M. Olivier Audibert Troin attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la récente proposition de loi socialiste relative aux modalités de mise en œuvre des conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie complémentaire et les professionnels, établissements et services de santé, adoptée en décembre 2013. Ce texte ouvre la possibilité, pour les organismes complémentaires d'assurance maladie (OCAM), de pratiquer des modulations des prestations servies à leurs adhérents si ces derniers recourent à un professionnel, un service ou un établissement de santé membre d'un de leur réseaux de soins. Il prévoit ainsi un cadre réglementaire pour les conventions qui seront passées entre les OCAM et les professionnels. Ces dernières devront garantir le libre choix du professionnel, établissement ou service par le patient, la fixation de critères objectifs, transparents et non discriminatoires pour l'adhésion des professionnels, établissements et services aux conventions et l'interdiction de clauses d'exclusivité. Cependant, une distinction a été effectuée pour les opticiens. Les sénateurs ont fait le choix, validé par les députés en seconde lecture, d'autoriser la constitution de réseaux de soin dits « fermés ». Cela signifie que les OCAM pourront refuser de conventionner un opticien même si ce dernier répond aux conditions fixées par l'article 2 de ce texte. Cette disposition, en plus d'être discriminatoire puisqu'elle vise une seule profession, met en danger de nombreux emplois. En effet, si un opticien n'est plus conventionné, il risque de perdre une part importante de sa clientèle. Aujourd'hui, 2 000 opticiens sont formés chaque année ; avec cette proposition, il n'est plus sûr que ces derniers trouvent un débouché professionnel à l'issue de leurs études. Enfin, si l'objectif annoncé de cette disposition est de faire baisser le montant qui restera à charge du patient, il rappelle que nombre d'opticiens proposent des offres à des prix proches du forfait de la couverture maladie universelle complémentaire. De plus, cet objectif est en contradiction avec la loi de financement de la sécurité sociale puisque cette dernière plafonne les remboursements de l'optique pour les OCAM. Par conséquent, il lui demande si elle entend revenir sur cette disposition.
La loi du 27 janvier 2014 relative aux modalités de mise en oeuvre des conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie complémentaire et les professionnels, établissements et services de santé, qui résulte d'une proposition de loi déposée par le député Bruno Le Roux au nom des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, poursuit une triple ambition. Il s'agit en premier lieu de favoriser une régulation des coûts de santé en vue de maîtriser les restes à charge pour les ménages et le montant des cotisations des complémentaires santé, évitant ainsi des démutualisations. En second lieu, ce dispositif a pour objectif d'améliorer la qualité de l'offre à travers les engagements pris par les professionnels de santé au sein des réseaux ainsi constitués. Enfin, il vise à permettre aux mutuelles de disposer des outils identiques à ceux offerts aux autres opérateurs. Dans le cadre des principes de la loi du 27 janvier 2014 relative aux modalités de mise en oeuvre des conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie complémentaire et les professionnels, établissements et services de santé aux objectifs ainsi fixés, le Gouvernement a jugé nécessaire que les réseaux de soins soient encadrés. A cet égard, le texte final de cette loi met en oeuvre de manière immédiate un encadrement effectif des réseaux de soins, valable pour l'ensemble des organismes complémentaires, qu'il s'agisse des mutuelles ou des autres organismes assureurs. En effet, les institutions de prévoyance et les sociétés d'assurance avaient déjà la possibilité d'utiliser ce mécanisme qui permet de renforcer la régulation et donc de réduire le reste à charge des adhérents. Le dernier alinéa de l'article L. 863-8-I du code de la sécurité sociale, qui encadre ainsi les conventions conclues entre les organismes de protection sociale complémentaire et les professionnels, les services et les établissements de santé, précise que « ces conventions ne peuvent comprendre aucune stipulation portant atteinte au droit fondamental de chaque patient au libre choix du professionnel, de l'établissement ou du service de santé et aux principes d'égalité et de proximité dans l'accès aux soins ». L'article 2 impose également que les réseaux respectent certains principes : le libre choix du professionnel de santé, l'adhésion des professionnels de santé selon des critères transparents et non discriminatoires et une information suffisante des assurés. Il convient également de rappeler que les professionnels de santé, et notamment les opticiens, resteront libres d'adhérer ou non aux réseaux de soins. L'article 2 interdit également toute clause d'exclusivité. Par ailleurs, s'agissant de la possibilité offerte de réseaux fermés en matière d'optique, le conseil constitutionnel a jugé qu'une telle disposition ne portait pas atteinte à la liberté des opticiens-lunetiers d'exercer leur profession. Comme l'a encore relevé l'autorité de la concurrence, la limitation du nombre de professionnels référencés par les organismes complémentaires d'assurance maladie est de nature à permettre une modération des coûts contre la perspective de recevoir un nombre significatif d'assurés. En l'absence d'un tel dispositif, sur un marché connaissant un nombre toujours croissant de professionnels, marqué par une asymétrie d'information entre professionnels et assurés sur le coût et la qualité des équipements proposés, l'efficacité d'un réseau conventionné est moins importante. Les données disponibles sur les réseaux existant en matière d'optique montent que les réseaux fermés permettent de baisser les prix de 30 à 40%, ce qui permet de limiter le montant restant à la charge directe des assurés. Enfin, s'agissant des conséquences de ces dispositions, l'article 3 prévoit la remise d'un rapport annuel, pendant une période de trois ans, portant sur le bilan des conventions souscrites et notamment sur les garanties et prestations qu'elles comportent et leur bénéfice pour les patients, notamment en termes de reste à charge et d'accès aux soins, et leur impact sur les tarifs et prix négociés avec les professionnels, établissements et services de santé. Les dispositions de cette loi s'inscrivent donc pleinement dans l'objectif de généralisation, à l'horizon 2017, de l'accès à une couverture complémentaire santé de qualité, annoncé par le Président de la République dans son discours au Congrès de la mutualité en octobre 2012.
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