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Patrice Martin-Lalande
Question N° 85670 au Ministère de l'écologie


Question soumise le 28 juillet 2015

De l'argent public - européen, national et territorial - a été consacré à l'aide à l'investissement des particuliers comme des collectivités en chaudières à bois pour favoriser la valorisation des exploitations en circuit court du bois-énergie. Dans une région très forestière comme la Sologne, cette politique de soutien a donné des résultats très positifs sur place et à la périphérie de la Sologne, avec l'installation d'une grande capacité de chaufferie au bois. Des améliorations ont aussi pu être apportées pour la valorisation des exploitations des bois de Sologne (plates-formes, etc.). Ce succès comporte malheureusement une zone d'ombre en ce sens qu'il ne semble pas exister un tableau de bord territorialisé recensant d'une part les capacités de chauffage installées et prévues, et d'autre part les capacités de production actuelles et futures de la forêt de Sologne. Ce flou dans la connaissance de la bonne adéquation entre la consommation et la production de bois local risque d'aboutir à certains effets contraires aux objectifs recherchés. En effet, en Sologne, il existe le sentiment que la capacité installée en chaudières-bois est en train de dépasser la capacité de production de bois de chauffage. Cela conduirait au paradoxe que, en ayant voulu développer un circuit court dans l'approvisionnement local en énergie, l'excès de consommation conduise à faire venir de plus loin le bois-énergie nécessaire. Le bilan environnemental de cette nouvelle situation serait contraire aux objectifs poursuivis par les aides publiques à l'investissement. Il est urgent et impératif que soit systématiquement élaboré et tenu à jour un tableau de bord territorial de la consommation et de la production de bois-énergie de manière à pouvoir anticiper les éventuels déséquilibres, par exemple en allégeant le financement public consacré à l'aide à l'installation de chaudières bois-énergie et en renforçant le financement public des aides à la production de bois-énergie dans le territoire concerné. M. Patrice Martin-Lalande interroge Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur ce qui existe et ce qui est prévu en matière de connaissance et de suivi, par exemple sous forme de tableau de bord, de l'équilibre territorial entre les capacités de consommation et les capacités de production du bois-énergie.

Réponse émise le 1er septembre 2015

La filière bois-énergie, représentant d'ores et déjà une part significative de la production nationale d'énergie renouvelable (de l'ordre de 45 %), sera amenée à poursuivre son développement pour nous permettre d'atteindre l'objectif ambitieux fixé par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique et la croissance verte, qui demande que les énergies renouvelables représentent 32 % de la consommation d'énergie, et 38 % de la consommation finale de chaleur, en 2030. Ce développement est permis par la mise en oeuvre d'instruments de soutien tels que, notamment, le fonds chaleur renouvelable, géré par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et les appels d'offres, ou le tarif de rachat de l'électricité, pour la cogénération à partir de biomasse solide. La ressource en bois pour permettre cette croissance existe à un niveau abondant. Ne serait-ce qu'au niveau des forêts françaises, l'inventaire forestier national (IFN), réalisé par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et reconnu comme étant un instrument fiable de suivi de la forêt française, indique que seule la moitié de l'accroissement biologique de nos forêts est prélevé chaque année. Il est donc envisageable, et même pertinent dans un souci de gestion durable des forêts, d'accroître le niveau de récolte nationale de bois. Toutefois, les gisements additionnels existant sont complexes à mobiliser ; leur mobilisation nécessite de mettre en gestion les parcelles forestières actuellement non ou insuffisamment gérées (en particulier pour des raisons de morcellement du foncier et de sensibilisation insuffisante des propriétaires). C'est dans ce but que les groupements d'intérêt économique et environnemental forestiers (GIEEF) ont été instaurés par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAF) du 13 octobre 2014 : il s'agit d'un outil structurant pour dynamiser la gestion durable de la forêt privée et améliorer la mobilisation des bois. La qualité de GIEEF permettra une reconnaissance officielle par l'État de l'engagement des propriétaires forestiers dans la gestion durable de leur forêt, visant un accroissement de la production de bois à l'échelle d'un territoire dans le cadre d'une meilleure performance environnementale ; cette reconnnaissance pourra permettre aux propriétaires concernés de bénéficier d'une majoration dans l'attribution des aides publiques. Le contrat stratégique de la filière bois, signé le 16 décembre 2014 par le Gouvernement et les représentants de la filière, propose lui aussi différentes actions afin de renforcer l'ensemble de la filière, et de libérer l'offre de bois : - le déploiement du fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB), instauré là encore par la LAAF, et rassemblant l'ensemble des moyens destinés à soutenir le développement de l'investissement en amont et en aval de la filière bois, qui participera au financement d'actions pour la mobilisation du bois ; - le lancement de travaux visant à la mise en place de financements innovants additionnels, alimentés par les acteurs de la filière ; - il a été décidé dans le cadre de ce contrat de filière que de façon complémentaire aux actions menées par le ministère en charge de la forêt, le fonds chaleur géré par l'ADEME participerait aux actions engagées en faveur de la mobilisation de la biomasse. Ainsi, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a lancé en mars 2015 avec le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt un appel à manifestation d'intérêt (AMI) « dynamic bois » pour financer des projets à l'échelle des territoires visant à mobiliser de la biomasse additionnelle destinée à alimenter les chaufferies du fonds chaleur. 96 pré-projets répartis sur l'ensemble du territoire ont été déposés dans un délai relativement court, ce qui montre l'implication forte des territoires et des acteurs de la filière. Mais ce contrat actait également la nécessité de mettre en place des outils de pilotage de la filière. La création d'une « veille économie mutualisée » de la filière bois (ou VEM), portée à la fois par les pouvoirs publics et par les professionnels de la filière forêt-bois, a donc été décidée. Un comité de direction et un comité technique de cette VEM ont d'ores et déjà été mis en place. Par ailleurs, les pouvoirs publics travaillent au renforcement de l'Observatoire national des ressources en biomasse (ONRB) en ce qui concerne les ressources en bois pour : - estimer, à l'échelle nationale et à l'échelle régionale, les ressources en bois additionnelles (au-delà donc de ce qui est actuellement prélevé) mobilisables ; - et fournir des tableaux de bord permettant de suivre l'équilibre entre l'offre et la demande de bois, là encore à la fois à l'échelle nationale et à l'échelle régionale. Les cellules biomasse (composées de représentants des pouvoirs publics en régions) pourront s'appuyer sur ces instruments lorsqu'elles devront se prononcer sur la faisabilité des plans d'approvisionnement des nouveaux projets de chaufferies, au sujet desquels leur avis est demandé quand des soutiens publics sont accordés. Il est par exemple prévu, dans le cadre du nouvel appel d'offres en cours de préparation concernant la cogénération à partir de biomasse solide, qu'un projet recevant un avis négatif de la cellule biomasse de sa région d'implatation ne puisse pas être retenu. Enfin, ces instruments seront utiles à l'élaboration de la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse et des schémas régionaux biomasse qu'institue la loi sur la transition énergétique et la croissance verte. Cette stratégie et ces schémas auront pour objectifs de développer les gisements de biomasse et d'augmenter leur mobilisation, pour permettre un développement important des filières de valorisation énergétique de la biomasse tout en préservant l'approvisionnement des filières d'ores et déjà en place (dans les secteurs agricoles ou forêt/bois) - afin de garantir une bonne articulation des usages.

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