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Yves Nicolin
Question N° 94961 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 12 avril 2016

M. Yves Nicolin interroge M. le ministre de l'intérieur sur le remplacement de l'ancien stage AMOK par le programme PICA dans le cadre de la formation continue des forces de l'ordre. Effectif depuis janvier 2016, ce remplacement interroge les forces de l'ordre, la formation PICA étant considérée comme moins adaptée aux enjeux du moment, notamment pour faire face aux tueries de masse. Par ailleurs, ce nouveau programme s'inscrit dans le cadre de la formation continue, alors qu'il conviendrait de l'inscrire dans les programmes de formation des écoles de police afin que les primo-intervenants soient opérationnels dès leur formation initiale. Il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur ce point et savoir quelles mesures il compte prendre pour améliorer la formation des policiers.

Réponse émise le 31 janvier 2017

Face à une menace terroriste très élevée et en constante évolution, d'importantes mesures ont été prises pour renforcer les moyens et l'efficacité des forces de l'ordre. Il en est ainsi en matière de formation pour toujours mieux préparer les policiers à riposter efficacement dans un contexte de tuerie de masse. S'agissant du stage AMOK - dont les formations PICA représentaient une première évolution -, il visait à former les policiers à neutraliser un individu seul au comportement meurtrier, alors que les nouveaux stages visent, eux, à former les policiers à réagir à une tuerie de masse perpétrée par un ou des terroristes lourdement armés. En matière de formation initiale, de nouveaux objectifs de formation ont été définis sur ce point dans la scolarité des élèves gardiens de la paix. Les séquences de formation ont été densifiées et l'importance de certains modules réévaluée. L'acquisition des compétences directement liées aux activités de gardien de la paix demeure l'objectif de ces formations et l'approche par les compétences reste privilégiée. L'apport en techniques de sécurité a donc été renforcé. Un module intitulé « tuerie de masse » a ainsi été intégré en 2016 dans la scolarité des élèves, sur la base d'un volume horaire de vingt heures. Dans les formations initiales des commissaires et des officiers, la « gestion opérationnelle d'une tuerie de masse » est également étudiée durant une journée et demie. Au titre de la formation continue, les dispositifs de formation sont adaptés au rôle des différentes unités tel qu'il a été défini dans le nouveau schéma national d'intervention présenté par le ministre de l'intérieur le 19 avril 2016. Ce schéma organise une mobilisation structurée de l'ensemble des forces avec pour objectif une réaction dans les plus brefs délais sur l'ensemble du territoire et avec une efficacité maximale. C'est ainsi qu'il définit et organise les unités d'intervention selon différents niveaux, de l'intervention élémentaire dévolue à tous les policiers et gendarmes présents sur le terrain - donc les premiers à pouvoir parvenir sur les lieux d'une attaque et à riposter (primo-intervenants) - à l'intervention spécialisée (RAID, BRI de la police judiciaire de Paris, GIGN). Entre ces deux niveaux figurent les unités d'intervention dites intermédiaires, principalement constituées des brigades anti-criminalité de la police nationale (BAC) et des pelotons de surveillance et d'intervention dits « Sabre » de la gendarmerie nationale (PSIG), qui ont vocation à être déployés dans les plus brefs délais en soutien de l'action conduite par les effectifs primo-intervenants. Pour les policiers primo-intervenants, une formation intitulée « gestion tactique d'une tuerie de masse par les intervenants de 1er niveau » a été mise en place en avril dernier, permettant aux policiers des unités territoriales d'approfondir les techniques acquises en formation initiale (protection, communication, progression individuelle et en équipe, tirs de riposte) susceptibles d'être employées dans l'attente de l'engagement des unités spécialisées. Ce stage d'une journée est construit en trois séquences pédagogiques. En premier lieu, un apport théorique relatif aux caractéristiques balistiques des munitions ainsi qu'aux limites des moyens de protection à disposition des policiers. En second lieu, une évaluation du niveau de technicité des stagiaires par des exercices abordant les progressions en milieu ouvert, du débarquement du véhicule jusqu'à la mise en place d'un dispositif de neutralisation ou de confinement des tueurs. Enfin, une séance de tir à balles réelles destinée à renforcer les capacités d'utilisation opérationnelle des armes. À ce jour, 710 policiers ont été formés. Pour les policiers des unités d'intervention intermédiaire (BAC, etc.), leur habilitation à l'utilisation du nouveau fusil d'assaut HK G36 a débuté dès les premières livraisons de cette arme en mars dernier. Depuis le 7 mars, 2 831 policiers ont validé les critères d'évaluation de cette formation d'une durée de six heures, portant sur l'acquisition de la technique de tir et l'efficacité en cible et sur le cadre légal de l'emploi de l'arme à feu. De plus, ces policiers bénéficieront à court terme (septembre 2016) d'un stage d'une durée de quatre jours intitulé « gestion tactique d'une tuerie de masse par les intervenants de 2ème niveau ». S'appuyant sur les techniques pédagogiques employées dans les stages « intervenir face à un ou plusieurs tueurs en chaîne - le phénomène AMOK », ce module permettra d'améliorer les stratégies d'intervention ainsi que les techniques de tir à l'arme de poing et à l'arme d'épaule à partir de mises en situation. Il sera aussi l'occasion de sensibiliser les policiers au nouveau cadre légal qui leur permet de faire usage de leur arme à feu pour mettre un terme à un « périple meurtrier », en application de la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale. Un module de formation continue d'une durée de quatre jours relatif à « la gestion opérationnelle d'une tuerie de masse » a également été mis en place pour les commissaires et les officiers. Au-delà de ces formations spécifiques visant à accroître les capacités de riposte des forces de l'ordre aux attaques terroristes, la formation des policiers constitue un enjeu central et à ce titre une priorité pour le ministre de l'intérieur. Face à des menaces en constante évolution et à la diversité des enjeux, qu'il s'agisse de terrorisme, de criminalité organisée ou de délinquance « ordinaire », la formation est un élément clé de l'efficacité des forces de l'ordre, au même titre que les moyens humains ou matériels dont elles disposent. C'est dans le contexte que le ministre a annoncé début juin 2016 une importante réforme de la formation de la police nationale, pour toujours mieux préparer les policiers aux évolutions de la société, des techniques, du droit et des phénomènes criminels. Une vaste réforme va donc s'engager, avec pour objectif d'améliorer la cohérence et l'ambition de la formation initiale et continue, aujourd'hui partagée entre de nombreuses structures. Elle se traduira notamment par la création d'une nouvelle direction centrale du recrutement et de la formation de la police nationale, alors que la formation n'est aujourd'hui qu'une mission parmi d'autres d'une direction chargée également de la gestion des ressources humaines et du budget de la police nationale. Cette direction unique exercera son autorité sur l'ensemble du réseau du recrutement et de la formation, incluant le ressort de la préfecture de police de Paris, ainsi que la tutelle sur l'Ecole nationale supérieure de la police. Cette approche globale garantira l'unité de la police, la qualité des enseignements, la compétence des agents et in fine la qualité du service rendu à la population. Cette direction sera notamment chargée d'élaborer un « référentiel métiers » qui détaille l'ensemble des missions confiées à un policier dans chaque domaine (investigation, renseignement, ordre public) et dont puissent se déduire les besoins en formation. Ces « référentiels » n'existent en effet aujourd'hui que pour les officiers et les commissaires. L'ensemble des méthodes actuellement employées en matière de formation seront également évaluées et, si nécessaire, modernisées. Si l'alternance entre l'école et l'exercice du métier sur le terrain demeure une méthode éprouvée, le système de formation doit aussi conjuguer formation commune et parcours plus individualisés, pour tenir compte des acquis de l'expérience, notamment pour les élèves issus des recrutements internes. Les formations mutualisées entre gardiens de la paix, officiers et commissaires seront également développées pour mieux préparer chacun à travailler ensemble, par exemple dans le cadre de missions de maintien de l'ordre. Il s'agira aussi de renforcer le caractère obligatoire de la formation continue, aujourd'hui trop limitée à certains domaines très spécifiques. Cette réforme doit aussi se traduire par une plus grande ouverture de la police nationale vers l'extérieur, notamment en recourant plus largement au concours de l'université ou de la société civile, tout en tirant encore davantage profit des immenses compétences qui existent au sein de la police nationale (tutorat…).

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