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Marie Le Vern
Question N° 97161 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 5 juillet 2016

Mme Marie Le Vern interroge M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la notion de défaut de conformité appliquée aux élevages d'animaux domestiques. Dans un arrêt du 9 décembre 2015 la Cour de cassation a estimé que le principe du « défaut de conformité », notamment défini à l'article L. 211-7 du code de la consommation, s'appliquait bien aux animaux domestiques d'élevage, en raison de leur assimilation juridique à un bien meuble. Toutefois, la Cour a également estimé qu'en raison du caractère sensible des animaux, un éleveur mis en face d'un cas de défaut de conformité (maladie, malformation congénitale, le plus souvent invisible à l'éleveur de bonne foi), ne pouvait procéder, comme pour un bien de consommation classique, à un échange et devait s'acquitter des frais de « réparation de la non-conformité » ou de dédommagement, souvent très élevés (bien plus que le prix d'un animal à la vente). Cette appréciation du droit met les élevages dans une situation d'insécurité juridique et financière. En effet, d'un côté elles voient le code de la consommation ne s'appliquer que partiellement à leur activité (il s'applique à leur désavantage, ne s'applique pas à leur avantage), et la viabilité de leur modèle économique se voit menacée. La question du caractère sensible des animaux a déjà été abordée lors des débats sur la loi d'avenir agricole, rappelant utilement qu'ils n'étaient pas un bien de consommation comme les autres, tout en demeurant un bien meuble. C'est d'ailleurs pour cette raison, par exemple, qu'une disposition particulière de la loi d'avenir pour l'agriculture a déjà prévu que les dispositions du code de la consommation visant à lutter contre l'obsolescence programmée ne s'appliquent pas aux ventes d'animaux. Mais si ce caractère particulier des animaux domestiques doit être reconnu (ce que ne contestent aucunement les éleveurs) et les consommateurs protégés, cela ne doit pas se faire à « géométrie variable », nuisant fortement à un secteur économique et des éleveurs de bonne foi. En effet, si les animaux ne sont pas des biens comme les autres, et ne sauraient faire l'objet d'échanges comme un bien meuble inanimé, ils ne doivent pas non plus obéir aux mêmes règles de conformité et de qualité de leur « production », l'éleveur ne pouvant, par nature, pas avoir un contrôle total sur elle. Par ailleurs, l'article L. 213-1 du code rural dispose que « la présomption (de l'existence dès l'origine du défaut de conformité survenue jusqu'à 24 mois après la délivrance du bien) prévue à l'article L. 211-7 du même code (de la consommation) n'est pas applicable aux ventes ou échanges d'animaux domestiques ». Qui plus est, cet article du code de la consommation a été abrogé par l'article 14 de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. Ainsi, il semblerait que les éleveurs sont en droit de contester l'application à leur endroit de la présomption de défaut de conformité pour une anomalie de nature congénitale sur un animal, contrairement à l'arrêt rendu par la Cour de cassation. Elle souhaiterait connaître l'interprétation juridique à tirer de cette situation ainsi que les modalités légales permettant de protéger l'activité des éleveurs qui, de bonne foi, ne sont pas en mesure de détecter une anomalie congénitale considérée comme défaut de conformité.

Réponse émise le 23 août 2016

L'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) stipule que l'action en garantie dans les ventes ou échanges d'animaux domestiques s'applique sans préjudice de l'application des articles L. 211-1 à L. 211-6, L. 211-8 du code de la consommation. L'arrêt de la Cour de cassation de décembre 2015 confirme l'applicabilité de la notion de défaut de conformité aux animaux tout en précisant qu'un animal est unique et irremplaçable. Ce jugement va donc dans le sens de l'évolution sociétale qui consiste à protéger l'animal en confirmant sa nature d'être vivant sensible. Ce jugement a par ailleurs l'avantage d'assurer à l'animal le traitement de sa maladie et d'éviter son éventuelle euthanasie en cas de simple remplacement. Dans cette affaire, la Cour a confirmé que le vendeur devrait payer des dommages à l'acheteur du fait du préjudice subi, ce qui résulte des règles générales de responsabilité prévues par le code civil, et non pas par le code de la consommation. Il n'est pas souhaitable que l'animal soit exclu du champ d'application du défaut de conformité, sans une refonte plus approfondie du dispositif général des garanties applicables aux ventes d'animaux. Cette garantie ne peut en effet se limiter aux dispositions relatives aux vices rédhibitoires en application de l'article L. 213-1 du CRPM. Pour autant, l'animal n'est pas un bien de consommation comme les autres. C'est pourquoi depuis l'application de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, l'article L. 211-7 du code de la consommation n'est plus applicable aux ventes ou échanges d'animaux domestiques.

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