Déposé le 10 juin 2014 par : M. Coronado, M. Molac, Mme Abeille, M. Alauzet, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, M. Baupin, Mme Bonneton, M. Cavard, M. de Rugy, Mme Duflot, M. François-Michel Lambert, M. Mamère, Mme Massonneau, Mme Pompili, M. Roumegas, Mme Sas.
Supprimer cet article.
L'article premier de cette proposition de loi vise à ordonner aux fournisseurs d'accès à Internet de bloquer de sites faisant l'apologie du terrorisme et engager la responsabilité des fournisseurs d'accès et des hébergeurs. Cet amendement propose de supprimer cet article.
Le 1° de l'article propose que soit mise en avant l'obligation faite aux hébergeurs et fournisseurs d'accès à Internet (FAI) de mettre en place des dispositifs de signalement des contenus illicites ayant trait au terrorisme. L'alinéa ne vise pas à interdire ces contenus, mais seulement à rappeler une obligation spécifique aux FAI et hébergeurs, permettant d'engager leur responsabilité civile et pénale dès lors qu'ils n'empêcheraient pas l'accès à des contenus illicites dont ils auraient eu connaissance.
Or, le conseil constitutionnel a déjà noté, « la difficulté fréquente d'apprécier la licéité d'un contenu ». Dès lors, il y a fort à craindre que la procédure proposé soit inefficace et source de nombreux contentieux. Ainsi, en 2012, si la plateforme du ministère de l'Intérieur a recueilli 120 000 signalements, seuls 1329 ont été transmis pour enquêtes à la police nationale ou à la gendarmerie. Une autre voie, plus efficace et rapide, devrait être désormais privilégiée : la saisine directe des services de police par la plateforme Pharos
Par ailleurs, la plupart des contenus visés sont hébergés à l'étranger.
Enfin, il faut cesser de modifier sans cette partie sur la responsabilité pénale des hébergeurs. Cette partie de la loi de 2004 confond les objectifs et les articles sur lesquels la responsabilité des hébergeurs peut être engagée. Elle confond également le rôle des hébergeurs et celui des fournisseurs d'accès à Internet. Les lois sur la prostitution, puis sur l'égalité femmes-hommes, l'ont déjà modifié pour inclure d'autres objectifs. Le gouvernement avait alors promis une consultation et un projet de loi sur le sujet avant toute nouvelle modification de la loi sur la responsabilité des hébergeurs et des FAI. Il semble donc nécessaire d'attendre avant d'élargir une nouvelle fois le champ de cet article.
Le 2° de cet article propose de mettre en place un blocage administratif pour les sites faisant l'apologie du terrorisme. Cet amendement propose de supprimer cette partie de l'article, pour plusieurs raisons.
D'une part, le blocage administratif est rarement applicable en pratique. Ainsi, suite au blocage judiciaire du site « Copwatch », celui-ci a immédiatement été dupliqué et démultiplié en 35 sites miroirs.
Par ailleurs, cette disposition est complexe à mettre en place. Le blocage prévu par l'article 18 de la loi de 2004, n'a jamais été mis en place, et cette disposition législative a ensuite été supprimée dans la récente loi sur la consommation. Cet article attendait depuis plus de dix ans son décret d'application. Le décret permettant le blocage administratif des sites pédopornographiques, dispositif qui inspire ce 2°, n'est toujours pas sorti, plus de trois ans après le vote de la loi.
Le blocage administratif peut également entraîner certaines dérives. L'exposé sommaire de la loi propose même de rendre possible le blocage de réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter.
De plus, la généralisation du blocage administratif des sites Internet risque de rendre cette procédure techniquement inapplicable, comme cela avait été souligné lors du vote de la loi permettant le blocage des sites pédopornographiques, par le rapporteur de l'époque.
Enfin, un blocage trop hâtif des sites pourrait être un frein à des enquêtes ayant pour objet de lutter contre les réseaux qui sont derrière ces sites. C'est ce qui avait été rappelé lors des débats de la loi de 2012 relative à la lutte contre le terrorisme. Il ne faudrait pas affaiblir les enquêtes en adoptant cet article.
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