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Thomas Thévenoud
Question N° 99850 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 11 octobre 2016

M. Thomas Thévenoud interroge M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les difficultés que rencontrent les vétérinaires ayant exercé des mandats sanitaires avant les années 1990 du fait du défaut d'affiliation, par l'État, aux organismes de retraite. En effet, durant ces années, nombre de vétérinaires ont participé à l'éradication des grandes épizooties ayant dévasté le cheptel national, en devenant des collaborateurs occasionnels du service public, salariés de l'État, via les directions départementales des services vétérinaires sous la conduite du ministère de l'agriculture. Au titre de ces mandats sanitaires, ils devaient être affiliés aux organismes sociaux (sécurité sociale et IRCANTEC) mais cette démarche n'a pas été effectuée, les privant ainsi de leurs droits à la retraite découlant de cette collaboration. Après plusieurs années de procédure, le Conseil d'État a reconnu, par deux arrêts rendus le 14 novembre 2011, la responsabilité de l'État. Malgré cela, les vétérinaires éprouvent les plus grandes difficultés à faire valoir leurs droits à cette retraite normalement due. Ils s'inquiètent en particulier pour les délais de traitement des dossiers, le calcul du préjudice subi ainsi que l'indemnisation des veuves des vétérinaires décédées. Une autre problématique résulte de la prescription quadriennale, énoncée par l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics, opposée par l'administration aux vétérinaires ayant formé leur demande d'indemnisation plus de quatre années après la liquidation de leur pension. Or la carence de l'État n'est apparue qu'à partir du moment où elle a été reconnue en jurisprudence, il y a seulement quelques années. Aussi, il lui demande de bien vouloir indiquer les mesures qu'entend prendre le Gouvernement sur ce dossier pour répondre aux préoccupations des vétérinaires sanitaires.

Réponse émise le 1er novembre 2016

L'État a tiré toutes les conséquences des deux décisions du Conseil d'État du 14 novembre 2011. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par les vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Cette procédure s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable et ce indépendamment du département d'exercice. Si le traitement des demandes d'indemnisation peut apparaître long, il convient de souligner que la procédure amiable concerne un pré-contentieux de masse, qu'elle est lourde, car composée d'une analyse de chaque dossier selon des règles harmonisées, et de plusieurs étapes requérant l'implication non seulement du ministère chargé de l'agriculture mais aussi d'un ensemble de partenaires extérieurs. Cette procédure est ouverte aux vétérinaires retraités comme aux vétérinaires actifs. A ce jour, 1 273 dossiers recevables sont parvenus au ministère. 1 067 ont été complètement instruits. Cette instruction est effectuée au cas par cas, l'activité sanitaire des vétérinaires étant très variable d'un vétérinaire à l'autre et ceci quel que soit le département d'exercice. Priorité a été accordée, dans le traitement des demandes, aux vétérinaires en retraite qui subissent d'ores et déjà un préjudice. Trois séries de protocoles ont ainsi été envoyées en 2014, 2015 et 2016. A ce jour 467 protocoles ont été signés. Près de 80 % des vétérinaires en retraite ayant accepté la proposition d'assiette qui leur a été faite ont ainsi été indemnisés, ce qui montre la pertinence de la procédure retenue, Ce processus se poursuivra en 2017. Les modalités techniques du règlement des dossiers des conjoints survivants sont en cours de finalisation. Elles sont complexes, compte tenu de la législation en vigueur. C'est néanmoins une priorité pour les mois qui viennent. Le potentiel total de vétérinaires susceptibles de demander à être indemnisés n'étant pas précisément connu, il est difficile de définir le terme de la procédure de transaction. Si le flux de dossiers nouveaux a nettement ralenti depuis le début de 2016, il n'est pas encore arrêté. Certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières. L'article 1er de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans sa décision no 388199 « Affaire Molin » du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courrait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établies par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. L'article 6 de la loi précitée dispose que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si l'article 6 de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, dans le cas contraire si cela était généralisé, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi.

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