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Philippe Cochet
Question N° 96813 au Secrétariat d'état au budget


Question soumise le 21 juin 2016

M. Philippe Cochet appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire sur les liens existant entre la contrefaçon et le financement des circuits du terrorisme. Une étude approfondie réalisée par l'Union des fabricants (UNIFAB) regroupant plus de 200 adhérents de divers secteurs concernés par la problématique de la protection de la propriété intellectuelle, pointe les liens étroits existant entre les trafics de produits contrefaits et le financement de la mouvance terroriste par les produits de ce trafic. En effet, le groupe État islamique recourt aux divers modes de financement et la contrefaçon notamment de vêtements, est une source de revenus non négligeable. Cette situation a été entre autres largement évoquée par la presse (L'Express, Le Point, Le Figaro, L'Obs) à l'occasion des attentats de 2015. La contrefaçon, trop faiblement sanctionnée en France comme à l'étranger, représente une source de revenus peu risquée par rapports à des canaux tels que trafics de drogue ou d'armes, permettant un large profit pour un investissement relativement faible et fait désormais partie des secteurs très lucratifs et peu risqués qui drainent une économie parallèle où prospèrent des groupes radicaux. Il lui demande par conséquent quelles mesures elle entend prendre, notamment pour accroître l'arsenal pénal visant la répression de la contrefaçon, afin de lutter contre cette situation.

Réponse émise le 11 avril 2017

Il convient de rappeler que le rapport de l'Union des fabricants (UNIFAB), qui pointe le lien entre le trafic de contrefaçons et le financement du terrorisme, est une étude basée uniquement sur des sources ouvertes. A ce jour, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) ne dispose pas d'analyse exhaustive sur les sources de financement des actes terroristes des mois de janvier et de novembre 2015, puisque ces affaires sont toujours à l'instruction. La connaissance du phénomène laisse à penser que les terroristes ont potentiellement eu recours à un éventail de sources de financement (prêt à la consommation, revenus de trafics divers, revente de biens personnels…) y compris à un financement externe. De manière générale, en cas de découverte de marchandises contrefaisantes, la phase de « flagrance douanière » ne permet pas d'établir le financement du terrorisme. Compte tenu de sa complexité, ce lien ne peut être prouvé que dans le cadre d'une enquête en suite d'acte terroriste ou relative à une association de malfaiteurs en vue d'une entreprise terroriste. Ainsi, en cas de découverte de marchandises contrefaisantes détenues ou vendues par une personne soupçonnée de radicalisation, les agents des douanes vont saisir la marchandise et peuvent procéder au signalement de l'individu auprès des autres services de l'État chargé du renseignement. Au stade de la flagrance, il n'est pas possible de déterminer la destination qui sera donnée aux bénéfices issus de ce trafic. En outre, toutes les activités criminelles et tous les trafics (cigarettes, armes, drogues …) peuvent potentiellement financer le prosélytisme radical voire la mouvance terroriste. Les sanctions applicables en matière de contrefaçons sont prévues à la fois par le code des douanes et par le code de la propriété intellectuelle. Ces deux codes sanctionnent de manière sévère les infractions en la matière notamment lorsque les faits sont commis en bande organisée. Ainsi, la peine d'emprisonnement prévue par l'article 414 du code des douanes passe de 3 ans à 10 ans et l'amende passe de 1 à 2 fois à jusqu'à 10 fois la valeur de l'objet de fraude, lorsque les faits sont commis en bande organisée. La loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale a récemment durci les sanctions prévues par le code de la propriété intellectuelle. La loi a porté à 7 ans la peine d'emprisonnement et à 750 000 € l'amende prévue en cas d'atteinte à un droit de propriété intellectuelle, lorsque les faits ont été commis en bande organisée. Ainsi, les textes visant la répression de la contrefaçon ont récemment évolué afin de s'adapter aux évolutions de la délinquance et le dispositif actuel de sanctions de la contrefaçon apparaît aujourd'hui : - complet, puisqu'il prévoit à la fois des peines d'emprisonnement et des peines d'amende (à titre d'illustration, pour une saisie, réalisée en 2015, de 6 415 sacs à main de contrefaçon valorisés presque 30 Mds€, la peine encourue pour cette infraction commise en bande organisée était de 300 Mds€), - sévère, notamment lorsque les faits sont commis en bande organisée, et un nouvel alourdissement de cet arsenal pénal ne semble pas justifié en l'état.

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