Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Corinne Erhel
Question N° 54657 au Ministère de l’environnement


Question soumise le 29 avril 2014

Mme Corinne Erhel attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur le projet d'extraction de sable coquillier en baie de Lannion, côte de granit rose, dans les Côtes-d'Armor et sur ses incidences locales tant écologiques que socio-économiques, compte tenu de la zone d'exploitation retenue. La demande de concession minière d'ouverture de travaux, d'exploitation et d'autorisation domaniale porte sur l'extraction de sable coquillier sur le gisement dit « Pointe-d'Armor », à proximité de réserves naturelles. (Réserve ornithologique des sept îles). Ce projet prévoit l'extraction de 600 000 tonnes de sable, durant 20 années, soit près de 345 extractions chaque année, sur une zone exceptionnelle et fragile de 4 km² et par endroit à près de 40 mètres de fond dans un secteur situé entre deux zones Natura 2000, celle de la côte de granit rose-Sept îles et celle de Morlaix, respectivement distantes de 1 km et 1,5 km du site d'extraction. Ce projet, dans sa définition, sa localisation et son périmètre, appelle plusieurs réserves légitimes. Les incidences sur la flore et sur la faune semblent avoir été insuffisamment prises en compte, comme le note un rapport de l'Ifremer à ce sujet, qui a émis un avis réservé à la demande de concession et un avis très réservé à l'autorisation d'ouverture de travaux d'exploitation. Des interrogations demeurent quant à l'existence d'une étude de courantologie spécifique au site et le panache des turbidités ainsi que sur les conséquences écologiques d'un tel projet par 40 mètres de fond pour lesquelles il ne semble pas exister d'outils fiables de mesure des effets à cette profondeur. On ne peut par ailleurs ignorer les conséquences d'un tel projet pour la biodiversité ou encore pour le littoral, l'effet de houle risquant d'être accentué par l'extraction de la dune. Là encore les études concernant l'atteinte du trait de côte sont insuffisantes. La dune de sable, ressource non renouvelable, exerce un mécanisme de protection incontestable ; en témoignent les récentes intempéries qui ont très fortement endommagé la frange littorale et ont encore davantage marqué le recul du trait de côte, inéluctablement fragilisée par la redondance et l'accélération de ces phénomènes climatiques. En outre, la zone d'extraction envisagée est une zone de pêche essentielle pour les professionnels de la pêche. Elle est en effet le refuge de nombreuses ressources halieutiques - habitat privilégié du lançon - et est donc fréquentée très régulièrement par les pêcheurs. L'activité d'extraction perturbera fortement leur activité, menaçant de nombreux emplois en mer, mais aussi à terre. Les pêcheurs professionnels et plaisanciers sont radicalement opposés à ce projet. De surcroît, la côte de granit rose fait partie des hauts-lieux constitutifs de l'image de marque de la Bretagne, en France et à l'étranger. Les activités de tourisme dans leur ensemble et notamment la plaisance et la plongée, risquent également de souffrir de ce projet. Il est à noter que le centre de plongée de Trébeurden (centre de formation professionnelle et de plongée loisirs), de renommée internationale, accueille plus de 3 500 participants chaque année et emploie 7 permanents. Convaincues de la réelle menace que constitue ce projet, les treize communes riveraines concernées et la communauté d'agglomération de Lannion (Lannion-Trégor communauté), soit plus de 50 000 habitants, ont toutes délibéré et exprimé un avis très défavorable. Ce projet fait l'objet d'une vive opposition de la part de nombreuses associations et organismes professionnels et de très nombreux citoyens rassemblés au sein du collectif "Le peuple des dunes en Trégor". La question de l'acceptabilité sociale et territoriale d'un tel projet, compte tenu du périmètre de la zone convoitée, se pose nécessairement. La prise de décision doit considérer l'ensemble des enjeux agricoles, halieutiques et de protection de l'environnement ainsi que l'incidence sur l'emploi. Elle la remercie de bien vouloir lui faire connaître sa position sur ce dossier hautement sensible.

Réponse émise le 5 juillet 2016

La demande de concession dite « Pointe d'Armor » présentée par la compagnie armoricaine de navigation (CAN) en 2009, portait sur l'exploitation d'une dune de sable coquillier dont l'épaisseur moyenne est estimée à 9 m, avec des épaisseurs pouvant aller jusqu'à 18 m. Elle visait à exploiter une surface de 4 km2, située à près de 7 km du port de Trébeurden, pour en extraire un volume de 400 000 m³ par an sur 20 ans. L'abaissement moyen de la dune aurait ainsi été de 11,5 cm par an, soit 2,25 m en fin d'exploitation, représentant donc, à l'issue de l'exploitation, une diminution d'environ un quart de l'épaisseur de la dune. Bien que la demande initiale sollicitait une autorisation d'extraction de 400 000 m³ par an sur 20 ans, afin de réduire l'empreinte du projet, il a été convenu de limiter la durée de la concession. Concernant la pêche et l'importance halieutique de la zone, pour prendre en compte les éventuelles périodes de grandes sensibilités du lançon, poisson inféodé au site et entrant dans la chaîne alimentaire de certaines espèces d'oiseaux ayant justifié la désignation du site Natura 2000 "Côte de Granit rose – Sept-Îles", il a paru approprié d'interdire toute activité d'extraction entre le 1er mai et le 31 août. Un arrêté inter-préfectoral a institué une commission de suivi, d'information et concertation réunissant les parties prenantes, devant laquelle l'exploitant rendra compte à l'issue de chaque année d'exploitation de son activité et des suivis environnementaux. Le Gouvernement se réserve le droit de réexaminer à tout moment l'autorisation. La plus grande vigilance a été demandée au préfet du Finistère dans le suivi de cette activité, rappelant en particulier qu'il est impératif de prévenir toute atteinte aux intérêts d'importance communautaire qui ont justifié la création des sites Natura 2000, et lui demandant de veiller à ce que l'étude sur le lançon soit conduite dans les meilleurs délais.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion