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Laurence Arribagé
Question N° 67608 au Ministère de la culture


Question soumise le 28 octobre 2014

Mme Laurence Arribagé attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les crédits budgétaires d'aides à la presse dont le montant alloué en 2015 va représenter un peu plus de 260 millions d'euros, ce qui est conséquent. Mais, si de nombreux organes de presse ont besoin de cette aide vitale, certains d'entre eux appartiennent à des grands groupes cotés qui font des bénéfices et distribuent chaque année des dividendes significatifs. À titre d'exemple, un grand conglomérat, dont le premier actionnaire est un fonds étranger, a distribué en 2013 et en 2014 deux milliards d'euros de dividendes alors qu'il a perçu plusieurs dizaines de millions d'euros d'aides à la presse et notamment d'aides au portage. En l'espèce, nos concitoyens qui font face à une pression fiscale de grande ampleur peuvent légitiment s'interroger sur la pertinence, la répartition, l'efficience et le ciblage de ces aides à un groupe qui n'en a manifestement aucun besoin. Naturellement il n'est pas question de remettre en cause des aides qui permettent de bénéficier d'une presse pluraliste et de qualité, mais il conviendrait de prendre en considération la nature et les contraintes économiques des organes de presse mais également de leurs propriétaires afin que les impôts de nos concitoyens n'alimentent pas en dividendes les actionnaires de groupes privés cotés. Aussi, faut-il s'interroger sur la possibilité de conditionner la perception définitive de ces aides à la non-distribution de dividendes ou à la distribution d'un montant plafonné de dividendes correspondant, par exemple, à 50 % des aides obtenues. Au-delà, il conviendrait que les groupes cotés, détenteurs d'organes de presse, remboursent les aides attribuées qui viendraient alors abonder un « fonds d'urgence presse » qui pourrait être mobilisé pour accroître l'aide au profit d'organes de presse en situation économique précaire et/ou pour allotir de façon additionnelle et proportionnelle tous les autres bénéficiaires d'aides à la presse. Elle lui demande, en conséquence, les mesures qu'elle entend prendre en ce sens afin de mieux répartir les aides à la presse.

Réponse émise le 20 janvier 2015

Les aides publiques à la presse ont pour objet de favoriser le pluralisme de la presse écrite en France. Afin d'éviter toute interférence des pouvoirs publics, d'une part quant au contenu des titres, d'autre part quant à leur propriété et à leurs formes d'organisation, ces aides sont octroyées sur la base de critères objectifs et publics. C'est dans ce cadre général que s'inscrit la politique que le Gouvernement entend mener. Elle vise à renforcer l'efficacité des aides, à éviter tout effet d'aubaine, toute déperdition de moyens publics devant venir à l'appui de l'activité de presse elle-même et pour ainsi contribuer effectivement à consolider la diversité du paysage de la presse. Plusieurs mesures récentes vont ainsi dans le sens souhaité par la députée. Un dispositif de conventions-cadres a été institué par le décret n° 2012-484 du 13 avril 2012 et récemment renforcé par le décret n° 2014-659 du 23 juin 2014. Il fait désormais obligation aux principaux groupes de presse bénéficiaires des aides de l'État, de souscrire une convention triennale avec le ministère de la culture et de la communication. Il s'agit, notamment, des groupes ayant reçu, pour un ou plusieurs de leurs titres, plus d'un million d'euros d'aide en moyenne sur les trois années écoulées. Ce dispositif permet ainsi d'appréhender la consistance des principaux groupes de presse, de prendre connaissance de leur stratégie, et de se voir communiquer chaque année leurs données comptables. En outre, la liste des bénéficiaires des aides publiques à la presse et les montants octroyés sont publiés annuellement depuis 2013, aide directe par aide directe. La liste des 200 principaux bénéficiaires, toutes aides confondues, a été publiée pour la première fois en 2014. Cette mesure de transparence, également instituée par le décret du 13 avril 2012, permet à tous, élus et citoyens, de prendre connaissance des résultats de la politique publique de soutien à la presse écrite. Par ailleurs, le décret du 23 juin 2014 est venu réformer le fonds d'aide à la presse hebdomadaire régionale et locale (PHR) institué par le décret n° 2004-1312 du 26 novembre 2004. Cette aide vise à concourir au pluralisme de la presse au niveau local en venant appuyer cette famille spécifique de presse. À partir de 2014, le soutien total reçu par un même groupe de presse (au sens du code de commerce) au titre de l'aide à la PHR est plafonné à 35 % des crédits alloués en 2014, puis 30 % en 2015, puis 25 % en 2016. Enfin, certaines mesures pourraient être introduites prochainement pour encourager les entreprises de presse à améliorer leurs fonds propres en limitant la distribution de dividendes. Une proposition de loi déposée par Monsieur Michel Françaix et le groupe socialiste, républicain et citoyen introduit ainsi le statut d'entreprise solidaire de presse d'information, qui concerne les publications imprimées ou en ligne d'information politique et générale, et se caractérise notamment par la constitution de réserves (réserve statutaire obligatoire de 20 % au moins des bénéfices de l'exercice, affectation d'au moins 50 % des bénéfices au report bénéficiaire et à cette réserve obligatoire). Cette proposition de loi a été adoptée, en première lecture, par l'Assemblée nationale le 17 décembre dernier. Le Gouvernement étudie également la possibilité d'encourager la création d'entreprises citoyennes de presse d'information par des dispositifs incitatifs, par exemple fiscaux.

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