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Nathalie Kosciusko-Morizet
Question N° 62919 au Ministère des affaires sociales


Question soumise le 12 août 2014

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet alerte de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation préoccupante du réacteur Osiris, réacteur nucléaire de recherche français du CEA de Saclay. Mis en service en 1966, ce réacteur est désormais en attente d'une décision du Gouvernement quant à son arrêt ou non à la fin de l'année 2015. Le réacteur a connu des travaux importants pour tenir jusqu'à cette date le temps de la construction du réacteur Jules-Horovitz du CEA de Cadarache qui doit prendre le relais, mais ce dernier ne sera opérationnel qu'en 2018-2020. Les incertitudes qui pèsent sur l'avenir du réacteur Osiris alimentent une inquiétude grandissante sur le futur de la production de radio-isotopes (notamment le technétium 99) indispensables à la réalisation de scintigraphies. Ces examens permettent la détection de cancers, mais aussi de pathologies osseuses et cardiaques. Seuls 9 réacteurs produisent cet isotope radioactif au niveau mondial : certains nécessitent d'importants travaux en raison de leur ancienneté, d'autres ferment définitivement comme les deux très gros réacteurs belge et canadien. L'académie nationale de médecine a précisé récemment qu'une pénurie de technétium 99 est prévisible à court terme, avec une période critique de 2016 à 2018. Or, une fermeture précipitée du réacteur de Saclay risque d'entraîner cette pénurie d'ici à la mise en service de son relayeur. Le CEA ne dispose en effet de combustible que pour la fin 2015 et pour continuer à fonctionner, il devrait procéder à une commande immédiate compte-tenu d'un délai de fabrication de 18 mois. Enfin, sans décision du Gouvernement à un an et demi de sa fermeture probable, le personnel de l'installation craint d'être dispersé dans d'autres services. Aussi, elle alerte le Gouvernement sur l'urgence d'une décision rapide et demande quelles mesures il compte prendre afin d'assurer une production pérenne de technétium 99.

Réponse émise le 10 mars 2015

Les isotopes radioactifs ou radionucléides sont utilisés en médecine nucléaire pour diagnostiquer et, dans une moindre mesure, traiter différentes maladies. Actuellement, l'essentiel de l'activité diagnostique en médecine nucléaire repose sur deux techniques d'imagerie, la scintigraphie et la tomoscintigraphie par émission de positons (TEP), la plus récente et la plus performante des modalités d'imagerie médicale. Le technétium-99 métastable (99m Tc) est l'isotope le plus utilisé en médecine nucléaire pour les scintigraphies. La TEP n'en utilise pas. Concernant l'approvisionnement en 99mTc, le marché français actuel dépend déjà essentiellement de la production de cibles de 99Mo par le réacteur néerlandais de Petten (50 %) et le réacteur belge BR2 (30 %). L'approvisionnement en générateurs de 99Mo/99mTc repose ainsi sur un réseau robuste : les réacteurs HFR en Hollande, BR-2 en Belgique, LVR-15 en Tchéquie, Maria en Pologne, Safari en Afrique du Sud, OPAL en Australie. Concernant les arrêts programmés de réacteurs au cours des deux prochaines années, il peut être précisé que l'arrêt du réacteur NRU au Canada est prévu fin 2016, celui du réacteur français Osiris pour fin 2015 et le réacteur BR2 en Belgique qui devait débuter une maintenance importante en décembre 2014 pour une reprise en avril 2016. Le réacteur allemand FRM II, en service depuis 2004, devrait commencer à produire du 99Mo à compter de 2016 et pourrait satisfaire entre 25 % et 50 % des besoins européens en 99Mo. Aussi, la bonne coordination des arrêts programmés des réacteurs réalisée dès à présent par l'AIPES (association de producteurs qui assure la coordination des arrêts et maintenances des réacteurs) devrait permettre d'assurer une continuité d'approvisionnement satisfaisante. La « crise du 99mTc », survenue en 2008, puis de nouveau en 2010, avait été causée par l'arrêt simultané des deux principaux réacteurs producteurs de molybdène : NRU au Canada, qui représentait 43 % de la production mondiale, et le HFR en Hollande qui représentait 30 % de la production mondiale. Pendant six mois, de février à août 2010, l'approvisionnement mondial a été réduit de près de 73 %. Toutefois, la bonne coordination et la régulation entre les plannings de maintenance et la surcapacité de production des autres réacteurs ont permis de passer la période de pénurie sans réelle difficulté de prise en charge pour les patients dans les services de médecine nucléaire. Complémentairement, les autorités de santé avaient rapidement mis en place un dispositif pour assurer le maintien de la distribution du 99Mo/99mTc aux 220 centres de médecine nucléaire français, permettant de garantir les examens scintigraphiques urgents ou pour lesquels il n'existait pas d'alternative. L'analyse des données de disponibilité prévisible du 99mTc dans la période 2016-2018 montre qu'il ne devrait pas y avoir de tension sur l'approvisionnement en 99Mo/99mTc. En tout état de cause, la carence serait très certainement moindre qu'en 2008 et en 2010, du fait de l'arrivée en production du réacteur allemand FRM II et de la meilleure utilisation et optimisation de la ressource en 99mTc, grâce à l'expérience acquise et à des améliorations techniques (gamma-caméras dédiées à la scintigraphie du myocarde nécessitant une activité moindre de 99mTc). De plus, en cas de tension sur l'approvisionnement (moins de 50 % de la demande étant disponible), l'agence française de sécurité sanitaire du médicament et des produits de la santé (ANSM) et la direction générale de la santé remettront en action le dispositif institué en 2008 puis 2010, ayant pour but de maintenir un approvisionnement pour les seuls examens scintigraphiques pour lesquels il n'existe pas de substitution, lesquels représentent actuellement 11 % des examens. L'anticipation d'une possible carence conduit en outre à favoriser dès maintenant la transition de la scintigraphie vers la TEP, dont les performances diagnostiques sont supérieures dans tous les cas où elle constitue une alternative.

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