Déposé le 25 septembre 2015 par : M. Kert, M. de Mazières, Mme Duby-Muller, M. Herbillon, M. Riester, Mme Genevard.
L'article L. 112‑1 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutes les œuvres de l'esprit sont présumées, sauf preuve contraire, originales et bénéficier de la protection instituée par le présent code. »
La protection des œuvres de l'esprit au titre du droit d'auteur est subordonnée à la condition d'originalité.Or , la condition d'originalité ne figure pas dans la loi, à la seule exception des titres d'œuvres (article L. 112‑4 du Code de la propriété intellectuelle). L'exigence qu'une œuvre de l'esprit soit « originale » pour bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur n'est ainsi ni imposée ni définie dans la loi.
C'est la jurisprudence qui a forgé et dessiné les contours de cette notion dont il est aujourd'hui possible de dégager les critères principaux. Il s'agit d'ailleurs d'une notion « harmonisée » au niveau européen puisque la Cour de justice de l'union européenne (CJUE, arrêt Infopaq, 16 juillet 2009) a jugé que la notion d'originalité est une notion communautaire qui doit s'appliquer dans tous les États de l'Union et à toutes les catégories d'œuvres. Une œuvre bénéficie ainsi d'une protection au titre du droit d'auteur à condition qu'elle soit l'expression de la « création intellectuelle propre à l'auteur de cette œuvre » ce qui est le cas lorsque l'auteur a pu « exprimer son esprit créateur de manière originale ».
La définition de l'originalité ne représente ainsi plus un enjeu particulier en ce qui concerne la défense des droits des auteurs.
En revanche, la preuve de l'originalité des œuvres et plus particulièrement des photographies, pose aujourd'hui un véritable problème devant les tribunaux. Jusqu'à ces dernières années, la protection des œuvres au titre du droit d'auteur était considérée comme acquise en l'absence de contestation ou de contestation sérieuse de leur caractère original par le défendeur.
Aujourd'hui, les juges font preuve d'une « sévérité accrue » en ce qui concerne la question de la preuve de l'originalité des œuvres, et plus particulièrement en matière de photographies. Les juges exigent la démonstration de l'originalité par l'auteur ou ses ayants droit pour chaque œuvre objet d'un litige, quel que soit le nombre d'œuvres en cause, dès l'assignation saisissant le tribunal compétent et ce même lorsque l'originalité des œuvres en question n'a pas été contestée par le défendeur.
Cette situation est inquiétante puisqu'elle vient affaiblir voire même rendre impossible la défense des droits des auteurs. En effet, l'exigence d'apporter la preuve de l'originalité pour chaque œuvre faisant l'objet d'un litige rend matériellement impossible lorsque de nombreuses œuvres sont concernées. Il ne serait ainsi, par exemple, plus possible pour une société de perception et de répartition de droits d'auteur d'exercer sa mission de défense des droits dont elle a la gestion puisqu'elle n'est raisonnablement pas en mesure matériellement d'apporter la preuve de l'originalité des milliers voire même des millions d'œuvres appartenant à son répertoire.
Un tel « fardeau de la preuve » constitue une véritable « prime à la contrefaçon de masse » dans la mesure où plus le nombre d'œuvres faisant l'objet d'un litige en contrefaçon sera important, plus il sera difficile, voire impossible, pour les auteurs ou leurs ayants droit de défendre leurs droits.
Face à ce constat, il est indispensable de permettre aux auteurs et à leurs ayants droit d'exercer effectivement et efficacement leurs droits.
C'est pourquoi , le présent amendement vise à renverser la charge de la preuve de l'originalité de l'ensemble des œuvres de l'esprit sur leur utilisateur de telle sorte que, sauf preuve contraire rapportée par ce dernier, les œuvres de l'esprit puissent bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur. Cet amendement permet non seulement d'assurer la défense effective des droits des auteurs mais également de garantir une sécurité juridique aux utilisateurs en rendant prévisible l'application du droit.
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