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Frédéric Barbier
Question N° 7485 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 23 octobre 2012

M. Frédéric Barbier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la récente décision de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG), en Suisse, d'enregistrer l'absinthe, la fée verte et la bleue comme indication géographique protégée (IGP), déposée par les producteurs d'absinthe suisses du Val de Travers. Si la décision de l'OFAG était validée, il serait impossible aux opérateurs français de commercialiser de l'absinthe non seulement sur le territoire suisse, mais aussi sur le territoire de tout pays ayant reconnu cette indication géographique suisse dans le cadre d'accords internationaux. Le danger serait aggravé en cas de reconnaissance européenne de cette IGP. L'absinthe ne pourrait être fabriquée et commercialisée ailleurs que dans cette petite région de Suisse alors qu'il existe d'autres producteurs en France, en Suisse, en Europe et même aux États-unis, qui ont fait recours en vain contre cette décision. Cette situation fait notamment courir un risque majeur aux producteurs d'absinthe de Pontarlier, ville limitrophe du Val de Travers, qui œuvrent depuis des années à la reconnaissance de ce produit et qui ont par ailleurs déposé un dossier IGP « absinthe de Pontarlier », actuellement en cours d'instruction à l'INAO. Cette décision est d'autant plus regrettable que la France et la Suisse viennent de lancer une opération dénommée « route de l'Absinthe » associant distilleries et restaurants suisses et français. La chambre d'agriculture du Doubs, la fédération française de spiritueux et les producteurs français sont soucieux de défendre un des éléments de notre patrimoine gastronomique. Alors que si les producteurs suisses orientaient leur identification vers une IGP suisse « Val de Travers », cette IGP serait non seulement approuvée mais encouragée par les producteurs européens. Aussi souhaite-t-il connaître la position du Gouvernement sur ce sujet.

Réponse émise le 18 décembre 2012

Par décision du 14 août 2012, l'office fédéral de l'agriculture suisse a inscrit l'absinthe, la Fée verte et La Bleue (ces deux derniers termes étant des synonymes du mot « absinthe ») au registre national suisse des indications géographiques (IG), à la suite de la demande des producteurs du Val-de-Travers. Prenant en compte les différentes étapes possibles de recours et d'échanges d'écriture dans la procédure conduite auprès du tribunal administratif (la fédération française des spiritueux y a déposé un recours le 13 septembre 2012) puis du tribunal fédéral, la décision finale effective de reconnaissance ne devrait pas intervenir avant deux ans. Une telle décision interdirait tout export vers la Suisse d'absinthe française sous la dénomination « absinthe de Pontarlier » ou même « absinthe ». La décision suisse n'a cependant pas d'impact direct sur la production et la commercialisation d'absinthe sur le territoire national, communautaire ou pour les autres pays tiers. Conscientes des enjeux importants quant aux éventuelles futures obstructions des exports français, les autorités françaises mettent tout en oeuvre pour que la définition d'une catégorie de spiritueux dénommée « absinthe » soit créée dans les meilleurs délais au niveau communautaire. S'agissant d'une règle technique, le projet de texte a été notifié par la Commission européenne au secrétariat de l'organisation mondiale du commerce (OMC), conformément à l'accord sur les obstacles techniques au commerce, le 27 septembre 2012. Toute partie intéressée dispose d'un délai de 60 jours pour présenter des observations. Les autorités françaises ayant signalé l'urgence à agir auprès de la Commission européenne (CE), le projet de règlement devrait être soumis pour vote le 3 décembre 2012. Après adoption par le Comité européen des boissons spiritueuses et à l'issue d'un délai de trois mois maximum au cours duquel le parlement et le conseil exercent leur droit de contrôle, le nouveau règlement pourra être publié. La publication de ce règlement permettra d'acter l'utilisation d'une dénomination « absinthe » pour les producteurs de l'Union européenne (UE). Par ailleurs, les signes d'identification de la qualité et de l'origine représentent une valeur ajoutée très importante pour la filière vins et spiritueux et occupent une place prépondérante en valeur à l'export. La reconnaissance et la protection des IG sont donc une priorité du Gouvernement, la France étant historiquement l'un des pays moteur au sein de l'UE pour promouvoir notre système d'IG dans l'Union et les pays tiers. Aussi, en ce qui concerne les producteurs d'absinthe de Pontarlier, à la suite d'une demande déposée en 2010, et après l'abrogation de la loi de 1915 qui interdisait jusque-là la commercialisation de l'absinthe en France, l'IG « absinthe de Pontarlier » a été reconnue par le comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l'institut national de l'origine et de la qualité (INAO). Ainsi, dès que le plan de contrôle accompagnant le dossier de reconnaissance de l'absinthe de Pontarlier aura été instruit et validé, les autorités françaises, avec l'appui de l'INAO, vont prendre un arrêté de reconnaissance de l'absinthe de Pontarlier, qui sera ensuite notifié à la CE. Ces avancées au niveau communautaire doivent permettre aux producteurs français de conserver la possibilité d'utiliser le terme absinthe.

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