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Alfred Marie-Jeanne
Question N° 84681 au Ministère de l'économie


Question soumise le 7 juillet 2015

M. Alfred Marie-Jeanne attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur les contraintes liées à l'activité de la plaisance en outre-mer. En effet, depuis le 15 juillet 2013, la TVA communautaire pénalise l'activité des marina d'autant que l'exonération ne s'applique pas aux opérations de location et d'affrètement qui consistent, contre rémunération, à mettre un navire avec ou sans équipage, à la disposition de personnes à des fins de voyages d'agrément, y compris lorsque ce voyage se déroule en haute mer, et qui n'affectent pas elles-mêmes le navire à une activité rémunérée (CJUE. 22 décembre 2010, aff. n° C-116/10, Bacino Charter Company SA). En conséquence, ces prestations de location et d'affrètement effectuées pour les besoins de voyages d'agrément sont soumises à la TVA selon les règles du droit commun déterminées pour les besoins des navires de plaisance à usage privé. Dans ces conditions, l'évolution du contexte juridique a fait que l'industrie de la plaisance a progressivement déserté la Guadeloupe et la Martinique. Alors que l'application de la TVA communautaire impacte l'activité de location et d'affrètement, parallèlement des investissements majeurs avaient permis une mise aux normes du carénage du Marin dans le cadre de financements de l'Europe, de l'État, des collectivités territoriales concernées et de capitaux privés pour agrandir la darse existante et instituer une nouvelle pour tenir compte des navires allant jusqu'à cinquante mètres. Or le paradoxe est que les effets des investissements visant à accroître l'activité de plaisance, visant non seulement le marché de bateaux martiniquais mais aussi le marché du yachting international et professionnel sont mis à mal par l'application de la TVA sur charter. De surcroît, les Caraïbes attirent de nombreux yachts des États-Unis ne fréquentant pas la Méditerranée et étant étrangers aux spécificités européennes. Aussi, le souhait a été émis sur le fondement de l'article 349 du Traité sur l'Union européenne, que ces collectivités soient exclues de l'application de ladite directive. Au surplus, par rapport aux îles voisines de la Caraïbe, les opérateurs guadeloupéens et martiniquais font face à une concurrence redoutable et ont fait de l'activité de yachting une activité d'export pour tous les territoires. Outre le fait que les navires de plaisance de passage battent pavillon étranger, les législations dans les pays caribéens diffèrent de celles de l'Europe dans la mesure où ces navires sont considérés comme des territoires d'exportation. Les îles concurrentes appliquent le principe d'une détaxe des yachts à l'arrivée et au départ sachant que le tourisme apporte une très grande valeur ajoutée (Saint-Martin, Grenade, Antigua) et que le marché évolue fortement avec la construction d'infrastructures attractives (Saint-Kitts et Sainte-Lucie dans la perspective d'installation d'une troisième marina. Devant une concurrence acharnée, il y a des demandes fortes à examiner telles : l'application du droit à exporter hors taxes pour la plaisance, notamment dans les territoires recherchant un solde positif de leur balance commerciale ; la revendication du droit d'exporter, sous contrôle de la douane, le carburant à ces navires de plaisance selon la législation appliquée sur place pour d'autres types de navires à condition qu'ils quittent le territoire dans les vingt-quatre heures ; et celle du droit de pouvoir livrer sur ces navires toutes les pièces en hors TVA communautaire selon le principe de l'exportation de toute pièce ou équipement vers un pays tiers. Les statistiques de la grande plaisance montrent, pour la Martinique, dans la saison 2014/2015 de fortes diminutions, sauf en ce qui concerne les bateaux à voile. Il lui demande de bien vouloir intervenir auprès des instances européennes pour arrêter, au regard de l'article 349 du Traité sur l'Union européenne, les mesures spécifiques susceptibles d'influer favorablement sur les activités de yachting eu égard non seulement au contexte fiscal relativement à la TVA communautaire, mais encore à la concurrence accrue dans le bassin caribéen.

Réponse émise le 20 septembre 2016

L'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des locations de navires de commerce à des fins d'agrément, depuis le 15 juillet 2013, fait suite à un contentieux engagé par la Commission européenne contre la France et relatif à la transposition d'un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, C-116/10, Bacino Charter Company SA du 22 décembre 2010). Désormais, conformément à la jurisprudence précitée, les locations de navires de plaisance utilisés à des fins d'agrément par le preneur de la location sont imposables à la TVA, au taux de 8,5 % s'agissant des départements d'Outre-mer (DOM). Le montant du loyer qui constitue l'assiette de la taxe est déterminé à raison de l'utilisation du navire dans les eaux territoriales communautaires. La part du loyer correspondant à une utilisation du navire en dehors des eaux territoriales communautaires peut ainsi être déduite de l'assiette de la taxe. Cette évaluation qui relève de la responsabilité du redevable, peut être réalisée soit de manière forfaitaire, soit au réel en fonction du temps passé en dehors des eaux communautaires avec justificatifs à l'appui. Ainsi, pour ceux qui éprouveraient des difficultés à réaliser cette opération, l'utilisation du navire en dehors des eaux communautaires peut être déterminée forfaitairement par l'application d'une réfaction de 50 % sur le montant total des loyers quelle que soit la catégorie de navigation des navires. Dans le cas des DOM, l'application de la réfaction forfaitaire aboutit à un taux net de TVA de 4,25 % qui ne devrait pas, compte tenu de son montant, inciter les loueurs à délocaliser les locations au départ d'autres territoires voisins. S'agissant de l'évaluation au réel, dès lors que le loueur est en mesure d'établir des relevés du système d'identification automatique (AIS) ou du système de localisation mondial (GPS) ou des mentions portées sur le livre de bord, que le navire a passé plus de la moitié du temps de la location au-delà de la zone de douze miles à partir du territoire du DOM où il a été mis à disposition, la réfaction pourrait même être supérieure à 50 %. Par ailleurs, toutes les autres prestations effectuées pour les besoins des navires de commerce affectés à la navigation en haute mer loués à des fins d'agrément ou non demeurent exonérées de TVA : avitaillement, amarrages, entretien, réparations, services portuaires, livraisons, importations des navires… Il en résulte que toutes les entreprises travaillant dans le secteur de la grande plaisance commerciale peuvent continuer à facturer toutes leurs prestations hors TVA. La perte de compétitivité par rapport aux territoires voisins ne paraît, dans ces conditions, pas excessive. En outre, la TVA est applicable dans les DOM dans les mêmes conditions qu'en France continentale, sous réserve de certaines adaptations et à l'exception des départements de la Guyane et de Mayotte, conformément à l'article 294 du code général des impôts. La question de l'assujettissement à la TVA des locations de navires de plaisance, présente donc un impact limité eu égard au taux réduit applicable dans les DOM et à l'existence de différentes possibilités de réfactions et ne semble pas de nature à constituer un danger pour l'activité de la grande plaisance dans l'arc caribéen.

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