M. Michel Heinrich appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur les difficultés posées par l'application du compte pénibilité en particulier dans le secteur du BTP. Il l'a d'ailleurs signalé à plusieurs reprises mais en vain. Cependant, ces dispositions votées dans la loi du 13 Janvier 2014 sont applicables au 1er janvier 2016. Or, les entreprises du BTP ne seront pas en mesure de respecter la loi à cette date malgré leur volonté de faire au mieux. Elles ne contestent pourtant pas l'existence de tâches physiquement difficiles. C'est d'ailleurs pourquoi elles ont pris de nombreuses mesures en matière de prévention, comme la signature d'un accord dès 2011 sur « la prévention, la pénibilité et l'amélioration des conditions de travail ». Elles avaient même envisagé avant le vote de la loi, un accord avec les partenaires sociaux sur l'aménagement et la fin de carrière de leurs salariés. Mais la fiche d'évaluation des risques que vont devoir remplir les chefs d'entreprise en particulier, est selon eux, impossible à établir, car, contrairement à ce qui a été annoncé, l'évaluation devra bien faire l'objet d'un suivi régulier et quotidien pour être fidèle à la réalité. En outre, le logiciel annoncé pour produire la fiche avec les payes n'existe toujours pas. Aussi les entreprises du secteur ne seront-elles pas prêtes à appliquer les textes dès janvier 2016. C'est pourquoi les responsables du BTP sollicitent la suppression de la fiche au profit de la constitution d'une commission de médecins chargée d'évaluer l'exposition des salariés aux facteurs de pénibilité de leurs métiers. Il souhaiterait connaître ses intentions à ce sujet.
Afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites, le gouvernement s'est engagé, et c'est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail. Elle passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente, à cet égard, une avancée sociale essentielle. Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, la priorité du Gouvernement a été de privilégier des solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits. A la suite de la concertation conduite par Michel de Virville, les textes d'application de la loi, publiés le 10 octobre 2014, ont retenu des modalités de mise en oeuvre visant à simplifier, sécuriser juridiquement le dispositif et à en réduire le coût pour les entreprises. Ils mettent en oeuvre les propositions issues de la concertation : annualisation des seuils, déclaration et versement des cotisations uniques en fin d'année, dématérialisation et simplification de la fiche de pénibilité, calendrier très progressif de montée en charge des cotisations. Par ailleurs, en réponse aux inquiétudes exprimées par les chefs d'entreprise, le Gouvernement a décidé une mise en oeuvre progressive du compte : seuls 4 facteurs de pénibilité, les plus simples à identifier, entrent en vigueur le 1er janvier 2015. Pour les 6 autres facteurs, l'entrée en vigueur est reportée au 1er janvier 2016. Afin de veiller à l'appropriation de ce dispositif nouveau, en levant ce qui pourrait faire obstacle à sa mise en oeuvre effective et à la création des droits attendus par les salariés concernés, et afin que les inquiétudes exprimées par beaucoup de chefs d'entreprise puissent trouver un apaisement par un effort supplémentaire de simplification et d'accompagnement, deux missions sont invitées à formuler des propositions au Gouvernement. Une mission, confiée par le Premier ministre à Monsieur Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire et à Monsieur Gérard Huot, chef d'entreprise, formulera notamment, d'ici juin 2015, des propositions sur l'équilibre à trouver entre la définition et le suivi individuel de l'exposition aux facteurs de pénibilité et des appréciations plus collectives des situations de pénibilité, plus simples à suivre pour les entreprises, notamment les TPE et PME. Cette mission s'articulera avec celle confiée à Monsieur Michel de Virville, Conseiller-maître honoraire à la cour des comptes, qui mènera quant à lui une mission d'appui aux branches professionnelles pour l'élaboration, au cours de l'année 2015, de leurs « modes d'emploi », qui permettront de définir, dans un contexte et un vocabulaire propres aux divers métiers, des modalités adaptées de recensement des expositions, voire des situations types d'exposition. De l'avis de l'ensemble des parties prenantes, ces modes d'emploi faciliteront, simplifieront et sécuriseront les démarches des entreprises, notamment des plus petites. Un rapport d'étape sera rendu d'ici l'été 2015. Les propositions de ces deux missions, ainsi que les travaux des branches professionnelles, permettront au Gouvernement de préparer les règles d'application pour les facteurs qui entreront en vigueur le 1er janvier 2016, en intégrant les recommandations formulées, et d'apporter les précisions et améliorations utiles pour les facteurs entrés en vigueur au 1er janvier 2015.
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