M. Jean-Paul Chanteguet appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés résultant de l'application conjointe de divers textes en matière d'élections dans les communes de plus de 1 000 habitants. En effet, lorsqu'une liste de candidats comporte une personne ressortissant d'un état membre de la communauté européenne, mention doit être faite de la nationalité de ce candidat sur le bulletin de vote et ce à peine de nullité du bulletin de vote. Suite aux dernières élections municipales, plusieurs scrutins ont été annulés par des tribunaux administratifs et le Conseil d'État. Les réclamations ont été déposées par les listes à l'origine de l'irrégularité et qui ont été battues. Les résultats qui s'en sont suivis ont parfois été surprenants et à l'opposé de ceux initialement constatés. Aussi, il lui demande donc, afin d'éviter toute démarche abusive et intentionnelle en ce sens, s'il ne serait pas envisageable de modifier la législation avec pour effet de dire que l'irrégularité provenant de l'absence de mention de la nationalité étrangère d'un candidat a pour conséquence non l'annulation du bulletin de vote et donc de l'ensemble de la liste mais uniquement l'inéligibilité personnelle du candidat concerné.
Aux termes de l'article L.O. 247-1 du code électoral, dans les communes de 1 000 habitants et plus, l'indication de la nationalité d'un candidat ressortissant d'un Etat membre autre que la France constitue une mention obligatoire sur le bulletin de vote d'une liste candidate aux élections municipales et où figure le ressortissant précité. En application de ces dispositions, la violation de « cette règle de présentation matérielle à caractère substantiel » constitue un motif de nullité du bulletin de vote incriminé (décision no 239707 du Conseil d'Etat en date du 29 juillet 2002). L'article L.O. 247-1 a été modifié par la loi organique no 2013-402 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux afin de tenir compte de l'abaissement du seuil à partir duquel les conseillers municipaux sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours (1 000 habitants au lieu de 3 500 habitants). Toutefois, l'obligation fixée à l'article L.O. 247-1 est issue d'un amendement sénatorial déposé lors de l'examen de la loi organique no 98-404 du 25 mai 1998 qui déterminait à la fois les conditions d'application de l'article 88-3 de la Constitution française et transposait la directive 94/80/CE du 19 décembre 1994 suite à la reconnaissance du droit de vote et d'éligibilité des ressortissants communautaires aux élections municipales. Cet article a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans une décision no 98-400 DC du 20 mai 1998 relative à la loi précitée, en ce que l'indication de la nationalité du ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne autre que la France sur un bulletin de vote n'est pas contraire au principe de non-discrimination. En outre, le législateur a toujours considéré que les électeurs devaient être informés de la nationalité des candidats qu'ils sont appelés à désigner pour gérer et diriger leur commune dans la mesure où les ressortissants communautaires d'un Etat membre autre que la France élus conseillers municipaux sont notamment inéligibles au mandat de maire et d'adjoint et ne peuvent prendre part à l'élection des sénateurs. Cette exigence d'information a été confirmée récemment dans une décision no 2013-668 DC du 16 mai 2013 relative à la loi organique relative à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux dans laquelle le Conseil constitutionnel a souligné que « de telles mentions sont nécessaires à l'information des électeurs dès lors que les conseillers municipaux n'ayant pas la nationalité française ne peuvent ni, en vertu de l'article L.O. 2122-4-1 du code général des collectivités territoriales, exercer des fonctions communales exécutives, ni, en vertu de l'article L.O. 286-1 du code électoral, participer à l'élection des sénateurs ». Enfin, le juge de l'élection rappelle « que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la mention de la nationalité du candidat aux élections municipales ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne autre que la France est nécessaire à l'information des électeurs » et par conséquent que « l'omission de l'indication de la nationalité sur les bulletins de vote des candidats ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne autre que la France entache, à elle seule, ces bulletins de nullité » (décision du Conseil d'Etat no 239083 du 12 juillet 2002). Il n'est par conséquent pas envisagé actuellement de modifier l'article L.O. 247-1 du code électoral.
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