, le législateur n'a pas prévu de rendre la PCH subsidiaire par rapport aux indemnisations assurantielles, ce qui permettrait alors aux départements d'engager une action subrogatoire contre les tiers responsables. De même la PCH ne peut pas être récupérée dans le cadre d'un recours contre la personne tenue à indemnisation car la PCH ne fait pas partie de la liste de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 qui liste les prestations ouvrant droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur. Deux décisions juridictionnelles récentes (cour de Cassation, 16 mai 2013, n° 12-18093 et conseil d'Etat, 5e et 4e sous-sections réunies, 23 septembre 2013, n° 350799) reconnaissent à la PCH un caractère indemnitaire. Dès lors, en l'absence de dispositions rendant la PCH subsidiaire par rapport aux indemnisations assurantielles et permettant le recours subrogatoire des conseils généraux, le montant de la PCH peut être déduit du montant de l'indemnisation assurantielle. Les départements risquent ainsi d'assumer des sommes normalement supportées par les assureurs. Dans son rapport sur l'évaluation de la PCH publié en 2011, l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) identifiait ce risque et préconisait que les textes prévoient un recours subrogatoire pour les départements en matière de PCH, afin que ceux-ci puissent se retourner contre les assureurs. Dans le cadre des travaux sur la compensation des allocations individuelles de solidarité dont fait partie la PCH, l'assemblée des départements de France a proposé de renforcer le caractère subrogatoire de cette prestation. Une telle évolution, techniquement et juridiquement complexe au regard de la nature des frais en cause ou des modalités de versement des indemnités, supposerait en amont une évaluation des impacts sur l'ensemble des parties prenantes (usagers, départements et assureurs). Le souci de bonne gestion de cette prestation et des derniers publics rendent opportunes ces analyses qui seront conduites dans les prochains mois.

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