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Maud Olivier
Question N° 94820 au Ministère de la justice


Question soumise le 5 avril 2016

Mme Maud Olivier alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la situation des femmes en situation de privation de liberté. Un avis de la Contrôleure générale des lieux de privations de liberté a récemment fait état de l'urgence de la situation. En effet, si les femmes représentent seulement 3, 2 % de la population carcérale, elles sont pourtant l'objet de discriminations importantes dans l'exercice de leurs droits fondamentaux et la CGLP a constaté lors de ses visites que la situation des femmes privées de liberté n'est pas conforme au principe d'égalité entre les femmes et les hommes. Parmi les 188 établissements pénitentiaires, seuls 56 accueillent des femmes détenues, dont la plupart se trouve dans la moitié nord de la France. Seuls trois des six établissements pénitentiaires pour mineurs reçoivent des jeunes filles, et neuf centres de rétention administrative sur vingt-cinq accueillent des femmes. Enfin, un seul centre éducatif fermé est réservé à l'accueil des seules mineures, la majorité des autres CEF n'hébergeant que des jeunes hommes. Ce maillage territorial inégal des lieux d'enfermement rend difficile le maintien des relations familiales. De plus, les conditions matérielles d'hébergement de ces femmes sont insatisfaisantes en raison de leur enclavement au sein de quartiers distincts, d'un accès réduit ou inadéquat aux activités, d'une prise en charge au sein de structures spécialisées limitée voire inexistante, et d'un manque de prise en compte des besoins spécifiques des femmes. Par ailleurs une étude d'une chercheuse du CNRS constate une forte prise de poids accompagnée de troubles anxio-dépressifs sévères chez les détenues. L'une des explications est qu'elles pratiquent très peu d'activités physiques, contrairement aux hommes. Étant peu nombreuses, elles ne sont pas prioritaires pour utiliser les installations sportives et y sont moins incitées. De plus, les repas distribués sont les mêmes pour les hommes et les femmes et ne tiennent pas compte des spécificités de ces dernières, notamment leurs plus faibles besoins caloriques. Elle l'interroge sur les modifications qu'il envisage dans la prise en charge des femmes privées de liberté afin de rendre effectif le principe d'égalité entre les femmes et les hommes qui doit s'appliquer dans l'intégralité de la société.

Réponse émise le 16 mai 2017

L'égalité hommes-femmes en détention est une préoccupation constante de l'administration pénitentiaire. Au sein des 57 établissements pénitentiaires qui les accueillent, les femmes incarcérées bénéficient des mêmes droits que les hommes détenus. Les seules adaptations concernent le principe de non mixité des établissements pénitentiaires prévu à l'article 1er du règlement intérieur type annexé à l'article R. 57-6-18 du code de procédure pénale. En raison de ce principe mais aussi du faible nombre de femmes incarcérées (3,6% de la population pénale), et bien que des établissements pénitentiaires accueillant des femmes soient présents dans chaque interrégion, le maillage territorial de ces établissements est moins fin que celui des établissements pour hommes. Toutefois, afin d'assurer le maintien des relations familiales, les femmes écrouées disposent d'accès aux parloirs ainsi qu'aux unités de vie familiales dans les mêmes conditions que les hommes. Les besoins en la matière ont été pris en compte par la direction de l'administration pénitentiaire dans les projections de construction de nouveaux établissements pénitentiaires. Afin d'assurer un accès égal aux activités en détention, l'article 28 de la loi no 2009-1436 du 21 novembre 2009 pénitentiaire permet que des activités soient organisées de façon mixte. Les femmes détenues ont ainsi pu bénéficier, au cours de l'année scolaire 2015-2016, de 955 heures d'enseignement par semaine dans le cadre de cours mixtes ou réservés exclusivement aux femmes. 2 321 femmes détenues, mineures et majeures, ont été scolarisées en 2015-2016. Parmi elles, 1 774 se sont engagées dans un parcours de formation de plus de 20h, 149 ont pu valider un diplôme de l'éducation nationale en prison, 206 un diplôme attestant de compétences linguistiques et près de 550 ont validé des attestations de compétences. Une programmation sportive spécifique est permise grâce aux rotations dans l'utilisation des infrastructures sportives des établissements accueillants des quartiers réservés aux femmes. Proportionnellement au nombre de personnes détenues, les femmes disposent d'ailleurs de plus d'heures potentielles d'activité par personne incarcérée que les hommes. Lorsque cela est possible, et conformément à l'article 28 de la loi pénitentiaire susvisée, des activités mixtes sont organisées. Ce fut notamment le cas dans le cadre des actions réalisées lors du Sidaction 2016 et des jeux pénitentiaires 2014. S'agissant des repas distribués dans les quartiers femmes, les besoins caloriques varient effectivement en fonction du sexe mais également en fonction d'autres facteurs tels que l'indice de masse corporelle, l'anatomie corporelle, le niveau d'activité physique, l'âge, les facteurs environnementaux, la grossesse, la phase de croissance, la situation endocrinienne. Aussi, les repas distribués doivent surtout éviter tout risque de carence et il revient à chaque personne d'adapter son comportement alimentaire en fonction de l'ensemble de ces déterminants. Pour mieux connaître leurs besoins alimentaires, les femmes détenues peuvent solliciter des conseils auprès de l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire. En outre, des produits dédiés aux femmes détenues sont disponibles sur les bons de commandes de « cantine » afin de répondre à la spécificité de leurs besoins. Enfin, le suivi médical des femmes détenues ne relève pas de la compétence du ministère de la justice mais de celle du ministère des affaires sociales et de la santé. En effet, depuis la loi no 94-43 du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale, les personnes détenues bénéficient de soins délivrés par des professionnels hospitaliers et ne sont plus pris en charge, du point de vue des soins, par l'administration pénitentiaire. Il n'en reste pas moins que conformément à l'article 47 de la loi no 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, les femmes détenues doivent bénéficier d'une prise en charge sanitaire adaptée à leurs besoins, qu'elles soient accueillies dans un quartier pour femmes détenues ou dans un établissement dédié. A cet effet, des dispositions spécifiques sont prévues les concernant dans le cadre du guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice actuellement en cours d'actualisation. Plus largement, l'ensemble des personnes détenues, quel que soit leur sexe, doit disposer d'une qualité et d'une continuité des soins équivalentes à celles offertes à l'ensemble de la population.

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