Déposé le 24 mai 2016 par : M. Baert.
Après le deuxième alinéa de l'article L. 141‑4 du code monétaire et financier, il est inséré l'alinéa suivant :
« Nonobstant disposition ou stipulation contraire, aucun droit de compensation ne peut engendrer l'extinction, en tout ou partie, des créances remises en garantie à une banque centrale membre du Système européen de banques centrales. »
La Banque de France, lors des opérations de refinancement d'établissements de crédit qu'elle effectue dans le cadre de la politique monétaire, exige la création à son profit de garanties, conformément aux règles de l'Eurosystème. Parmi les garanties acceptées, figurent notamment les prêts de ces établissements de crédit sur des entreprises non financières, des entités publiques et, à titre temporaire, de certains crédits immobiliers octroyés aux particuliers ( nommées « créances privées » dans la terminologie de la Banque de France et des établissements de crédit français). La convention d'accès aux opérations de politique monétaire exige que ces créances lui soient remises en pleine propriété à titre de garantie sur le fondement de l'article L. 211‑38 du code monétaire et financier, qui transpose la directive dite « garanties financières ».
En cas de défaillance de l'établissement de crédit, la Banque de France peut réaliser les actifs remis en garantie par cette contrepartie. Les actifs (principalement des instruments financiers et des crédits bancaires) garantissent indifféremment l'ensemble des opérations de refinancement de cette contrepartie, si bien que la banque de France est libre de déterminer l'ordre dans lequel elle souhaite réaliser ces actifs.
Dans le cas où la Banque de France souhaiterait réaliser les créances privées en cédant les crédits bancaires dont la défaillance de la banque lui aura transféré la propriété, elle devra , en tant que cessionnaire, notifier sa créance au débiteur cédé qui ne pourra plus valablement payer la contrepartie cédante (le prêteur à l'origine).
Il s'avère que l'acceptation des crédits bancaires à titre de garantie des opérations de refinancement de l'Eurosystème engendre un risque de compensation. Ce risque pour l'Eurosystème résulte de la possibilité pour un emprunteur de déduire du montant de sa dette envers sa banque les dépôts qu'il détient auprès de celle-ci, à certaines conditions : l'Eurosystème court donc un risque de perte en capital dans le cas où il doit réaliser une telle garantie suite au défaut d'une contrepartie si le montant des crédits bancaires mobilisés sont réduits à hauteur de ces dépôts.
L'exigence de l'Eurosystème que chaque banque centrale nationale se protège de ce risque est d'autant plus crucial dans le cas du système bancaire français que ce dernier est celui qui a le plus recours à ce type d'actifs sous forme de créances privées (83 % du nombre de créances mobilisées et près de 40 % en valeur).
Outre les très grandes difficultés de mise en œuvre que ces mesures pourraient engendrer, leurs conséquences pourraient être très graves, puisqu'elles risqueraient de décourager les établissements de crédit de remettre en garantie ces créances alors même qu'il s'agit d'un actif très utilisé par les banques françaises pour se refinancer.
Cela est particulièrement vrai pour les PME puisque la Banque de France n'applique aucun seuil de montant sur ces crédits bancaires ce qui favorise la mobilisation de prêts de petit montant.
A l'image des disposions déjà prises par quatre États membres de l'Eurosystème - la Belgique, le Luxembourg, l'Espagne et la Slovénie-, il convient donc d'inscrire dans la loi le principe d'exclusion du droit de la compensation à l'encontre des banques centrales de l'Eurosystème.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.