M. Gabriel Serville attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation préoccupante de l'illettrisme en Guyane. Selon l'INSEE, 20 % de la population guyanaise primo-scolarisée est touchée, ce qui signifie qu'un Guyanais sur cinq étant allé à l'école souffre d'illettrisme. C'est trois fois plus qu'en hexagone. Pire, 40 % des Guyanais de plus de 16 ans connaissent des difficultés graves ou importantes face aux fondamentaux de l'écrit. Or le programme régional d'éducation et de formation de base réunissant État, collectivités, centres de formation et partenaires institutionnels est arrivé à son terme fin 2013 et n'a pour l'instant pas été reconduit, malgré des résultats probants salués par l'ensemble des acteurs. Aussi, il apparaît urgent de faire de la lutte contre l'illettrisme et l'analphabétisme en Guyane une priorité absolue, surtout lorsque l'on connaît les très mauvais chiffres du chômage local (23 % de la population active, près de 55 % des moins de 25 ans) et le faible niveau de qualification moyen des actifs guyanais. Il lui demande donc de bien vouloir l'éclairer sur les programmes et moyens mis en place et envisagés par le Gouvernement afin de lutter efficacement et de façon pérenne contre le fléau qu'est l'illettrisme et offrir ainsi aux Guyanais les mêmes conditions de réussite et d'épanouissement que l'ensemble des Français.
La maîtrise de la langue et la compréhension de l'écrit sont une priorité en Guyane pour notre gouvernement. Tous les élèves doivent pouvoir acquérir les compétences fondamentales nécessaires pour accéder au savoir, à la culture, à l'emploi, à la formation professionnelle, à l'épanouissement personnel et à l'estime de soi, et participer ainsi pleinement et sereinement à la vie sociale et démocratique. Comme vous le savez, la population guyanaise se distingue par la pluralité culturelle liée à la diversité de la population : 80 ethnies différentes dont la langue française n'est pas la langue maternelle sont présentes sur le territoire et une vingtaine de langues sont parlées en Guyane. 80 % des élèves sont socialisés dans une autre langue que la langue française et un élève sur deux rencontre des difficultés liées à la maîtrise de la langue française. Cela n'est évidemment pas sans conséquence sur les poursuites d'études et l'insertion professionnelle et donc le taux de chômage. Au second trimestre 2013, le taux de chômage en Guyane s'élevait à 21,3 %, chiffre relativement stable depuis 5 ans. La population la plus touchée est la catégorie des moins de 25 ans avec un taux de 44,8 %. Mais, parmi ceux-ci, les plus diplômés intègrent plus facilement un emploi : 5,5 % seulement des diplômés du supérieur se retrouvent au chômage alors que 35,2 % des Guyanais sans aucun diplôme se retrouvent au chômage, 21,8 % des titulaires d'un BEP ou CAP et 11,7 % des bacheliers sont chômeurs (INSEE n° 104 avril 2014). Le diplôme reste ainsi la meilleure protection contre le chômage. C'est pourquoi la refondation de l'école de la République, qui est d'abord une réforme pédagogique, vise à agir très tôt pour garantir des apprentissages plus solides et plus durables et prévenir ainsi le risque d'illettrisme. Elle comprend différentes mesures destinées à agir sur le coeur des apprentissages. Une formation de qualité a été restaurée pour les enseignants après des années difficiles. La priorité a été donnée à l'école primaire, notamment avec le dispositif « plus de maîtres que de classes » et la scolarisation des enfants de moins de trois ans, en priorité en éducation prioritaire. Les missions de l'école maternelle ont été redéfinies, dans le cadre d'un cycle unique pour favoriser l'appropriation du langage, la découverte de l'écrit, le développement du vocabulaire grâce à la fréquentation de textes de qualité pour donner le goût de la lecture. La redéfinition des cycles, le conseil école-collège, le conseil de cycle et le conseil pédagogique visent à renforcer la continuité des apprentissages. Le collège unique va être rénové pour proposer des réponses adaptées et plus diversifiées aux besoins des élèves et lutter ainsi contre le décrochage. Le conseil supérieur des programmes (CSP) a été saisi pour redéfinir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture et les programmes d'enseignement, et une large consultation des personnels est engagée sur le projet de socle. Une réflexion est en cours sur l'évaluation, afin que celle-ci, exigeante et bienveillante, soit un levier au service de la réussite de tous les élèves, en leur redonnant confiance et estime de soi. Enfin, la refondation de l'éducation prioritaire est un levier qui doit permettre de réduire les écarts de performance des élèves, notamment dans l'acquisition de la langue française, orale et écrite, et de les mener à l'obtention de diplômes reconnus par les différents secteurs d'activités. 102 réseaux d'éducation prioritaire (REP+) préfigurateurs ont été mis en place à la rentrée 2014 dont 4 en Guyane. 350 REP+ supplémentaires seront déployés à la rentrée 2015 et 732 REP. Pour la Guyane, ce sont 18 REP+ et 10 REP, soit la quasi-totalité des collèges de l'académie qui sera intégrée à cette nouvelle éducation prioritaire. Cette nouvelle carte des réseaux, c'est plus de justice sociale, des moyens humains et financiers supplémentaires au service de la réussite des élèves. L'année 2013 a également permis l'élaboration d'un plan national de principes et d'actions pour prévenir l'illettrisme dans le cadre de la « Grande cause nationale ». Celui-ci se compose de trois outils accessibles en ligne sur le site Eduscol : - la circulaire « Prévenir l'illettrisme » qui vise à mieux sensibiliser et informer les équipes éducatives, consolider le pilotage du réseau « maîtrise de la langue », renforcer le lien entre l'école et les familles et développer les partenariats ; - le kit pédagogique pour développer les actions éducatives familiales qui proposent aux parents une réconciliation avec l'écrit, leur permettant ainsi de mieux accompagner la scolarité de leur enfant ; car, agir contre l'illettrisme, c'est aussi s'inscrire dans le cadre plus large de la formation professionnelle tout au long de la vie ; - le cadre national de principes et d'actions pour prévenir l'illettrisme, signé avec les partenaires associatifs et quelques fondations. Un séminaire inscrit au plan national de formation a eu lieu le 26 septembre dernier. Il a réuni l'ensemble des acteurs concernés et contribué à la mutualisation de connaissances et de pratiques, afin de renforcer l'articulation de l'action de chacun, au service des enfants et des jeunes.
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