Amendement N° CL81 (Retiré)

Prévention de la récidive et individualisation des peines

Déposé le 19 mars 2014 par : M. Raimbourg.

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L’article 730‑2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 730‑2 – Lorsque la personne a été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ou lorsqu’elle a été condamnée soit à une peine d’emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à quinze ans pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru, soit à une peine d’emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à dix ans pour une infraction mentionnée à l’article 706‑53‑13, le tribunal de l’application des peines peut accorder la libération conditionnelle après l’avis, lorsqu’il l’estime nécessaire, de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues et assortie d’une expertise médicale ; s’il s’agit d’un crime mentionné au même article 706‑53‑13, cette expertise est réalisée soit par deux experts médecins psychiatres, soit par un expert médecin psychiatre et par un expert psychologue titulaire d’un diplôme, certificat ou titre sanctionnant une formation universitaire fondamentale et appliquée en psychopathologie. L’expertise se prononce sur l’opportunité, dans le cadre d’une injonction de soins, du recours à un traitement utilisant des médicaments inhibiteurs de libido, mentionné à l’article L. 3711‑3 du code de la santé publique.

« Le tribunal de l’application des peines peut décider d’assortir la libération conditionnelle d’un placement sous surveillance électronique mobile ou l’accorder après l’exécution, à titre probatoire, d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur ou de placement sous surveillance électronique pendant une période d’un an à trois ans. Cette mesure ne peut être exécutée avant la fin du temps d'épreuve prévu à l'article 729 du présent code.
« Un décret précise les conditions d’application du présent article. »

Exposé sommaire :

La loi n° 2011‑939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs a inséré dans le code de procédure pénale un article 730‑2, modifié par la loi n° 2012‑409 du 27 mars 2012 de programmation relative à l’exécution des peines, visant à subordonner l’octroi de certaines libérations conditionnelles à une procédure particulièrement lourde.

Aux termes de cet article, lorsqu’une personne a été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité, à une peine d’emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à quinze ans pour une infraction pour laquelle le suivi socio‑judiciaire est encouru ou à une peine d’emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à dix ans pour une infraction mentionnée à l’article 706‑53‑13 (par exemple : crimes, commis sur une victime mineure, d’assassinat ou de meurtre et crimes, commis sur une victime majeure, d’assassinat ou de meurtre aggravé, de torture ou actes de barbarie aggravés), la libération conditionnelle ne peut lui être accordée :

–– que par le tribunal de l’application des peines (TAP) indépendamment de la durée de détention restant à subir ;

–– qu’après l’« avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues [un centre national d’évaluation - CNE] et assortie d’une expertise médicale ». Toutefois, s’il s’agit d’un crime mentionné à l’article 706‑53‑13 du même code, cette expertise est réalisée soit par deux experts médecins psychiatres, soit par un expert médecin psychiatre et par un expert psychologue ;

–– qu’après l’exécution, à titre probatoire et si la libération conditionnelle n’est pas assortie d’un placement sous surveillance électronique mobile (PSEM), d’une mesure de semi‑liberté ou d’un placement sous surveillance électronique (PSE) pendant une période d’un an à trois ans.

La complexité et la rigidité de la procédure prévue par l’article 730‑2 du code de procédure pénale font l’objet de critiques récurrentes. D’après le rapport du jury de la conférence de consensus, elle « compromet la possibilité de construire un projet de sortie réaliste et adapté » dans la mesure où il est en réalité « impossible d’examiner la demande du condamné dans un délai raisonnable, car plus d’une année s’écoule entre la demande et l’examen au fond ». Ce même rapport conclut en insistant sur le fait qu’il est « impératif de laisser le soin aux juridictions d’application des peines de définir les mesures d’instruction pertinentes au regard du projet présenté et de la personnalité du condamné ».

La procédure de l’article 730‑2 est par ailleurs largement responsable de l’engorgement des CNE : une part significative des personnes y sont placées dans le cadre d’une « évaluation de dangerosité » et non pas en vue d’une affectation dans un établissement pour peines, disposition pourtant prévue par le deuxième alinéa de l’article D. 81‑2 du code de procédure pénale.

Il est également curieux que le quatrième alinéa de l’article 730‑2 ne mentionne pas le placement à l’extérieur parmi les mesures susceptibles d’être prononcées, à titre probatoire, si la libération conditionnelle n’est pas assortie d’un PSEM. Ce dispositif, qui comporte un hébergement et une prise en charge sociale, apparaît pourtant bien adapté à la situation de personnes condamnées à de longues peines et fort précarisées.

Pour remédier à ces limites et pour garantir l’applicabilité de l’article 17 du projet de loi - examen, aux deux tiers de la peine, de la situation des personnes condamnées à une ou plusieurs peines privatives de liberté de plus de cinq ans, dans la perspective d’une libération conditionnelle -, le présent amendement modifie l’article 730‑2 du code de procédure pénale afin de :

–– laisser au tribunal de l’application des peines (TAP) le soin de décider, en fonction du profil du condamné, d’octroyer la libération conditionnelle « après l’avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues et assortie d’une expertise médicale ». De cette façon, l'avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté comme le passage au sein d'un CNE resteraient possibles mais ne seraient plus automatiques. Ces mesures sont bien entendu parfois indispensables mais l'automaticité de leur application n'est en revanche pas justifiée ;

–– laisser au TAP la possibilité d'assortir la libération conditionnelle d’un PSEM ou de décider qu'elle devra être précédée de l’exécution, à titre probatoire, d’une mesure de semi-liberté, d'un placement à l’extérieur ou d'un PSE pendant une période d’un an à trois ans. Dans les deux cas, le TAP disposerait de la faculté de prononcer ces mesures mais n'y serait pas obligé. Pour combler le manque identifié plus haut, le présent amendement ajoute le placement à l'extérieur à la liste des mesures susceptibles d'être prononcées à titre probatoire.

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