Mme Jacqueline Fraysse attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le traitement de la DMLA (dégénérescence maculaire liée à l'âge). La DMLA, première cause de cécité après 50 ans, est une maladie de l'œil qui affecte environ un million de personnes en France. Deux traitements dérivant du même « anticorps monoclonal », et mis au point par le même laboratoire, permettent de traiter la DMLA par injection dans l'œil : l'avastin, commercialisé par le laboratoire Roche et le lucentis, commercialisé par Novartis, actionnaire à un tiers de Roche. Une circulaire de la direction générale de la santé du 11 juillet 2012 « relative à la législation applicable aux préparations magistrales et notamment aux préparations de seringues pour injection intravitréenne de la spécialité pharmaceutique avastin » a imposé l'utilisation du lucentis, arguant du fait que l'Avastin ne dispose pas d'une autorisation de mise sur le marché pour le traitement de la DMLA. Pourtant, la différence principale entre les deux traitements semble surtout résider dans le prix, le lucentis étant près de 40 fois plus cher que l'avastin. Ainsi, de nombreuses études, dont dernièrement encore l'étude GEFAL menée par le CHU de Lyon, et financée par le ministère de la santé, ont montré l'action identique des deux médicaments dans le traitement de la DMLA, mais également de la rétinopathie diabétique ou de l'occlusion veineuse centrale de la rétine. En Italie, l'autorité de la concurrence, devant la similitude des deux traitements, a estimé que les laboratoires « Roche et Novartis se sont entendus pour créer une différenciation artificielle entre produits et prétendre qu'avastin est plus dangereux que lucentis en vue d'influencer les prescriptions et les services de santé », et leur a infligé des amendes de 182,5 millions d'euros. D'après les données de l'assurance maladie, les remboursements du lucentis se sont élevés à 438 millions d'euros en 2013, ce qui en fait l'une des spécialités pharmaceutiques les plus coûteuses pour la sécurité sociale. L'utilisation de l'avastin pourrait ainsi lui faire économiser près de 427 millions d'euros, soit plus de 5 % du déficit de l'assurance maladie pour 2013. L'article 57 de de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 permettrait de contourner l'absence d'AMM, mise en avant par la DGS, en prévoyant la possibilité d'une recommandation temporaire d'utilisation pour raison économique. Malheureusement, les décrets d'application de cet article n'ont toujours pas été publiés. Elle lui demande donc, dans un premier temps, de publier dans les meilleurs délais les décrets d'application de l'article 57 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, afin de permettre la commercialisation de l'avastin, et dans un second temps, de faire toute la lumière sur la chaîne de décisions qui a conduit, face à deux traitements similaires, à privilégier le plus onéreux pour les finances publiques.
Certaines stratégies commerciales peuvent conduire à la commercialisation de molécules très proches sous des noms de marque différents, ce qui permet aux laboratoires d'obtenir une valorisation distincte dans différentes indications. En vie réelle, certaines firmes, par stratégie industrielle ou commerciale, ne développent pas une spécialité dans une indication donnée. Cela conduit à la présence sur le marché, dans cette indication, d'une spécialité pharmaceutique dont la position lui permet d'avoir un prix très élevé. Tel est notamment le cas de la spécialité pharmaceutique Lucentis® qui dispose de l'autorisation de mise sur le marché dans la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) et dont le coût est effectivement très élevé. Il existe une autre spécialité pharmaceutique biologiquement proche qui ne dispose pas de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) dans la DMLA. Il s'agit de la spécialité pharmaceutique Avastin® qui est prescrite et autorisée dans certains cancers, dont l'utilisation est réservée à l'hôpital. L'absence d'AMM dans cette indication (alors que Lucentis en possède une) fait normalement obstacle au remboursement d'Avastin® pour le traitement de la DMLA. La jurisprudence de la cour de justice de l'union européenne autorise désormais la prescription d'un médicament hors AMM à condition que cela réponde à des besoins spéciaux de nature médicale, à l'issue d'un examen effectif du patient par le médecin et en se fondant sur des considérations purement thérapeutiques. Aussi le gouvernement a-t-il fait adopter, en première lecture à l'assemblée nationale, un amendement dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 visant à utiliser cette nouvelle interprétation de la réglementation communautaire et l'appliquer au régime d'élaboration des recommandations temporaires d'utilisation (RTU). Il s'agit d'autoriser la prescription d'un produit hors AMM dès lors qu'il n'existe pas d'autre spécialité ayant la même substance active, le même dosage et la même forme que ceux que le médecin estime devoir prescrire pour ses patients (les deux molécules Lucentis® et Avastin® ne sont pas rigoureusement identiques). Le recours à une RTU offre des garanties de sécurité sanitaire et permet d'encadrer la préparation et la dispensation d'un produit qui est aujourd'hui inscrit dans la réserve hospitalière. Cet amendement précise également les conditions de tarification des médicaments utilisés hors de leur AMM, lorsque cet usage nécessite un reconditionnement ou une préparation spécifique qui justifie la fixation d'un prix différent de celui qui a cours dans les indications de l'AMM.
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