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Jean-François Lamour
Question N° 98345 au Ministère de la défense


Question soumise le 2 août 2016

M. Jean-François Lamour attire l'attention de M. le ministre de la défense sur les différents régimes fiscaux appliqués aux primes et indemnités dans l'armée française. Pour les soldats engagés en opérations extérieures, l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger (I.S.S.E.) n'est pas fiscalisée. En revanche, l'indemnité pour sujétion d'alerte opérationnelle (A.O.P.E.R.) et l'indemnité pour service en campagne (I.S.C.), dues aux militaires déployés sur le territoire national pour des exercices ou des opérations comme l'opération Sentinelle, sont soumises à imposition, alors même qu'elles sont d'un montant très inférieur. Comme le relève un rapport rendu en mai 2016 par le Haut comité d'évaluation de la condition militaire, en contrepartie de son engagement sur le territoire national, le calcul de cette prime fiscalisée ne permet pas au militaire de compenser les pertes et surcoûts financiers liés aux prestations propres à sa vie personnelle (comme la garde de ses enfants) et lui fait perdre certaines prestations familiales et sociales dont la délivrance dépend du revenu imposable. Lors de son intervention au fort de Vincennes, le 24 juillet 2016, le Président de la République a exposé de nouvelles mesures pour l'amélioration de la condition du personnel militaire, dont la revalorisation de l'A.O.P.E.R, répondant ainsi aux interrogations exprimées sur son montant, mais par sur son assujettissement à l'impôt. Or la défiscalisation de l'A.O.P.E.R. renforcerait l'effet de sa revalorisation et permettrait de rééquilibrer l'intérêt financier des opérations intérieures par rapport aux opérations extérieures. Il doit également être noté que, dans le cadre de l'opération intérieure, où les militaires sont mobilisés en dehors de leur région d'origine, et alors que le ministre de la défense vient d'annoncer une présence plus importante de Sentinelle en province, l'A.O.P.E.R. apparaît comme la gratification de leur éloignement par rapport à leur domicile, au même titre que les primes perçues par les soldats en opération extérieure. Ainsi, le maintien de régimes fiscaux différents pour ces deux indemnités ne se justifie pas. Il demande s'il est envisagé de procéder à la défiscalisation des indemnités et primes pour les opérations militaires intérieures, et combien cette mesure coûterait aux finances publiques.

Réponse émise le 25 octobre 2016

Afin notamment de lutter contre la menace terroriste, 34 000 militaires sont engagés en permanence, en France comme à l'étranger, pour protéger les Français. Depuis les attentats commis à Paris en janvier 2015, l'opération « Sentinelle » est déployée sur le territoire national, avec une capacité maximale portée à 10 000 soldats. Ces militaires sont engagés en complément des dispositifs des forces de sécurité intérieure. S'agissant de la fiscalité applicable à certaines indemnités pouvant être versées aux militaires servant dans le cadre des opérations extérieures (OPEX) ou des missions intérieures (MISSINT), il convient de préciser que l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger (ISSE), créée par le décret no 97-901 du 1er octobre 1997, est versée au militaire envoyé en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger, individuellement ou en unité. Si l'ISSE est exonérée de l'impôt sur le revenu conformément à l'article 81 A-II du code général des impôts qui est applicable à l'ensemble des salariés, publics ou privés, envoyés à l'étranger par leur employeur, cette indemnité reste néanmoins soumise aux prélèvements sociaux que constituent la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). L'indemnité pour services en campagne (ISC), instituée par le décret no 75-142 du 3 mars 1975, est quant à elle allouée aux militaires qui exécutent avec leur unité ou une fraction de leur unité, hors de leur garnison, des sorties d'une durée de plus de trente-six heures, dans le cadre des activités d'instruction, d'entraînement ou d'intervention des formations. A l'instar de l'indemnité pour sujétion d'alerte opérationnelle (AOPER), l'ISC est soumise à l'impôt sur le revenu. L'attribution de ces deux indemnités ne concerne pas uniquement les militaires engagés dans les opérations de protection intérieure et, dès lors, une défiscalisation éventuelle de l'ISC et de l'AOPER s'appliquerait à un champ dépassant largement ces opérations. Lors du discours prononcé à l'issue de sa rencontre avec les personnels affectés à l'opération « Sentinelle », le 25 juillet 2016 au Fort de Vincennes, le Président de la République a pris en compte les conséquences de l'engagement supplémentaire qui leur est demandé, et a évoqué les mesures déjà inscrites dans le plan d'amélioration de la condition du personnel (PACP), préparé à sa demande et validé en avril 2016, qui a pour objectif de compenser la suractivité opérationnelle, de valoriser l'engagement des forces, de renforcer l'attractivité des armées et de répondre aux situations concrètes rencontrées par nos soldats. Concernant la compensation de la suractivité des militaires, trois mesures indemnitaires ont été décidées. Ainsi, dès 2016, deux jours supplémentaires de permissions complémentaires planifiées - PCP - (10 au lieu de 8 actuellement) pourront être rétribués sous forme d'indemnités pour temps d'activité et d'obligations professionnelles complémentaires (ITAOPC), afin de pallier les difficultés auxquelles sont fréquemment confrontés les militaires pour bénéficier de leurs permissions annuelles. Le coût de cette mesure est évalué à 36 millions d'euros. En outre, une indemnité d'absence cumulée (IAC), complémentaire des dispositifs indemnitaires existants, sera créée, en vue d'indemniser, sur la base d'un barème progressif, l'absence du domicile pour raison opérationnelle au-delà de 150 jours durant l'année civile. Cette mesure sera mise en œuvre à compter du 1er janvier 2017. Son coût budgétaire est estimé à 38,5 millions d'euros. Enfin, le taux journalier de l'AOPER a été porté de 5 à 10 euros à compter du 1er juin 2016 et le périmètre de cette indemnité sera étendu à tout le personnel militaire participant à la protection des personnes, informations et activités sur un site du ministère de la défense. Au titre de l'année 2016, le coût de sa revalorisation est évalué à environ 11 millions d'euros. Pour 2017, la dépense correspondante est estimée à 24 millions d'euros. La mesure d'extension du droit à l'AOPER entrera en vigueur le 1er janvier 2017. Son coût budgétaire est évalué à 6,3 millions d'euros. Toute évolution des régimes fiscaux des primes et indemnités ne pourrait s'envisager que sur un plan global, à partir d'une réforme d'ensemble des modes de rémunération, que le contexte actuel rend inopportune.

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