Déposé le 11 mai 2015 par : Mme Nieson, Mme Carrillon-Couvreur, Mme Capdevielle, M. Raimbourg.
I. – L'article 132‑20 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les amendes prononcées en matière contraventionnelle, correctionnelle et criminelle, à l'exception des amendes forfaitaires, font l'objet d'une majoration de 10 %, perçue lors de leur recouvrement. Cette majoration, prononcée dans les conditions prévues à l'article 707‑6 du code de procédure pénale, est destinée à financer l'aide aux victimes. »
II. – Après l'article 707‑5 du code de procédure pénale, il est inséré un article 707‑6 ainsi rédigé :
« Art. 707‑6. – Les amendes prononcées en matière contraventionnelle, correctionnelle et criminelle, à l'exception des amendes forfaitaires, font l'objet d'une majoration de 10 %, perçue lors de leur recouvrement. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette majoration en fonction des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale.
« Cette majoration est destinée à financer l'aide aux victimes.
« Elle n'est pas applicable lorsque les amendes sont majorées en application des articles L. 211‑27 et L. 421‑8 du code des assurances. »
III. – Le paragraphe 1 de la section 1 du chapitre VI du titre XII du code des douanes est complété par un article 409‑1 ainsi rédigé :
« Art. 409-1. – L'article 707‑6 du code de procédure pénale est applicable aux amendes douanières. »
IV. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Le I de l'article L. 612‑42 est ainsi rédigé :
« I. – Les sanctions pécuniaires prononcées en application des articles L. 612‑39 à L. 612‑41 font l'objet d'une majoration dans la limite de 10 % de leur montant, mise à la charge de la personne sanctionnée et destinée à financer l'aide aux victimes.
« Le IX de l'article L. 612‑40 est applicable et les motifs qu'ils énoncent peuvent justifier de moduler le montant de la majoration ou, le cas échéant, de ne pas la prononcer.
« Les montants des sanctions et astreintes prévues à ces mêmes articles sont recouvrés par le Trésor public et versés au budget de l'État. » ;
2° L'avant-dernier alinéa du III de l'article L. 621‑15 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les sanctions pécuniaires prononcées en application du présent III font l'objet d'une majoration dans la limite de 10 % de leur montant, mise à la charge de la personne sanctionnée et destinée à financer l'aide aux victimes.
« Le montant de la sanction et de la majoration doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements. Ces mêmes motifs peuvent justifier, le cas échéant, de ne pas prononcer cette majoration. »
V. – Après l'article L. 464‑5 du code de commerce, il est inséré un article L. 464‑5‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 464-5-1. – Les sanctions pécuniaires prononcées en application des articles L. 464‑2 à L. 464‑5 font l'objet d'une majoration dans la limite de 10 % de leur montant, mise à la charge de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné et destinée à financer l'aide aux victimes.
« Le troisième alinéa du I de l'article L. 464‑2 est applicable et les motifs qu'il énonce peuvent justifier de moduler le montant de la majoration ou, le cas échéant, de ne pas la prononcer. »
VI. – Le second alinéa du I de l'article 44 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les sanctions pécuniaires prononcées en application du même article 43 font l'objet d'une majoration dans la limite de 10 % de leur montant, mise à la charge de l'opérateur sanctionné et destinée à financer l'aide aux victimes.
« Le montant de la majoration doit être fixé en fonction de la gravité du manquement, de la situation de l'opérateur en cause, de l'ampleur du dommage causé et des avantages qui en sont tirés. Ces mêmes motifs peuvent justifier, le cas échéant, de ne pas prononcer la majoration.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. »
Afin de consolider le financement de l'aide aux victimes, le présent amendement vise à instaurer, en tenant compte des observations formulées par le Conseil constitutionnel et des objectifs de la directive européenne du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité, une majoration des amendes pénales et douanières ainsi que des sanctions pécuniaires prononcées par certaines autorités administratives indépendantes (AAI).
En effet, saisi de la conformité à la Constitution de la loi n° 2014‑896 du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales, le Conseil constitutionnel a jugé que le dispositif initialement contenu à l'article 49 de cette loi et poursuivant le même objet que le présent amendement portait atteinte au principe d'individualisation des peines, lequel a, depuis une décision du 22 juillet 2015, valeur constitutionnelle.
Dans sa décision du 7 août 2014, le Conseil constitutionnel a ainsi rappelé que le principe d'individualisation des peines, procédant lui-même du principe de nécessité des peines mentionné à l'article VIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, « implique que la peine d'amende ne puisse être appliquée que si le juge ou l'autorité compétente l'a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ».
Or, l'article 49 de la loi du 15 août 2014 prévoyait l'application automatique de la majoration de l'amende (pénale et douanière) ou de la sanction pécuniaire sans laisser au juge ou à l'autorité administrative une quelconque marge de manœuvre en la matière.
Afin de tenir compte des principes rappelés par le Conseil constitutionnel, le présent amendement fait du prononcé de la majoration des amendes pénales et douanières ainsi que des sanctions pécuniaires prononcées par certaines AAI une obligation à laquelle le juge ou l'autorité administrative peut déroger. À cette fin, le dispositif proposé prend soin de laisser au juge ou à l'autorité administrative la possibilité de majorer, au cas par cas, l'amende ou la sanction pécuniaire, en fonction de critères définis par la loi.
Pour les amendes pénales, la majoration serait prononcée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale. La formule retenue fait écho à celle utilisée à l'article 132‑1 du code pénal, réécrit par l'article 2 de la loi du 15 août 2014, qui pose le cadre général du régime des peines.
Le principe de la majoration des amendes serait en outre inscrit dans le code pénal (en plus de la disposition créée dans le code de procédure pénale), ce que ne prévoyait pas le dispositif dans sa rédaction d'origine. Il figurerait ainsi à l'article 132‑20 réécrit par la loi du 15 août 2014 et consacré au prononcé des peines d'amende.
S'agissant des sanctions pécuniaires prononcées par les AAI incluses dans le dispositif, la majoration et son montant seraient décidés en tenant compte des critères relatifs au nécessaire respect de la proportionnalité des sanctions que le droit en vigueur prévoit d'ores et déjà. Dans cette perspective, le dispositif proposé renvoie :
– pour les sanctions pécuniaires prononcées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, au IX de l'article L. 612‑40 du code monétaire et financier, en application duquel « le montant et le type de la sanction infligée au titre du présent article sont fixés en tenant compte, notamment, le cas échéant :
« 1° De la gravité et de la durée des manquements commis et, le cas échéant, de leurs conséquences systémiques potentielles ;
« 2° Du degré de responsabilité de l'auteur des manquements, de sa situation financière, de l'importance des gains qu'il a obtenus ou des pertes qu'il a évitées, de son degré de coopération avec l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et des manquements qu'il a précédemment commis ;
« 3° Des préjudices subis par des tiers du fait des manquements, s'ils peuvent être déterminés. » ;
– pour les sanctions pécuniaires prononcées par l'Autorité de la concurrence, le troisième alinéa du I de l'article L. 464‑2 du code de commerce, aux termes duquel « les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction », est rendu applicable ;
– pour les sanctions pécuniaires prononcées par l'Autorité des marchés financiers, le III de l'article L. 621‑15 du code monétaire et financier, en application duquel « le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements », est rendu applicable ;
– enfin, pour les sanctions pécuniaires prononcées par l'Autorité de régulation des jeux en ligne, dans un souci de clarté rédactionnelle, le présent amendement reprend, dans le nouveau dispositif, les termes du V de l'article 43 de la loi n° 2010‑476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, qui dispose que le montant des sanctions pécuniaires « est proportionné à la gravité du manquement, à la situation de l'opérateur en cause, à l'ampleur du dommage causé et aux avantages qui en sont tirés ».
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