Déposé le 7 janvier 2014 par : M. Cinieri, Mme Grosskost, M. Foulon.
Après l'article L. 253‑8 du code rural et de la pêche maritime, est inséré un article L. 253‑8‑2 ainsi rédigé :
« Art. L.253‑8‑2. – Lorsqu'il est démontré que l'application d'une mesure prise par l'autorité administrative conduit les producteurs dans une impasse technique affectant significativement le niveau de la production, l'application de cette mesure est immédiatement suspendue.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application de la suspension et détermine la procédure de révision de la mesure incriminée. ».
Cet amendement titre les enseignements d'une expérimentation « grandeur nature », qui a été menée dans le Lot-et-Garonne fin 2008, par les producteurs de pommes. Celle-ci visait à évaluer la mise en œuvre sur le terrain de la réglementation concernant l'utilisation des produits phytosanitaires. Un verger témoin d'une surface de 14 ha a été mis en place à Sainte Livrade sur Lot et au Temple sur Lot (47). Il est constitué avec les variétés leaders du marché français (Golden Smoothee, Grany Smith et Gala). Le protocole expérimental a été établi par le CEFEL (Centre d'Expérimentation Fruits et Légumes). Une commission regroupant des producteurs, des ingénieurs de la section nationale pomme et du CEFEL a assuré le suivi avec la participation active de l'exploitant. Un expert judiciaire près du Tribunal d'Agen a contrôlé le respect du cahier des charges.
Les conclusions sont sans appel. La production de pommes du verger témoin est entièrement perdue. La tavelure a colonisé les feuilles et les fruits. Il s'agit d'un champignon qui prolifère par temps humide, qui infecte le verger et rend les pommes impropres à la commercialisation. Le verger témoin n'a pu être protégé en raison de l'arrêté du 12 septembre 2006. Les autres vergers exploités par l'exploitant - même localisation et mêmes variétés - sont dans un état sanitaire satisfaisant. La gestion en bon père de famille protège le verger. L'arrêté plonge les producteurs dans une impasse. Les résultats confirment la position exprimée par les professionnels lors de l'élaboration de cet arrêté et, confirment les constatations déjà établies en 2007 par l'observatoire mis en place conjointement entre la profession et le Ministère de l'agriculture.
Au terme de cette expérimentation, l'analyse des observations et des données enregistrées montre que de nombreux points de l'arrêté ne sont pas applicables en l'état pour une protection sanitaire satisfaisante des fruits et des vergers. La réglementation ne prend pas en compte les variations rapides et incessantes de la météo au plan local, et plus particulièrement du vent. Dans le cadre de l'expérimentation, la protection du verger témoin est régulièrement interrompue et reportée. Ce qui permet le développement des maladies dans l'exploitation. Les délais entre chaque intervention dans le verger sont augmentés et imposent une forme de « chômage technique ». Ils interdisent les interventions mécaniques ou manuelles dans le verger pour l'exploitant et ses salariés. Au terme de cette expérimentation, le verger témoin se trouve dans un piètre état sanitaire.
L'arrêté du 12 septembre 2006 est une réglementation spécifiquement française. Alors que les producteurs européens et des pays tiers ne subissent pas ces contraintes réglementaires, les producteurs français ne peuvent plus produire. Le dispositif réglementaire est d'autant plus incompréhensible que les professionnels ne cessent de faire évoluer la Charte de Production Fruitière Intégrée, en vigueur depuis 15 ans. C'est une démarche de progrès appliquée à la production de fruits. C'est un procédé de haute qualité certifiée, donnant la priorité aux méthodes écologiquement sûres afin d'améliorer la sécurité de l'environnement et la sécurité alimentaire. Il fait appel à toutes les technologies de protection des vergers et particulièrement aux techniques de lutte biologique. Elle permet de produire des fruits sains, dans le respect de l'environnement et accessibles à tous. La réglementation nie l'effort des professionnels et fait courir le risque d'un effondrement de la production française.
Réaliste, une réglementation est applicable ; déconnectée des réalités, elle peut s'avérer très dangereuse pour les acteurs économiques et pour l'économie nationale toute entière.
Par conséquent, le présent amendement vise à éviter que l'application des contraintes réglementaires – toujours plus nombreuses malgré le choc de simplification prôné par le Président de la République – se fasse au détriment de la production française.
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