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Philippe Goujon
Question N° 90010 au Ministère de la justice


Question soumise le 6 octobre 2015

M. Philippe Goujon appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les risques qui pèsent aujourd'hui sur les transferts de détenus, faute d'effectifs suffisants d'agents habilités au sein de l'administration pénitentiaire. Depuis 2011, les transferts de détenus, auparavant assurés par les forces de l'ordre, doivent être assurés par l'administration pénitentiaire, mais celle-ci, manquant de 1 200 surveillants, ne dispose pas de suffisamment d'agents habilités pour assurer cette mission efficacement, d'autant qu'ils doivent depuis février 2015 également convoyer les détenus à l'extérieur de leur ressort territorial. Au surmenage des personnels pénitentiaires s'ajoute un allongement des délais de transferts de détenus qui fait peser un risque d'annulation des procédures, et donc d'impunité, lorsque ceux-ci refusent de recourir à la visioconférence dans le cadre des prolongations de détention provisoire encadrées par des délais très contraignants, comme l'a souligné la Conférence nationale des procureurs généraux. Les établissements pénitentiaires franciliens sont particulièrement concernés par ces difficultés d'extraction, 60 à 100 détenus passant tous les jours par la « souricière » du Palais de justice de Paris. Aussi il lui demande quelles mesures elle entend prendre pour répondre à la fois à la pénurie d'agents habilités au sein de l'administration pénitentiaire et plus particulièrement à la spécificité parisienne.

Réponse émise le 5 juillet 2016

Le processus de transfert des missions d'extraction judiciaire a débuté en septembre 2011 pour s'achever dans sa première phase fin 2012. Dans ce laps de temps, ce sont 7 régions administratives (Lorraine, Auvergne, Basse-Normandie, Champagne-Ardenne, Picardie, Midi-Pyrénées, Franche-Comté) ainsi que les trois départements franciliens de la cour d'appel de Versailles qui sont passés sous la compétence du ministère de la justice. Le processus a été interrompu durant toute l'année 2013 et a repris à l'issue de la réunion interministérielle du 12 novembre 2013 selon les modalités suivantes : le transfert global de 1 200 équivalents temps plein (ETP) du programme intérieur vers le programme justice a été acté (y compris ceux déjà transférés en 2011 et 2012) ; l'intégralité du transfert devra, sauf pour l'outre-mer, être achevé en 2019. Début 2016, l'administration pénitentiaire a obtenu la création de 450 ETP en sus des 1 200 ETP transférés par le ministère de l'intérieur. Ces créations d'emploi, prévues entre 2016 et 2017, permettront de renforcer les structures en difficulté et d'accroître les effectifs pour les reprises à venir. En 2015, année de reprise du processus de transfert, celui-ci a concerné trois nouvelles régions administratives (régions Alsace, Nord-Pas-de-Calais et Aquitaine). Par ailleurs, au 1er mars 2015 est entrée en application une nouvelle doctrine d'emploi des agents d'extraction judiciaire, qui prévoit notamment la possibilité de réaliser des escortes à deux agents dont le chauffeur, lorsque le profil de la personne détenue et le contexte de la mission le justifient. Une modification de la règle de compétence géographique de l'administration pénitentiaire est également entrée en œuvre : si, durant la première phase de reprise (2011-2015), l'administration pénitentiaire était compétente pour exécuter les missions d'extraction judicaire au sein des régions reprises et contiguës uniquement, elle est devenue compétente à compter du 1er mars 2015 pour exécuter ces missions à partir de la région reprise. Il a découlé de cette modification une augmentation d'environ 10,50% du volume de missions d'extraction judiciaire à traiter. Le processus de transfert s'est poursuivi au premier semestre 2016 par les régions Centre, Bretagne, Pays de la Loire et l'ancienne région Haute-Normandie. Il s'étend au second semestre aux anciennes régions Bourgogne, Poitou-Charentes et Limousin. Au 1er juin 2016, l'administration pénitentiaire était compétente pour exécuter 48% des réquisitions d'extraction judiciaire émises par les services judiciaires du territoire métropolitain. En cas d'impossibilité pour l'administration pénitentiaire de réunir les moyens humains et matériels nécessaires pour assurer une mission requise par l'autorité judiciaire, les services de l'autorité de régulation des extractions judiciaires (ARPEJ) communiquent au magistrat ou autorité requérante une impossibilité de faire. Le magistrat ou l'autorité requérante a alors la possibilité soit de déplacer la date de la mission en se servant du planning partagé de l'ARPEJ concernée, sur lequel apparaissent les plages calendaires et horaires disponibles ; soit de mettre en œuvre la mission par voie de visioconférence ; soit, enfin, de saisir les forces de police ou de gendarmerie nationales aux fins d'exécution de la mission. Le taux d'impossibilités de faire opposées à l'autorité judiciaire s'est sensiblement accru entre 2014 et 2015, passant de 4 % des missions requises, à 11 % en 2015, soit une augmentation de près de 7 points. L'augmentation des effectifs consacrés aux extractions judiciaires devrait permettre de limiter ce taux et donc le recours en subsidiarité aux forces de sécurité intérieure. La région parisienne est également touchée par l'augmentation des impossibilités de faire. Il a ainsi été décidé le renfort exceptionnel, du 1er septembre 2015 jusqu'à la fin de l'année 2015, de 16 agents supplémentaires provenant des équipes régionales d'intervention et de sécurité de chaque région du territoire. Ce renfort a permis de nettement diminuer les impossibilités de faire. Un recrutement et une formation exceptionnels ont été réalisés pour combler les pôles de rattachement des extractions judiciaires franciliens à hauteur du renfort réalisé par les agents des équipes régionales d'intervention et de sécurité. Début 2016, le taux d'impossibilité de faire est de 8% pour la région parisienne. L'administration pénitentiaire travaille avec la direction des services judiciaires afin de continuer à développer l'utilisation de la visioconférence au sein des juridictions. Une mission conjointe du garde des sceaux et du ministre de l'intérieur a été diligentée le 31 mai 2016 afin d'évaluer le transfert de la charge de missions d'extractions judiciaires du ministère de l'intérieur vers le ministère de la justice. Le rapport sera remis le 31 juillet 2016.

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