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Patrick Vignal
Question N° 96596 au Secrétariat d'état au commerce extérieur


Question soumise le 14 juin 2016

M. Patrick Vignal appelle l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger sur l'accord de libre-échange avec le Canada et les problématiques qu'il soulève en matière de lutte contre le changement climatique. En effet, le 25 avril 2016, le Président de la République a affirmé que « la France sera très vigilante pour que les négociations internationales futures, les accords commerciaux, ne remettent pas en cause, de manière subreptice, les avancées qui ont été décidées lors de la COP21 ». Néanmoins, l'accord de libre-échange négocié avec le Canada, qui sera soumis au vote pour adoption au Conseil de l'Union européenne puis au Parlement européen, ne présente pas de véritables garanties en ce qui concerne la protection de l'environnement et la lutte contre le changement climatique. En effet, aucun objectif de réduction d'émission de gaz à effet de serre ni même d'objectifs généraux ne figurent dans le texte. Qui plus est, le CETA a déjà eu des conséquences sur la réglementation européenne en matière de pollution des carburants. Le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur a confirmé qu'il s'agissait d'un traité mixte c'est-à-dire qu'il nécessite une ratification européenne et une ratification des parlements nationaux. Cependant il est prévu que l'accord soit appliqué de manière « provisoire » en attendant la ratification nationale. Aussi il souhaiterait savoir ce que recouvrent plus précisément ces dispositions qui appartiennent au champ communautaire mais qui pourraient toutefois avoir des répercussions sur la France et aussi connaître la position du Gouvernement sur les carences de cet accord s'agissant de la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de l'environnement.

Réponse émise le 17 janvier 2017

La France est particulièrement engagée dans la lutte contre le dérèglement climatique, qui figure au premier rang de ses priorités diplomatiques. La France a soutenu l'adoption, lors du Conseil Affaires étrangères du 18 juillet 2016, des conclusions sur la diplomatie climatique européenne, et du plan d'action proposé par le Service européen pour l'action extérieure de l'Union (SEAE). L'un des volets de ce plan vise à placer les enjeux climatiques au cœur de notre action en matière de politique extérieure et notamment de politique commerciale. Le CETA respecte les principes directeurs de la France en matière commerciale : l'exclusion des services audiovisuels pour préserver la diversité culturelle, notre capacité à organiser librement nos services publics et le respect de nos préférences collectives, comme le principe de précaution et nos règles alimentaires et sanitaires. Il ne remet pas en cause les normes sociales et environnementales européennes, a fortiori dans les domaines les plus sensibles (organismes génétiquement modifiés, décontamination des viandes, clonage à des fins alimentaires par exemple). Monsieur le Député Vignal souligne la nécessité de concilier cet accord avec les engagements conclus dans le cadre de la COP21. La France considère que les accords commerciaux ne peuvent pas défaire ce qui a été obtenu dans les accords environnementaux. La France œuvre ainsi pour que les chapitres relatifs au développement durable contenus dans les accords commerciaux soient contraignants et soumis au mécanisme de règlement des différends entre Etats. Le Secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, Matthias Fekl, a écrit en ce sens à la commissaire Cecilia Malmström en charge du commerce dès novembre 2015 et le Président de la République a confirmé ce principe directeur de la politique commerciale française à l'occasion de la Conférence environnementale du 25 avril 2016. Cette position a été élaborée en collaboration étroite avec le Comité de suivi de la politique commerciale (CSS), qui a été mis en place par le gouvernement en 2013 pour associer les parties prenantes à la conduite de la politique commerciale. Composé initialement d'élus et de fédérations professionnelles, il a été élargi aux membres de la société civile (syndicats, think tanks et ONG). Le préambule du CETA fait référence à l'engagement des parties pour la promotion d'un niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement, ce qui fait de cet engagement un principe régissant l'ensemble des dispositions de l'accord. Par ailleurs, l'instrument interprétatif déposé lors de la signature de l'accord, mentionne expressément l'Accord de Paris à la demande de la France. Il affirme l'obligation des parties à assurer et à encourager des niveaux élevés de protection de l'environnement. Concernant le processus de ratification, la position de la France portée par le secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur a toujours été que le CETA est un accord "mixte", c'est-à-dire qu'il couvre des domaines relevant des compétences communautaires et nationales. Suite à la signature de l'accord à l'occasion du Sommet UE-Canada le 30 octobre, l'accord doit désormais être débattu par le Parlement européen, qui pourra ou non autoriser son application provisoire. La France a été très vigilante pour que le champ de cette application provisoire soit établi dans le respect de la répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres. Ainsi, par exemple, le nouveau modèle européen, inspiré par la France, de Cour permanente publique des investissements, fait partie des compétences partagées et ne pourra pas entrer dans le champ de l'application provisoire. Les parlementaires nationaux auront enfin à se prononcer par un vote sur la ratification de l'accord permettant, ou non, son entrée en vigueur définitive. Techniquement, le Parlement sera saisi par le gouvernement d'un projet de loi de ratification sur la base des compétences nationales mais aura à se prononcer sur l'accord dans son intégralité. C'est une question de principe essentielle pour assurer l'adhésion des citoyens européens aux politiques commerciales conduites en leur nom.

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