Mme Isabelle Bruneau attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'inquiétude des propriétaires de moulins à eau. La restauration de la continuité écologique des cours d'eau est un axe important pour l'atteinte du bon état des eaux et la préservation de la biodiversité. Les espèces piscicoles ont en effet besoin de circuler entre leurs lieux de reproduction, de croissance et d'alimentation. En conséquence de quoi, l'État s'est engagé à restaurer la continuité écologique des cours d'eau. La circulaire du 25 janvier 2010 précisant les modalités de mise en œuvre du plan d'action initié en 2009. Une première mission, confiée au conseil général de l'environnement et du développement durable, concernait la réalisation d'un diagnostic de la mise en œuvre concrète du plan d'action pour la restauration de la continuité écologique des cours d'eau ainsi qu'une évaluation des sources de blocage ou de tensions. Présentée le 30 avril 2013 elle fut suivie d'une seconde mission à nouveau confiée au CGEDD ayant pour objectif d'organiser une table ronde nationale avec les représentants des propriétaires de moulins, de collectivités et d'associations de protection de la nature. Les propriétaires dont l'ouvrage est classé au titre de l'article L. 214-17 se doivent de mettre en conformité leurs chaussées avant le 9 novembre 2018. Dans l'éventualité où les propriétaires n'auraient rien fait, l'État effectuera les travaux et demandera ensuite à ces derniers de rembourser les frais engagés. Les propriétaires de moulins à eau demeurent particulièrement inquiets que ne soient pas mieux associés et valorisées les actions associant la sauvegarde et de la préservation des moulins d'une part, la continuité écologique des cours d'eau de l'autre. Précisément, le projet de SDAGE 2016-2021 de l'Agence de l'eau Loire-Bretagne a reçu à cet égard un accueil réservé, notamment alimenté par une contestation des plans d'arasement, du coût apparemment disproportionné entre réalisation des dispositifs de franchissement et des bénéfices écologiques attendus ou des dispositions privilégiant l'effacement d'ouvrages transversaux réputés abandonnés. Pour certains ouvrages, les législations entre protection de l'environnement et développement des énergies renouvelables ne paraissent pas coordonnées et freinent le développement des énergies hydroélectriques. Les mises aux normes exigées de l'article L. 214-17 du code de l'urbanisme mettent en difficulté les propriétaires de moulins et risquent de les obliger à terme à s'en séparer. Elle souhaiterait donc connaître les intentions du Gouvernement sur ce dossier afin notamment de sauvegarder les moulins en France.
La continuité écologique des cours d'eau constitue l'un des objectifs fixés par la directive cadre sur l'eau. Elle est indispensable à la circulation des espèces mais également des sédiments. La conciliation entre ce principe et l'existence de moulins, dont l'aspect patrimonial de certains est indéniable, est cependant un autre objectif à atteindre. L'atteinte du bon état écologique impose de réduire les impacts des ouvrages sur la circulation des espèces et le transport sédimentaire, c'est à dire sur les fonctionnalités naturelles des cours d'eau. C'est pourquoi un plan de restauration de la continuité écologique des cours d'eau (PARCE) a été lancé fin 2009, visant le traitement de 1 200 ouvrages avant 2012 et a été prolongé par la mise en œuvre des obligations liées aux nouveaux classements des cours d'eau en liste 2 au titre de l'article L. 214-17 du code de l'environnement. La mise en œuvre de cette politique ne concerne pas en priorité les moulins, mais tous les ouvrages implantés dans le lit mineur des cours d'eau et faisant obstacle à la circulation des poissons migrateurs ou au transport sédimentaire. Différentes solutions existent, allant de la suppression de l'ouvrage à l'ouverture régulière de vannes en passant par l'aménagement de passes à poissons, la réduction partielle de la hauteur de l'ouvrage, ou l'implantation de brèches. Toutes ces solutions sont susceptibles de s'appliquer aux ouvrages hydrauliques sur la base d'études de scénarios et d'examen des avantages et inconvénients de chacun, tenant compte, entre autres, de la dimension patrimoniale des ouvrages. Cette approche correspond à l'esprit des textes règlementaires sur le sujet, aucun n'ayant jamais prôné la destruction des seuils de moulins. Ainsi, afin de pouvoir appréhender au mieux la situation actuelle, l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) a établi un inventaire des obstacles à l'écoulement de toutes sortes (barrages, buses, radiers de pont, etc.). Celui-ci recense plus de 80 000 obstacles. Parmi ceux-ci, un premier ordre de grandeur de 18 000 obstacles dont le nom contient le mot « moulin » peut être tiré. Moins de 6 000 d'entre eux se situent sur des cours d'eau où s'impose une obligation de restauration de la continuité écologique. Enfin, une partie d'entre eux sont de fait partiellement ou totalement détruits et d'autres sont déjà aménagés d'une passe-à-poissons ou correctement gérés. Plus spécifiquement, la coexistence entre les moulins et l'abondance des poissons dans les cours d'eau fait débat. L'étude (Van Looy et al, 2014), menée conjointement par l'ONEMA et l'institut national de recherche en sciences et technologies de l'environnement (IRSTEA) a précisé l'influence négative notable des ouvrages, quels qu'ils soient, sur les populations de poissons, en militant bien pour la baisse de leur densité. Une convention d'engagements pour le développement d'une hydroélectricité durable a été signée le 23 juin 2010, pour établir un équilibre entre la restauration des milieux aquatiques, et la production d'hydroélectricité. Elle vise à trouver des compromis entre la suppression de vieux ouvrages, l'aménagement de certains ouvrages existants et la mise en place de nouveaux. Beaucoup de dossiers sont déjà en cours de traitement concernant la construction de nouvelles exploitations, dans des sections ciblées de cours d'eau et en accord avec le droit existant. De nombreuses remises en exploitation de moulins sont en cours un peu partout sur le territoire. Le ministère chargé de l'environnement vient de prendre plusieurs mesures pour renforcer la conciliation sur cette question : un appel d'offre pour le développement de la petite hydroélectricité, vient d'être lancé, qui comprend la remise en exploitation de moulins dans le respect des enjeux environnementaux. Il fait suite à l'arrêté fixant les nouveaux objectifs de développement des énergies renouvelables qui a été publié au Journal officiel le 26 avril 2016 ; des pages pédagogiques sur le fonctionnement des cours d'eau et la continuité écologique ont été mises en ligne sur l'internet et sont disponibles à l'adresse suivante http://www.developpement-durable.gouv.fr/Un-cours-d-eau-comment-ca-marche.html ; une charte est prête à être signée entre le ministère, l'ONEMA, la fédération nationale pour la pêche en France, France nature environnement et une des fédérations de représentants des propriétaires de moulins ; sa signature est en attente des dernières décisions législatives en la matière ; l'article 120 de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, par exemple, prévoit d'ores et déjà de donner un délai de 5 ans supplémentaires pour finaliser les travaux de mise en conformité des ouvrages, dès lors qu'un dossier d'aménagement aura été déposé dans le délai initial ; le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a été missionné pour faire un état des lieux précis des moulins et une analyse des situations qui posent des difficultés et préconiser des solutions ; un groupe de travail a été lancé à l'initiative du ministère chargé de la culture, avec les services du ministère chargé de l'environnement et les représentants des propriétaires de moulins, sur la question de la dimension patrimoniale des moulins. Tous ces éléments sont de nature à apaiser les tensions que cette question des moulins a pu générer, mais aussi à mettre en place une démarche appropriée, qui implique au cas par cas les parties concernées, pour concilier la restauration du bon état écologique de nos cours d'eau et la préservation de notre patrimoine des moulins. La politique du Gouvernement est donc bien celle du compromis en matière de restauration de la continuité écologique visant l'atteinte du bon état et le développement de l'hydroélectricité en tant qu'énergie renouvelable.
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