Mme Eva Sas attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur la suite donnée au projet de liaison des autoroutes A28-A13, dit contournement est de Rouen. Alors que les réunions de concertation sur le contournement est de Rouen sont en cours, il apparaît clairement aujourd'hui que ce projet présente de lourds inconvénients et des coûts démesurés. Dans un premier temps, de nombreux aménagements routiers ont déjà eu lieu dans ce secteur, tels que l'achèvement de l'A28 et celui de l'A29, la création d'une déviation des communes de Pont de l'Arche et les Damps à partir de l'échangeur de Criquebeuf sur l'A13, la mise en service du pont Flaubert côté port de commerce de Rouen, la création de la rocade sud D418 au sud-ouest de Rouen depuis la N338 vers le rond-point des Vaches et la RD18E ou encore l'élargissement de l'A13 à partir de la sortie 22 pour améliorer la fluidité du trafic pour rejoindre directement Rouen par l'ouest. Ces aménagements, combinés avec l'A150/A151, seront connectés avec l'A29, et permettront donc de constituer un véritable « contournement ouest de Rouen » entre l'A28 au Nord et l'A13 au sud de Rouen. L'écart de kilométrage entre le tracé de liaison A28-A13 par l'est de Rouen et celui de ce « contournement ouest de Rouen » découlant des derniers aménagements, ne représente qu'un gain d'une dizaine de kilomètres. Dans un second temps, les prévisions d'évolution de flux de trafic ne sont pas conformes aux observations actuelles. Lors du débat public de 2005, la Direction territoriale Normandie-Centre affirmait que le contournement est permettrait de délester le trafic sur le pont Mathilde de 15 %. Selon les chiffres fournis par le département de Seine-Maritime et par les services de l'État, en 2012, il passait sur ce pont 80 000 véhicules par jour. Or depuis, les services de la communauté d'agglomération Rouen Elbeuf Austreberthe (CREA) ont noté une augmentation d'environ 15 000 voyageurs par jour dans les transports collectifs du réseau de l'agglomération, ce qui correspond à une baisse parallèle d'environ 15 000 véhicules par jour circulant dans l'agglomération. Le principal argument des acteurs économiques et politiques soutenant le projet de contournement est qu'il permettrait de débarrasser le centre-ville des flux de poids-lourds. Or selon les chiffres fournis par la Direction territoriale Normandie-Centre, en 2003 le trafic de transit ne constituait que 1,2 % des flux totaux traversant l'agglomération ! De plus le contournement dans sa version est n'est pas une réponse appropriée à la traversée de l'agglomération par les camions transportant des matières dangereuses, puisque la plupart des industries et sites SEVESO sont situés à l'ouest de la ville. Dans un troisième temps, des impacts environnementaux et sanitaires très lourds découleront de la réalisation de ce projet. La réalisation de cette infrastructure, outre son impact foncier très important qui conduirait à détruire des centaines d'hectares de terres agricoles très fertiles, induirait des ruptures de continuités écologiques (trames verte et bleue) dans différentes zones naturelles de Haute-Normandie. Les impacts globaux sur les captages d'eau seraient aussi importants, du fait de l'état dégradé des bassins d'alimentation en eau potable de l'agglomération rouennaise et des risques supplémentaires engendrés par cette infrastructure sur les zones sensibles. D'autant plus que, selon l'association air normand qui mesure la qualité de l'air, la fermeture du pont Mathilde, n'a pas eu pour conséquence de baisser la concentration en oxydes d'azote, alors que les poids lourds n'ont plus le droit de circuler dans l'agglomération. L'argument principal des défenseurs du contournement prétextant une baisse des émissions en excluant le flux de transit à l'extérieur de Rouen n'est donc pas valable. Dans un dernier temps, le coût envisagé par cette infrastructure a quasiment triplé depuis le débat public. Initialement établi à 380 millions pour l'ensemble de l'itinéraire en 2005, le projet est actuellement évalué à 1,05 milliard d'euros et sera nécessairement réévalué à la hausse. Il resterait ainsi 25 % du coût total à charge des collectivités locales. Elle l'interroge donc sur ses intentions concernant ce dossier dans le cadre de l'ambition réaffirmée du Gouvernement d'inscrire le pays dans la transition énergétique.
Au préalable, le secrétaire d'État tient à rappeler qu'un grand débat public s'est tenu en 2005 et a conclu sur l'opportunité de l'aménagement. À la suite de ce débat public, de riches et longs débats ont eu lieu pour dégager le meilleur tracé en tenant compte de tous les points de vues exprimés, avec notamment le critère essentiel de l'environnement et de la protection des espèces protégées. Le travail exemplaire des services de l'État, en lien avec les collectivités, dans leur très grande majorité fortement attachées à ce projet, ont permis de retenir la variante qui satisfait naturellement les contraintes environnementales et remplit au mieux les objectifs de l'ouvrage. La Commission nationale du débat public a ensuite été saisie de nouveau en 2013 pour ce projet. Celle-ci a recommandé de mener une concertation avec le public, qui a eu lieu du 2 juin au 12 juillet 2014. La concertation a donné lieu à l'organisation de neuf réunions publiques, suscité un vif intérêt et a permis à toutes les personnes concernées de s'exprimer librement et sur tous les sujets, notamment ceux relatifs aux trafics, sous l'égide d'un garant indépendant comme cela est de règle. Ainsi, la concertation a consacré une place importante aux enjeux et objectifs de cette nouvelle infrastructure dont il faut rappeler les principaux points. La situation routière sur l'agglomération de Rouen est très dégradée. La congestion et la pollution qu'elle engendre sont néfastes pour la qualité de vie de ses habitants et son développement économique. L'un des objectifs du projet est d'écarter les flux poids lourds, en transit et en échange, du coeur de l'agglomération rouennaise et des pénétrantes routières qui y convergent. Il s'inscrit dans un schéma global de transports à l'échelle de la région qui vise au développement du transport par rail par la modernisation de la ligne de fret entre Serqueux et Gisors et la ligne nouvelle Paris-Normandie et à l'amélioration des transports en commun urbains sur des axes libérés du trafic de transit. Le Gouvernement est attentif à l'intégration de cette infrastructure routière dans un projet d'aménagement global, lui-même inscrit dans un projet de territoire qui stimule le développement économique d'une métropole de 500 000 habitants et accompagne l'évolution d'un des grands ports maritimes de France, par ailleurs premier port céréalier d'Europe. Concernant les impacts environnementaux et sanitaires, le Gouvernement sera attentif à ce que la concertation avec tous les acteurs des territoires concernés ainsi que les associations locales et environnementales se poursuive tout au long de l'avancement du projet. C'est là un engagement fort du Gouvernement qui a fait l'objet de consignes très précises données au préfet de région. Une attention toute particulière sera portée à la rigueur, à la transparence et à la qualité des études préalables à la déclaration d'utilité publique, notamment en matière environnementale et d'insertion dans le milieu humain. L'enquête publique, prévue en 2016, sera l'occasion pour toutes les parties prenantes au projet de s'exprimer à nouveau sur celui-ci. Concernant enfin le financement, le principe présenté lors de la concertation est celui d'une concession accompagnée d'une subvention d'équilibre qui sera, comme il est de règle, apportée par l'État et les collectivités volontaires. Le besoin de la subvention publique et les modalités de financement de cette opération seront calculés et précisés lors de la procédure d'appel d'offres.
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